Dossier d’œuvre objet IM62003988 | Réalisé par
Girard Karine (Rédacteur)
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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Riboulleau Christiane (Contributeur)
Riboulleau Christiane

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.

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  • enquête thématique régionale, La première Reconstruction
  • mobilier et objets religieux
  • patrimoine de la Reconstruction
Ensemble des verrières historiées des huit chapelles latérales de la nef de l'église Saint-Nicolas de Bapaume
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes du Sud-Artois - Bapaume
  • Commune Bapaume
  • Adresse Église paroissiale Saint-Nicolas , rue de l'Église
  • Emplacement dans l'édifice chapelles latérales de la nef (baies 1 à 6, et 8 à 10).
  • Dénominations
    verrière
  • Titres
    • Ensemble des verrières historiées des huit chapelles latérales de la nef
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante

Les productions des fils de Joseph Benoit, à la tête de l'atelier depuis 1936 et tous les deux élèves des Beaux-Arts de Nancy, reprennent plusieurs caractéristiques des œuvres de leur père, comme l'équilibre des compositions et leur côté très théâtralisé. Les personnages portent des costumes détaillés et réalistes pour les vêtements les plus récents (baie 9 : baptême de Sainte Thérèse, baie 1 : prêche du curé d'Ars). Leurs attitudes sont très étudiées afin de leur donner un maximum de vie (Christ semeur de la baie 1, curé d'Ars de la baie 1). Ils sont positionnés devant un paysage qui contribue à la véracité de la scène, même si ce dernier est une invention (église pour le baptême de Clovis baie 9, champ du moissonneur baie 1 ou lac de Tibériade à l'arrière plan de l'appel des apôtres baie 10). De même, les visages sont très expressifs dès qu'il s'agit d'exprimer les sentiments humains (visages des apôtres baie 10, ou du Christ pendant son baptême baie 9) et parfois même individualisés (visage du père de sainte Thérèse baie 9). Les mouvements des corps, fidèles à la réalité anatomique, sont visibles sous les vêtements, traités en volumes géométriques simples (particulièrement visible dans la baie 1 sur le thème de la moisson divine).

La géométrisation des vitraux s'accentue au fil du temps, de gros traits noirs en grisaille doublant le réseau de plomb venant également rythmer la composition. Le style des années d'après-guerre accentue le côté géométrique et fractionné (cas des paysages de la baie 4 consacrée à saint Hubert). Les couleurs sont très soutenues, franches et le blanc très lumineux. Cependant, l'ensemble continue à être d'apparence très classique.

À partir de 1950, l'intervention de plus en plus fréquente d'artistes abstraits pour créer des cartons modifie l'aspect des vitraux. Les personnages deviennent de plus en plus grands et filiformes (Pietà de la baie 5, en particulier le corps du Christ, très maigre qui coupe le vitrail d'un bord à l'autre), jusqu'à occuper tout l'espace. Les corps sont stylisés et semblent figés (comme le corps du Christ de la Pietà de la baie 5). Les fonds sont souvent abstraits, traités géométriquement (baie 5), ou lorsqu'il s'agit de paysages, les perspectives sont faussées (baie 4, ordination de la baie 10).

Contrairement à ce qui se passe pour d'autres églises où les compositions restent simples pour leur thème principal mais deviennent confuses dans les détails, les vitraux de Bapaume sont assez facilement compréhensibles. Pour les thèmes religieux, les frères Benoit, qui maîtrisent moins que leur père les subtilités de l'iconographie catholique, s'inspirent de peintures célèbres, de descriptions tirées des livres saints ou font appel à un théologien. Les vitraux portent souvent une inscription identifiant le sujet directement au bas de la composition, et non plus dans un cadre rapporté en dessous. L'abstraction, d'abord cantonnée aux fonds, finit par envahir tout le vitrail dont elle devient le sujet, supprimant toute représentation de la figure humaine (baie 2) ou la présentant de manière déformée par la simplification des corps en volumes géométriques grossiers. La juxtaposition des couleurs prend alors une place primordiale dans la composition du vitrail.

