Placé sous le patronat de saint Laurent, « Morlai » figure sur une carte de 1744 ainsi que sur la carte de Cassini (1758) sous la forme d'un petit "hameau sans église" selon la légende.
D'après Florentin Lefils (« Histoire de la ville... »), l'étymologie de Morlay viendrait de "lai de mer". Deux autres hypothèses étymologiques ont été émises : la première indique comme base « mor » : maison, et « lanon » signifiant vue sur la mer, la seconde « mor » : marais et « laca » : étang ou mare. Son patron est saint Martial.
Rodière indique que le hameau dépendait du baillage de Rue. La seigneurie, tenue du roi, appartenait primitivement à une grande famille féodale, présente dans les sources dès la fin du 11e siècle. Le seigneur du lieu était le sieur Vaillant ; les sieurs de Monchy et des Essarts y avaient également chacun un fief. Florentin Lefils précise que la léproserie du Val-de-Buigny, appartenant à Abbeville, y possédait des terres au 15e siècle.
Le hameau faisait partie, avec Pomplimont, de la paroisse de Nolette, rattachée à l'abbaye de Saint-Valery. Elle disparut lorsque Nolette fut annexé à Noyelles, Morlay à Ponthoile, le Hamelet à Favières et Ponthoile.
D´après le recensement de population, jusqu´en 1881, le nombre d´habitants stagna aux alentours de 200. Dès le début du 20e siècle, le chiffre se mit à diminuer pour atteindre les 143 âmes en 1911. Il resta stationnaire (160) jusqu´en 1936, tout comme le nombre de constructions entre 1872 et 1936 (environ 50).
En 1876, Morlay comptait tonneliers, propriétaires, couvreurs, concierges, couturières, élèves des hospices, meuniers, cordonniers, bergers, couturières. La commune possédait déjà un moulin en 1715, situé à l´ouest du territoire (A.N. : N III Somme 74) ; il semble avoir disparu après 1910.
Morlay disposait d´un grand troupeau de moutons en raison de la proximité des molières, dans lesquelles ils allaient paître. Mais, au cours du 18e siècle, l´Etat racheta les pâturages qu´il estimait domaine public. Ponthoile et Morlay, qui rassemblaient 6000 moutons en 1742, n´en comptabilisaient plus que 300 en 1763. Au 19e siècle, la location des molières communales à des particuliers constituait un revenu intéressant pour la commune. La baie de Somme et tous les villages qui la composent disposaient d´ailleurs d´une organisation spécifique pour le droit de pâture dans les molières, gérée par le syndicat des hartiers.
Dès le début du 20e siècle, l´élevage des ovins, touchés par la maladie, fut remplacé par celuis des bovins (uniquement vaches laitières), plus résistants à l´humidité des sols. Tout au long du 20e siècle et ce, jusque dans les années 1960, les fermes élevaient en moyenne quatre à cinq vaches (le maximum autorisé était quinze). L'élevage et la production de lait composaient le principal revenu des habitants. La culture de la terre (betterave, pomme de terre, blé) et la vente des produits au marché du Crotoy offraient un complément de ressource. Vivant en autarcie, les hommes étaient bien souvent saisonniers et les femmes s´occupaient du bétail.
Avant la construction de la RD 960, le hameau (situé sur la route de Saint-Valery à Abbeville) était la plaque tournante de nombreux échanges commerciaux, facilités par la présence de la gare de Noyelles-sur-Mer.
Certains métayers possédaient une seconde activité de serrurier. Les trois usines de Sailly-Flibeaucourt (Vachette, Paumered et Stremler) amenaient les pièces à domicile, afin que les artisans les assemblent. Chacun avait sa spécialité (type de serrure, cadenas).
En comparant le bâti du 18e siècle (extrait de la carte du Marquenterre, A.D. 80 : RL 343) et celui de 1833 (cadastre napoléonien), on peut s´apercevoir que de nombreuses constructions ont été édifiées entre ces deux périodes. Sur ce dernier, la distribution des habitations, situées de part et d´autre d´un espace viaire formant une boucle, est relativement éparse. Les constructions étaient indépendamment implantées à l´aplomb ou en retrait de la voie de circulation, sur une large et longue parcelle de terre. Le logis était généralement situé parallèlement à l´espace public. Le tracé sinueux des routes indique une origine naturelle (dépendant du réseau hydrographique). Les dents creuses furent comblées à la limite des 19e et 20e siècles, les exploitations détruites n´ayant pas été reconstruites au même emplacement. Peu ont donc conservé leurs fondations d´origine.
Le bâti actuel est donc totalement différent de celui du 19e siècle. Les constructions de la seconde moitié du siècle (qui ne figurent donc pas sur le plan de 1833) ont investi en majorité l´ouest du hameau (la rue du Moulin en particulier). Nous ignorons la raison de ce développement à cet endroit précis et à cette date. Mais il semble probablement lié à l´introduction du chemin de fer et à la stabilité du terrain (à l´origine marécageux) qui devint de plus en plus stable avec la construction successive de renclôtures à la fin du 18e siècle. De plus, l´édification du canal de la Maye jusqu'au Crotoy permit aux canaux de s´y jeter permettant un meilleur drainage des terres.
Le 19 juin 1885, on évoqua l´emplacement de la future halte de Morlay pour le chemin de fer d´intérêt local de Noyelles au Crotoy. Mais celle-ci était d´un accès peu aisé à l´extrémité du hameau, éloignée du chef-lieu et des autres écarts. En rapprochant le tracé du centre de Morlay, ces inconvénients disparurent. Le chemin de fer constitua pour le hameau un facteur de développement économique. Peu à peu, le petit train cessa de s´y arrêter, les activités agricoles diminuèrent. L´activité économique du hameau dépérit ainsi peu à peu après la Seconde Guerre mondiale.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France.