Origines
D’après sa forme, le toponyme "Oroër" viendrait directement du latin "oratorium" ("oratoire") (É. Lambert, 1982). C’est saint Evrost, ermite du 6e siècle, qui fonde un premier établissement religieux dans une forêt à Oroër, "dans un lieu solitaire à quelques distances de Beauvais" disent les sources (P. Bonnet-Laborderie, 2013). Il est inhumé dans ce couvent en 600. Au 7e siècle, Chrodobert, évêque de Paris, fait construire une nouvelle église à Oroër, près du tombeau où reposent les reliques du saint. L’édifice est augmenté de plusieurs chapelles ou oratoires. À l’usage d’une communauté féminine, c’est Angadrème, sainte née dans le diocèse de Thérouanne, qui dirige le monastère jusqu’à sa mort en 695 (abbé André Delettre). Selon la tradition, l’abbaye est détruite par les Normands au 9e siècle. Les religieuses d’Oroër se retirent alors à Beauvais, avec les reliques d’Evrost et d’Angadrème. Les biens restants sont cédés au chapitre de Beauvais qui les transmet à l’abbaye de Saint-Paul vers 1030. Au 17e siècle, des vestiges d’anciens édifices sont découverts sous l’église. Ils appartenaient peut-être à l’ancien couvent.
Morphologie et parcellaire
S’il ne reste aujourd’hui aucune trace de l’ancienne abbaye, il apparaît que le noyau d’habitation s’est créé autour de l’église actuelle, dont l’emplacement pourrait correspondre à celui du sanctuaire primitif. Oroër était situé à proximité du Chemin de Beauvais, principale et ancienne voie de communication entre Breteuil et Beauvais (actuelle D1001), et traversé par la Via Agrippa, ancienne voie romaine. La présence de ces voies de communication a favorisé le pèlerinage vers le sanctuaire dès le 7e siècle. Aujourd’hui, l’ancienne Via Agrippa qui traversait le village et conduisait à Reuil-sur-Brêche a périclité (la route devient un sentier pédestre se perdant dans les champs, au nord et au sud du village) au profit de la D1001.
Sur le cadastre napoléonien, l’habitat se répartit de façon lâche le long de l’ancienne via Agrippa. L’agglomération est du type village-rue. Les parcelles sont irrégulières et forment des rectangles plus ou moins larges, contrairement à celles des villages du centre et de l’est de l’aire d’étude qui prennent la forme de fines lanières contiguës. Trois noyaux peuvent être distingués : le premier autour de l’église, le second autour du carrefour vers Boursines, le dernier plus au nord du village. Il est à noter qu’à l’intersection vers Boursines, la section de route menant au Chemin de Beauvais (actuelle D1001) est légèrement décalée au sud par rapport au plan actuel du village. D’après l’étude des cadastres, cette déviation a lieu entre 1866 et 1958. La section sud du village se développe plus tardivement, à partir de la seconde moitié du 19e siècle, et surtout à la fin du 20e siècle avec l’édification de plusieurs pavillons résidentiels modernes. Jusqu’alors, la prédominance des activités agricoles expliquait la présence presque exclusive de fermes.
Lieux structurants
Croix de chemin et tour de ville : les limites du village
Élément typique des villages du plateau picard, le Tour de Ville ceinture la zone habitée et structure le cadre du bâti. Son tracé est complet sur le cadastre napoléonien (1826), avec une section est et une section ouest passant derrière les habitations. Aujourd’hui, seule une partie de la section est du cimetière à l’extrémité nord du vilage est praticable.
La croix de chemin dite "calvaire Pierre Defrance " est située actuellement à l’entrée de la ferme sur le carrefour d’Oroër. Sur l'épitaphe, il était possible de lire "Admire ma bonté suprême / Homme [mortel] orgueilleux pécheur / Si je meurs c'est pour toi-même / Adore ton Dieu ton Sauveur / O crux ave / Pierre Defrance 1819" (Association pour la conservation des croix et calvaires du Beauvaisis reprenant l'étude du Docteur Legoux dans le bulletin n°56 du GEMOB). Il a été restauré par ses héritiers en 1855. Initialement implanté à Hénu, il rejoint le centre du carrefour probablement après sa restauration en 1855 car il se trouve sur le plan de 1866. Il est une nouvelle fois déplacé contre la ferme Dobigny dans les années 1950.
Enfin, une autre croix est figurée sur un plan dès 1632, sur le chemin de la Messe (actuelle rue de la Messe) derrière l’église d’Oroër, qui rejoignait la route d'Oröer à Boursines.
Gérer et partager l'eau : mares et puits
Les sols calcaires du plateau picard étant poreux et très secs, l’accès à l’eau est un enjeu fondamental dans les villages. Une importante mare se trouvait devant la façade occidentale de l’église. Visible sur le cadastre napoléonien (1826) et sur celui de 1959, elle a complètement disparu aujourd’hui. Un puits communal se trouvait à l’emplacement de la pompe à incendie (cadastre de 1959), en face du n°12 rue de l’église.
Équipements communaux
Une première école est ouverte à Oroër au début du 19e siècle, derrière l’église actuelle (voir plan). Des travaux de réparation y sont réalisés en 1830. En 1840, elle est agrandie : un terrain est acheté aux époux Lasne et un nouveau bâtiment est construit (AD Oise ; série O). En 1860, une mairie-école est édifiée en brique "à la houille" pour la remplacer. Toutefois, quatre ans plus tard, les bâtiments se dégradent et le conseil municipal accuse l’entrepreneur Lucien Duquesnes d’avoir mal exécuté les travaux. En raison du très mauvais état de l’école (le plafond menace de s’effondrer sur les élèves), l’inspecteur de l’instruction publique demande à la commune son transfert à Boursines en 1881. Après plusieurs refus du conseil municipal, celui-ci est effectif en 1891 lorsque la commune aliène la mairie-école d’Oroër. Les bâtiments de cette ancienne école se trouvent toujours au n°1 rue de la Messe (voir plan de l'ancienne école et plan de l'église et du cimetière).
Le presbytère se trouvait juste au nord de l’église (voir plan de l'église et du cimetière d'Oroër). Il est détruit par un incendie en 1895. Le terrain sur lequel il se trouvait permet dans un second temps d’agrandir le cimetière.
Le premier monument aux morts a été installé au bord de la route menant d’Oroër à Boursines, à l’entrée de l’actuel pont qui traverse l’autoroute, sur la droite en venant d’Oroër. Ce sont les travaux de l’autoroute qui ont sûrement provoqué son déplacement à côté de la mairie de Boursines.
Photographe au service de l'Inventaire du patrimoine culturel de la région Hauts-de-France (2023).