Les vitraux des chapelles latérales de l'église de Bapaume illustrent bien le style de l'atelier et son évolution entre 1950 et 1960. Ils conservent cependant des points communs comme la présence d'un texte en lettres blanches majuscules sur fond noir en bas de chaque vitrail, ou la bordure alternant verres carrées et rectangulaires qui cerne chaque vitrail.

Enfin, on peut remarquer que la plupart des iconographies et des emplacements sont conformes à ce que décrit Dégardin : la chapelle saint Joseph est bien consacrée à la moisson des âmes (baie 1), la quatrième au baptême (baie 9) et la cinquième au sacerdoce (baie 10). Le thème de l'enfant prodigue a finalement été traité dans la première chapelle (baie 3), même s'il a fallu attendre un demi-siècle pour voir la réalisation du vitrail. Finalement, seule Jeanne d'Arc n'a pas bénéficié de son vitrail... ce qui est d'autant plus amusant que les vitraillistes sont lorrains ! L'extension du programme à saint Hubert est sans doute dû au désir des donateurs du vitrail.

Faute de financement, le verre blanc qui depuis la reconstruction de l'église fermait les baies des chapelles latérales n'est remplacé par des vitraux qu'après la Seconde Guerre mondiale. En 1945, Dégardin précise le programme iconographique de certains vitraux établi dès la reconstruction. Les trois vitraux qui orneront la chapelle Saint-Joseph représenteront au milieu le Semeur, à gauche un moissonneur, et à droite, le curé d'Ars, du haut de sa chaire, faisant le catéchisme. La première chapelle est pressentie pour accueillir des vitraux sur le thème de l'enfant prodigue ; la troisième pour être consacrée à l'histoire de Jeanne d'Arc ; la quatrième illustrera le baptême avec au milieu le Baptême du Christ, à gauche le baptême de Clovis et à droite, le baptême de de Sainte-Thérèse de l'Enfant Jésus ; et enfin, la cinquième parlera du sacerdoce avec au centre un prêtre à l'autel élevant le calice, à gauche Notre-Seigneur invitant saint Pierre et André à quitter leur barque pour le suivre, à droite, une ordination sacerdotale.

La quasi-totalité des verrières des chapelles de la nef est réalisée entre 1946 et 1958 par l'atelier Joseph Benoit de Nancy. Si plusieurs vitraux sont signés et datés (baies 1, 5, 2 et 4), d'autres peuvent être attribués à l'atelier Benoit par rapprochement stylistique (baies 9 et 10).

A la fin de cette première phase de travaux, le programme initial tel qu'il est décrit par Dégardin n'a pas été totalement respecté. Si le baptême, le sacerdoce ou la moisson des âmes sont bien présents et conformes aux compositions imaginées lors de la reconstruction de l'église, les vitraux consacrés à Jeanne d'Arc ou à l'enfant prodigue ne sont pas réalisés. A l'inverse, la conversion de saint Hubert, installée dans la baie 4 en 1955, n'apparaissait pas dans le programme.

Deux autres artistes verriers interviennent plus tardivement dans les chapelles qui ne bénéficiaient pas de verrières. Il s'agit de Lucien Langlet en 1964 (soit un peu plus tard que son intervention pour les fenêtres hautes) pour la baie n°8 qui est signée et datée, et de l'artiste contemporaine Béatrice Demory en 2013 pour la baie n°3. Le vitrail est signé et la date de pose est connue par des articles de journaux publiés au moment de l'inauguration.

Au moment de l'enquête, la baie n°7 était toujours occupée par du verre blanc.

  • Dates
    • 1946, porte la date
    • 1954, porte la date, daté par source
    • 1955, porte la date
    • 1958, porte la date
    • 1964, porte la date
    • 2013, daté par source
  • Commune : Nancy
  • Auteur(s)
    • Auteur :
      Maison Joseph Benoit, Nancy (1912 - 2011)
      Maison Joseph Benoit, Nancy

      L'atelier Joseph Benoit est un atelier nancéien. Il a successivement vu travailler Joseph Benoit (1871-1939), puis ses deux fils Henri (1899-1960) et Pierre (1904-1977).

