Le 18 septembre 1729 (et non en 1725 comme l'écrit le chanoine Cabaret), alors que la ville de Soissons se réjouit de la naissance du fils de Louis XV - le dauphin Louis, né le 4 du même mois -, le chapitre fait illuminer les quatre faces et la lanterne de la tour de la cathédrale. Le feu prend alors à la lanterne et gagne la charpente de la tour. S'apercevant de la menace qui plane sur la cathédrale, l'évêque de Soissons, Jean-Joseph Languet de Gergy (1715-1730), accompagné de ses serviteurs et vite rejoint par du secours, s'emploie à éteindre l'incendie avant que ce dernier ait provoqué d'importants dommages. Révélant qu'il en avait fait le vœu, Monseigneur Languet de Gergy, avec l'accord du chapitre, fait construire et s'engage à décorer une chapelle donnant sur le collatéral sud de la nef et empiétant donc sur le terrain du palais épiscopal. Cette chapelle est consacrée au Sacré-Cœur de Jésus et témoigne de la part active prise par le prélat dans la diffusion de cette dévotion dont il est un ardent propagateur. Il vient d'aileurs d'achever la rédaction d'une biographie de Marguerite-Marie Alacoque, visitandine de Paray-le-Monial honorée par des apparitions du Christ. D'après les recherches du chanoine Paul Jacquin, qui cite un registre de délibérations capitulaires aujourd'hui introuvable, le chapitre cathédral aurait agréé les plans de la nouvelle chapelle le 12 novembre 1729.

Monseigneur Languet de Gergy est nommé en novembre 1730 à l'archevêché de Sens, sans avoir eu le temps d'accomplir la totalité de sa promesse. D'après le chanoine Cabaret, c'est en 1736 que la chapelle est parachevée aux frais du prélat, recevant alors sa clôture en fer forgé, ses lambris et son ameublement. Une plaque commémorative, encastrée dans le mur occidental, conserve le souvenir du contexte de cette construction et fondation. Le chanoine Paul Jacquin, divergeant de son prédécesseur, place l'achèvement de la chapelle dans le courant des années 1740.

Depuis cette époque, peu de modifications ont affecté cette chapelle. En 1856, le pape Pie IX étend la fête du Sacré-Cœur à l'Église catholique romaine et l'inscrit dans le calendrier liturgique universel. La même année, alors que Monseigneur de Garsignies vient de consacrer le diocèse de Soissons au Sacré-Cœur de Jésus, le tableau d'autel du 18e siècle, qui ne correspond plus au goût de l'époque, est remplacé par une nouvelle toile réalisée par le peintre Félix Genaille. En 1878-1879, l'installation d'un vitrail d'Édouard Didron, illustrant l'histoire de la dévotion envers le Sacré-Cœur, complète l'ornementation du lieu. Cette verrière, détruite pendant la Grande Guerre, est remplacée en 1931 par l'actuel vitrail de Jean Gaudin, allusion discrète au prélat commanditaire, à l'évêque restaurateur, enfin au vocable de la chapelle. Quant à la statue du Christ, sculptée par Jean Descomps dans l'entre-deux-guerres, elle est l'une des rares œuvres de style Art déco qui participent au décor de la cathédrale.

Le tableau d'autel original, qui avait orné un temps la salle capitulaire, est maintenant présenté - avec pertinence - dans cette chapelle.