Trois types de fermes
L’agriculture ayant été la principale activité des habitants d’Oroër, ce sont surtout des fermes qui bordent la rue principale du village. Elles sont de trois types, à classer selon leurs dimensions. La première catégorie regroupe les petites fermes de subsistance, habitées à l'origine par des ménagers, manouvriers ou petits artisans qui s’assuraient des revenus complémentaires à leur activité extérieure. Bien représentées sur le cadastre napoléonien (1826), ces fermes typiques du plateau picard, caractérisées par une grange avec porte charretière alignée sur la rue et un logis en fond de cour, ont presque complètement disparu à Oroër. Seul le n°1 rue de l’Église peut se rattacher à cette famille. Les autres fermes de ce type ont disparu, laissant place à des pavillons résidentiels modernes.
La seconde catégorie est également ancienne (visible sur le cadastre napoléonien, donc datant au moins du premier tiers du 19e siècle) et plusieurs exemplaires sont encore en place aujourd’hui. Elle correspond aux exploitations agricoles de petite et moyenne taille, spécialisées dans la céréaliculture. Ce sont les habitations des petits cultivateurs mentionnés dans les recensements de population du 19e siècle. Plusieurs fermes de ce type, identifiables sur le cadastre napoléonien sont encore présents aujourd’hui comme le n°2, le logis au n°3bis (les bâtiments agricoles ont disparu) du chemin Brunehaut, ainsi que le n°2 rue Claude (ill.). Pour ce dernier exemple, l’exploitation est presque conservée dans son intégralité. Le logis, prolongé par une imposante porte charretière, est aligné sur la rue. En fond de cour se dresse une grange, témoin de l’ancienne activité d’un petit cultivateur propriétaire.
Enfin, la troisième catégorie renvoie aux grosses exploitations agricoles qui se développent dans la seconde moitié du 19e siècle et la première moitié du 20e siècle, profitant de l’exode rural pour s’agrandir et se reconstruire. Plusieurs exemples sont observables sur le territoire communal. À Oroër, le n°5 rue de l’Église (ill.) est une ancienne exploitation agricole dont les riches propriétaires ont fait construire un imposant logis en brique en 1856. Il est toujours en place. La grange d’origine se trouvait en face du logis, alignée sur la rue. Elle a été déplacée un peu plus à droite de l’habitation dans les années 1950. Autre exemple, la ferme située au n°1 rue Claude (ill.) est un remarquable spécimen de ce type d'habitat. Le logis, au centre de la cour, est entouré de bâtiments d’exploitations distribués le long des quatre côtés de la vaste parcelle habitée. Leurs entrées sont ouvertes sur la cour. La grange, dont la façade alignée sur la rue Claude, porte la date de 1914. Les étables et bergeries sont situées le long de la rue de l’Église. Elles sont surmontées d’un fenil percé de portes à engranger. Dans leur prolongement se trouvent d’autres édifices, peut-être les soues à cochons, les écuries, les chevaux étant le principal moyen de traction des instruments agricoles.
Matériaux de construction
Contrairement à la majorité des villages du plateau picard, la brique prévaut sur le pan de bois torchis dans la mise en œuvre du bâti. Cette prédominance est certainement due à la proximité du territoire d’Oroër avec les briqueteries industrielles de Beauvais. Ce matériau est déjà généralisé dans la première moitié du 19e siècle comme l’illustre l’exemple de l’ancienne ferme au n°2 rue Claude (ill.), visible sur le cadastre napoléonien. Le pignon occidental est remarquable par son appareil mixte de moellon de silex et de brique disposés aux chaînages d’angles et au centre du pignon pour le renforcer. Les rampants du toit sont soulignés par des lames de couteaux picards, mise en œuvre typique de la région, en forme d’escalier, constituée de briques posées en biais. Les imposants logements des n°8, 12bis (ill.) chemin Brunehaut ainsi que le logis de l'ancienne ferme (prenant la forme d'une maison de notable) au n°5 (ill.) rue de l’Eglise datent de la seconde moitié du 19e siècle.
Si la brique est privilégiée dans les constructions nouvelles à partir de cette période, plusieurs exemples d’édifices en torchis sur pan de bois sont encore visibles aujourd’hui. Ces matériaux sont donc plutôt signe d’ancienneté puisque la brique était répandue dès le premier quart du 19e siècle. La grange sur rue percée d’une porte charretière au n°1 rue de l’église présente une maçonnerie en pan de bois et torchis derrière les plaques de tôle. Le solin est en brique. Le pignon sud présente un essentage de clins en bois le protégeant des intempéries. Les logis au n°1 rue de la Messe (ancienne mairie-école) et au n°3 du chemin Brunehaut (ill.) sont également maçonnés en pans de bois et torchis, recouverts d’un enduit à la chaux. Visibles sur le cadastre napoléonien, ils sont antérieurs à 1826, contrairement aux bâtiments de la ferme du n°1 rue Claude, entièrement reconstruite en brique en 1914. Ce dernier exemple illustre que les constructions en pans de bois et en briques coexistent jusqu'au milieu du 19e siècle (la brique prenant l'ascendant dans les décennies suivantes) plus qu'elles ne se succèdent.
En ce qui concerne les couvertures, les couvertures d’Oroër se répartissent équitablement entre l’ardoise et la tuile. Sur les 19 maisons que compte le village en 1841, 10 sont en chaume, 8 en tuiles et 1 en ardoise. En 1861, sur les 16 maisons, elles ne sont plus que 4 en chaume, 7 en tuiles et 5 en ardoises.
Photographe au service de l'Inventaire du patrimoine culturel de la région Hauts-de-France (2023).