      Au départ en retraite de Pierre en 1969, la société est rachetée par les ouvriers de l’atelier et devient l’Atelier 54. Installé quelques années plus tard à Saint-Nicolas-de-Port (à proximité de Nancy), l'atelier a fermé en 2011.

      (Pour plus de détails sur l'histoire de l'entreprise et les caractéristiques stylistiques de l'atelier Joseph Benoit, voir l'annexe : L'atelier Joseph Benoit : des nancéiens au service des verrières de l'église Saint-Nicolas de Bapaume).

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      peintre-verrier signature, attribution par source
    • Auteur :
      Demory - Lemay Béatrice
      Demory - Lemay Béatrice

      Née à Roubaix en 1957.

      Diplômée en art graphique de l’école des Beaux-Arts de Cambrai et nombreuses formations à l'école d'art de Douai.

      Activité d'artiste-verrier en complément de son métier d'enseignante d'art plastiques.

      Restauratrice de vitraux : églises de Rubrouck, Bapaume...

      Extrait de son site internet (https://beatricedemorylemai.jimdofree.com/, consulté le 25 janvier 2021) : "L’artiste maîtrise également le travail du verre et nous présente une série de vitraux d’une grande originalité, tels ceux mixant verre, fusing et thermoformage. Ces œuvres sont visibles à l'église de Bapaume, à Pellusin , à Arras, à la maison de retraite de Vaulx-Vraucourt, à Bauvin, à Clermon-Ferrant, à Igrande, à Anglet et chez des particuliers."

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      peintre-verrier signature
    • Auteur :
      Langlet Lucien
      Langlet Lucien

      En 1943, il intègre les ateliers de Constant Cléty et Léonce Bocquet à l’École des Beaux-Arts de Lille, dont il sort diplômé en 1947. Les quelques mois passés en Algérie pour son service militaire et la découverte de l'Italie lui font éclaircir sa palette.

      A son retour, il se consacre à la technique du vitrail dans l'atelier du maître-verrier lillois Gaston Surty. C'est avec lui qu'il réalise les vitraux de la chapelle du collège St Jean Baptiste à Bapaume en 1947.

      Il participe aux deux expositions universelles de Montréal (1967) et d'Osaka (1970).

      Il avait son atelier au 18, rue de Douai à Bapaume.

      Il est le fils de Daniel Langlet.

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      peintre-verrier signature

Les fenêtres des chapelles sont organisées de manière identique : un triplet de baies juxtaposées en arc brisé, celle centrale étant plus haute que ses voisines, est réuni sous un arc en légère ogive.

La plupart des verrières ont été réalisées en verre antique avec réseau de plomb : les verres sont monochromes et les séparations en plomb viennent délimiter des parties de corps, de vêtements ou d'architecture qui construisent les gros traits de l'image. Une grisaille très foncée et épaisse est déposée de chaque côté des plombs afin d'en augmenter l'épaisseur. Cette technique, qui apparait dès les années 30, est énormément utilisée à partir des années 50. Une grisaille plus légère est utilisée pour individualiser les traits des visages et transmettre les émotions, préciser les détails anatomiques ou ceux des éléments des décors comme les broderies des vêtements.

La verrière de la baie 2 est faite en dalle de verre à réseau de ciment : les pièces de verre d'une épaisseur minimum de 3 cm (donc beaucoup plus épaisses que dans un vitrail traditionnel), sont enchâssées dans du béton. Ici, ainsi que cela est inscrit sur le vitrail, les pavés sont en cristal de Baccarat.

Pour la baie n° 3 consacrée à la congrégation des sœurs de Marie, l'artiste a associé de nombreuses techniques. Le verre, traité par grands pans monochromes, peut être lisse, cathédrale ou avec des inclusions. Le réseau de plomb est utilisé non seulement de manière classique pour séparer des zones de couleurs différentes, mais aussi pour animer les volumes des vêtements, comme le manteau de la vierge ou l'habit de la religieuse. Les visages sont peint à la grisaille. Enfin, pour certains verres multicouches, c'est la technique particulière de la gravure à l'acide qui a été utilisée.

Sur son site Internet (https://beatricedemorylemai.jimdofree.com/), Mme Demory reprend le commentaire d'un galeriste sur son travail, qui s'applique aux vitraux de l'église de Bapaume : "Là encore, tradition et modernité se confondent (...), et les contrastes, à nouveau, s’en mêlent… Des verres structurés, des verres "cathédrales" aux couleurs pures, des verres luxueux importés d’Amérique, se côtoient entre les baguettes de plomb soudées à l’étain. (...) et l’écriture fait son apparition, minutieux travail de pinceau tout droit venu d’un scriptorium des temps jadis…"

  • Structures
    • lancette, 3, en arc brisé
  • Matériaux
    • plomb, réseau
    • béton, réseau
    • verre transparent, coloré verre antique, peint, grisaille sur verre, gravé à l'acide
    • cristal, moulé coulé
  • Précision dimensions

    lancette centrale : h = 145 ; l = 75. Lancettes latérales : h = 120 ; l : 60.

  • Iconographies
    • semailles et moisson divines
    • congrégation des servantes de Marie
    • Vierge à l'Enfant
    • maesta
    • Vierge de Pitié
    • baptême
    • Saint-Esprit
    • conversion de saint Hubert
    • Vocation des apôtres
    • messe
    • ordination
  • Précision représentations

    Il n'y a pas de programme iconographique global pour les verrières des chapelles, contrairement à celles du chœur et de la chapelle Notre-Dame-de-Pitié. Certains éléments rappellent cependant, bien que dans une technique différente, le décor peint qui ornait les chapelles de la précédente église. C'est par exemple le cas des sacrements, dont il reste le baptême et l'ordination.

    Chaque baie est consacrée à un thème. Il n'y a pas systématiquement de continuité de la composition entre les trois verrières : ce sont souvent trois illustrations indépendantes du même thème.

    Baie 1 : Le divin semeur et la moisson des âmes

    Le thème du vitrail est celui de la (con)quête de nouveaux fidèles ou plutôt de la diffusion de la parole divine. Le sujet de chaque vitrail est inscrit en bas de la composition en lettres majuscules blanches en réserve sur un fond noir.

    Sur le panneau central, Jésus est représenté avec le geste et les attributs du semeur. Un bras tendu avec la main fermée sur une poignée de graines prêtes à être lancées à la volée, l'autre soutenant une besace portée en bandoulière, il est en train de planter les graines de la foi. Plusieurs choses peuvent contrarier la propagation de la parole divine. Elles sont symbolisées, au premier plan du vitrail central, par les chardons qui gênent la pousse des autres plantes et les oiseaux qui picorent le grain avant même qu'il ne commence à germer. Le choix des chardons, et non des XXX habituels, est peut-être une évocation de l'origine lorraine de l'atelier Benoit. À l'arrière plan, un soleil rayonnant se lève, illustrant peut-être que ces premières semailles ne sont que les prémisses d'une communauté de fidèles toujours plus nombreux.

    Dans le vitrail de gauche, agenouillé au premier plan, un paysan récolte à la faucille les blés murs, symboles des âmes sauvées par la foi. Derrière lui, le champ à moissonner est déjà couvert de gerbes et de meules, montrant le succès des opérations de semailles menées dans le vitrail central.

    Le vitrail de droite montre l’actualité de la mission de catéchèse, qui accompagne la diffusion de la parole du Christ, assurée par les prêtres, ici représentés par le plus célèbre d'entre eux, le curé d'Ars. Contrairement aux deux autres scènes qui étaient construites autour d'un seul personnage en plein air et dans des tons chaleureux de rouges et de jaunes, la scène avec le curé d'Ars est en intérieur, dans des couleurs bleues plus froides, et elle compte quatre personnages.

    Baie 3 : La congrégation des Servantes de Marie

    Le thème, en lien avec la maison d'enfants située en face de l'église, se déploie en continuité sur les trois verrières.

    L'orphelinat, qui existe depuis 1867, a toujours été géré par les religieuses de l'ordre des Servantes de Marie. Le vitrail central montre une Vierge à l'enfant. Tous deux sont couronnés. Il s'agit de Notre-Dame-du-Refuge, sainte patronne de la congrégation. Sur le vitrail de gauche, une représentation stylisée de l’orphelinat de Bapaume sert d'arrière-plan à une "sœur bleue", surnom donné aux religieuses à cause de la couleur de leur habit, s'occupant d'un orphelin. Le vitrail de droite montre un père serrant son fils, encore enfant, dans ses bras, survolés par la colombe de l'Esprit Saint. On pourrait interpréter cette image comme celle d'un parent retrouvant son enfant après une longue séparation, et pourquoi pas après un séjour dans l'un des établissements d'accueil des Servantes de Marie.

    Hormis l’orphelinat, les décors de fond sont abstraits, composés d'arcs de cercle entrelacés. Le même soleil rouge ceint d'une couronne jaune se retrouve sur les trois vitraux.

    Baie 5 : Vierge à l'enfant, Maesta et Pietà

    Les trois vitraux représentent la Vierge et son fils à différentes étapes : bébé à gauche, jeune enfant à droite et mort au centre.

    La Vierge à l'enfant est assez classique dans son attitude, son visage légèrement penché vers son fils qu'elle porte sur le bras gauche, tout en lui tenant les mains de sa main droite. Cette composition, appelée Notre-Dame-du-Perpétuel-Secours, est inspirée des icônes orientales. De chaque côté de sa tête couronnée, se trouve un ange cérophérère (c'est à dire portant un cierge). Deux carrés de verre en haut du vitrail portent des lettres grecques majuscules peintes en noir.

    La Vierge de droite rappelle les maesta médiévales par sa position frontale et le fait que l'enfant qu'elle présente soit un jeune garçon et non un petit enfant. Elle porte dans sa main droite un rameau d’olivier, symbole de la paix que son fils apporte sur le monde. Jésus porte dans sa main droite la colombe du Saint-Esprit et dans la gauche le globe terrestre surmonté d'une croix, qui rappelle qu'il est le sauveur du monde.

    Enfin, au centre, la Pietà est dans une attitude classique. Seule la main gauche qui se relève dans un geste d'imploration apporte une légère touche d'originalité. Elle constitue sans doute un rappel de la Pietà de Bapaume.

    Contrairement à la Pietà, représentée en entier, les deux Vierges latérales sont coupées à mi-corps, les plis de leurs vêtements semblant se fondre progressivement dans le décor de mosaïque rouge-orangé qui les entoure. Le fond des trois vitraux est composé d'un motif non figuratif de petits morceaux de verres carrés ou rectangulaires dans un camaïeu de rouges, sur lequel vient se détacher le bleu du manteau de la Vierge. Les carnations sont plus roses dans les vitraux latéraux, qui correspondent à des moments heureux, que dans la Pietà centrale où elles tirent sur le parme et le vert. Dans tous les cas, la peinture des visages à la grisaille permet une grande sensibilité dans la traduction des sentiments.

    Baie 9 : le baptême

    Les trois panneaux associent trois scènes distinctes. Une bordure alternant verres carrées et rectangulaires cerne chaque vitrail.

    Le vitrail central est consacré au baptême fondateur de la chrétienté, celui du Christ, baptisé par saint Jean-Baptiste dans le Jourdain. Ce baptême dans la nature permet à l'artiste de créer un arrière plan végétal orientalisant, si ce n'est botaniquement réaliste.

    À droite, le baptême de Clovis est sans doute en lien avec la fin de première guerre mondiale, où la France a retrouvé son intégrité territoriale, mais surtout la conscience d'être de nouveau une Nation unie. En effet, et bien que les études récentes aient relativisé l'importance du baptême de Clovis pour ses contemporains, l'Histoire a fait de ce moment celui de la naissance de la Nation. À l'arrière de Clovis, se trouve son épouse, Clotilde, qui a contribué à la conversion de ce dernier au christianisme. On peut noter c'est un baptême par aspersion dans une cuve baptismale qui est représentée, alors qu'à l'époque de Clovis, c'est encore le baptême par immersion dans une piscine qui est pratiqué... La position de saint Rémi, à droite du baptisé, tout comme le geste de sa main venant au dessus de la tête et la présence d'une coquille Saint-Jacques, sont très proches de la composition du vitrail central.

    Le vitrail de gauche est consacré au baptême de sainte Thérèse de Lisieux. La scène semble très réaliste, à la fois dans la représentation du baptême et dans les vêtements et attitudes des personnages. La comparaison avec des portraits photographiques du père de sainte Thérèse montre par ailleurs que le vitrailliste a travaillé à la ressemblance avec son modèle.

    Comme pour la baie 1, deux scènes "historiques" sont associées à une scène illustrant l'histoire récente de l’Église. Il s'agit peut-être de montrer que l’Église et la foi sont validées par leur durée, mais que cette inscription dans le temps historique ne les empêche pas de rester d'actualité.

    Baie 2 : la colombe du Saint-Esprit / saint Pierre

    Le haut de chaque panneau porte un motif : celui occupant le vitrail central est la colombe du Saint Esprit, qui est d'ailleurs la seule partie blanche du vitrail, des chaines se devinent dans le vitrail gauche et des clefs dans celui de droite. Ces deux derniers éléments sont liés à saint Pierre : c'est à lui que Jésus confie les clefs de son église pour la protéger et la faire croitre, et il a été emprisonné plusieurs fois pour sa foi et libéré par un ange.

    Hormis ces motifs, tous très stylisés, les vitraux ne comportent pas d'éléments figuratifs mais associent des formes géométriques simples : rectangles, trapèzes, triangles et arcs de cercle de couleurs vives. Chaque pièce de verre est monochrome. La chapelle est consacrée à saint Nicolas, connu également pour avoir libéré trois prisonniers, et les clefs et les chaines pourraient être une évocation de cet épisode.

    La technique de la dalle de verre, qui apparaît vers 1930, est régulièrement utilisée par les ateliers Benoit à partir des années 1950 car elle correspond bien au style moderne de l'abstraction géométrique qui se met en place à cette époque. Le style du vitrail rappelle les cartons que Camille Hilaire dessine pour l'atelier Benoit, comme pour les églises Saint-Pient de Moyenvic (Moselle) ou Sainte-Anne de Nancy entre 1955 et 1960.

    Baie 4 : la conversion de saint Hubert

    Le thème est la conversion de saint Hubert, qui vécut entre 656 et 727. Ce dernier, noble seigneur, était si passionné de chasse qu'il en oubliait ses devoirs. Au cours d'une chasse solitaire un vendredi Saint, il voit une croix apparaître entre les bois d'un cerf blanc qu'il pistait. Malgré une poursuite acharnée, il ne parvient pas à abattre l'infatigable animal. Le cerf finit par ordonner à Hubert de cesser de poursuivre les animaux de la forêt pour se consacrer au salut de son âme. Cette vision le pousse à se convertir. C'est la scène qui est représentée sur le vitrail central, où Hubert, l'arc à la main et le carquois à ses pieds, est en train de s'agenouiller devant sa vision, qui occupe le second plan de la scène. Saint Hubert est ensuite devenu évêque de Maastricht puis de Liège, ce que rappellent la mitre et la crosse d’évêque en bas du vitrail de droite. Les vitraux latéraux montrent des animaux de la forêt en train d'assister au miracle. L'ensemble des trois vitraux constitue une seule et même scène.

    Si le traitement du saint et des animaux est assez réaliste, le décor associe à la manière d'un collage aléatoire, des parties naturalistes (branches de chêne, fougères, troncs d'arbres) et des parties de verre dont la couleur n'a rien à voir avec une recherche de représentation du réel. Cette juxtaposition sur le même vitrail de traitements figuratifs et abstraits illustre bien la transition artistique qui s'opère dans l'atelier nancéien à cette période.

    De manière assez surprenante pour un homme ayant échoué à tuer son dernier gibier et ayant renoncé à la chasse, saint Hubert est devenu le saint patron des chasseurs... La clef et l'étole en bas du vitrail de gauche sont en rapport avec le culte qui s'est développé autour du saint, car le jour de la Saint-Hubert, le sel, le pain et l'eau sont bénis pour protéger contre les morsures, et les chiens, chevaux et oiseaux de proie des chasseurs se voient imposer les clefs de Saint-Hubert pour être protégés contre la rage ou guéris en cas de morsure.

    Baie 8 : les cathédrales du diocèse d'Arras

    Les trois cathédrales du diocèse (Arras, Saint-Omer et Boulogne-sur-Mer) occupent chacune un vitrail. Un blason de la ville se trouve en bas de chaque vitrail. Les trois églises cathédrales sont dédiées à Notre-Dame. Toutes sont donc symbolisées par une Vierge, dont seuls les attributs diffèrent.

    Au centre, Notre-Dame-des-Ardents personnifie la cathédrale d'Arras. Elle porte à la main une bougie, et un luth flotte à côté d'elle. Ces deux attributs trouvent leur explication dans une légende : en 1105, la Vierge serait apparue à deux ménestrels pour leur donner une bougie à faire fondre et à mélanger à de l'eau pour soigner des malades du mal des Ardents (ou feu de Saint-Antoine, maladie neurologique provoquée par l'ergot de seigle et qui donne aux malades l'impression d'être en train de brûler). Comme de juste tous les malades, gardés dans la cathédrale d'Arras, furent sauvés...

    La Vierge de gauche est celle de Boulogne. Elle serait apparue près de la ville au 7e siècle, sur une barque poussée par des anges, sous la forme d'une statue portant l'enfant Jésus sur son bras gauche et entourée d'un halo, annonçant qu'elle venait protéger les pêcheurs et la ville en échange de la construction d'une église. Cette apparition a donné naissance à un pèlerinage... et à la construction de l'église demandée puis d'une cathédrale qui se succèdent sur le même emplacement. C'est une Vierge nautonière, c'est pourquoi Langlet la représente sur son bateau.

    Enfin, la cathédrale de Saint-Omer est symbolisée par Notre-Dame-des-Miracles. La statue à l'origine du culte marial pratiqué à la cathédrale est une Vierge à l'enfant couronnée, assise sur une cathèdre et tenant un sceptre fleurdelisé dans sa main droite. L'enfant sur ses genoux, également couronné, bénit de sa main droite. Elle date de 1220. Elle fait depuis sa création l'objet d'une dévotion particulière, à tel point qu'on lui a construit une église. La représentation de Langlet est fidèle à la statue du 13e siècle.

    Dans chaque vitrail, le personnage, réalisé dans un camaïeu orange, est représenté en pied, portant ses attributs, sur un fond abstrait composé de rectangles, de polygones ou d'arcs de cercle dans des tons bleus-verts.

    Baie 10 : la prêtrise

    Les trois panneaux associent trois scènes distinctes. Une bordure alternant verres carrées et rectangulaires cerne chaque vitrail.

    Le vitrail de gauche illustre l'appel des apôtres. Cet épisode, qui apparait dans les évangiles de Luc, Marc et Matthieu, relate le choix de Jésus parmi ses fidèles de douze disciples, qu'il nomme apôtres, et charge d'une mission de prosélytisme. Ce sont les premiers prêtres. À droite, la scène représente une ordination, sacrement par lequel un homme devient prêtre, successeur des apôtres. Au centre l'élévation du calice, qui a lieu pendant l'eucharistie, commémore le sacrifice de Jésus et y associe l'ensemble des fidèles. Après le pastorat (l'accompagnement, l'enseignement des fidèles, la délivrance des sacrements), l'eucharistie, qui permet au prêtre d'être le médiateur du Christ sur terre, est une mission essentielle des prêtres.

    Chaque vitrail est consacré à un seul thème, même si tous concourent à illustrer l'importance de la prêtrise. Contrairement à l'appel des apôtres, les deux scènes contemporaines (élévation du calice et ordination) sont situées en intérieur et sont très réalistes, en particulier dans le panneau central, qu'il s'agisse des détails des vêtements du prêtre ou de l'autel. C'est également le cas des mains ou des mouvements des corps, rendus visibles par les réseaux de plomb matérialisant les plissés des vêtements. Grâce à l'utilisation de la grisaille, les traits des visages sont individualisés, et rendent lisibles les sentiments qui animent les personnages (sérénité et recueillement du prêtre en train d'être ordonné, acceptation des apôtres ou gravité du Christ). La grisaille est également utilisée pour faire les motifs des décors de la nappe d'autel, des vêtements sacerdotaux ou du mobilier liturgique. Les couleurs sont très vives, en particulier pour l'appel des apôtres et l'élévation du calice, où la chasuble rouge sang du prêtre tranche sur la nuée violette et rose qui coupe à mi-corps un Christ entouré de rayons jaunes, oranges et verts. La scène de l'ordination, qui traduit les sentiments intérieurs des personnages (foi, certitude de l'engagement..), utilise des couleurs beaucoup plus douces.

  • Inscriptions & marques
    • date, peint, sur l'oeuvre
    • signature, peint, sur l'oeuvre
    • inscription concernant l'iconographie, peint, sur l'oeuvre
    • inscription concernant le donateur, peint, sur l'oeuvre
    • armoiries, peint, sur l'oeuvre
  • Précision inscriptions

    Baie 1 : Le divin semeur et la moisson des âmes

    Les textes sous chaque verrière sont : au centre "Jésus le divin semeur", à gauche "La moisson des âmes" et à droite "le catéchisme du Curé d'Ars".

    Signature en bas à droite du vitrail de gauche et en bas à gauche du vitrail central : Benoit Frères, Nancy, 1946.

    Le cartouche central porte la mention : Don de Monsieur Le Chanoine Ledoux.

    Baie 3 : La congrégation des Servantes de Marie

    Sous chaque scène latérale, un bandeau bleu porte un texte peint en lettres noires. Le bandeau inséré dans le vitrail de gauche porte le texte "Et il leur redonna le goût de vivre", titre d'une biographie récente (1985) consacrée à Édouard Cestac, fondateur de l'ordre des Servantes de Marie. Sur le vitrail de droite, la bannière porte la phrase "Il était perdu et il est retrouvé" (Évangile selon Luc 15:11–32), qui fait référence au retour du fils prodigue.

    Signé en bas à gauche du vitrail de gauche "Béa" (gravure) et avec le nom entier sur chaque panneau : Béatrice Demory-Lemay.

    Baie 5 : Vierge à l'enfant, Maesta et Pietà

    Les lettres grecques majuscules peintes en noir en haut du vitrail sont Mu et Rho (à gauche), Thêta et Upsilon (à droite).

    Daté et signé en bas à droite du vitrail de gauche : Atelier Benoit, Nancy, 1958.

    Le panneau central porte en bas à droite, peint sur verre, le nom du donateur "Prosper Bouchez Vasseur", riche commerçant de la commune.

    Baie 9 : le baptême

    En bas de chaque vitrail un bandeau explique l'iconographie. Il est écrit en lettres blanches majuscules en réserve sur un fond noir. A gauche, le texte est : "BAPTÊME de Ste THÉRÈSE - Alençon : 4 janvier 1873", au centre "BAPTÊME de NOTRE-SEIGNEUR", et à droite "BAPTÊME de CLOVIS - Reims : Noël 496".

    Le phylactère derrière la tête de Saint-Jean-Baptiste porte le texte "Ecce agnus dei" (Voici l'agneau de Dieu), phrase prononcée par Jean lors du baptême.

    Le vitrail ne porte ni date, ni signature, ni nom de donateur.

    Baie 2 : la colombe du Saint Esprit

    Signé en bas à droite du panneau de gauche : Atelier Benoit, Nancy. Sur ce même panneau, en bas au centre, il est indiqué : cristal de Baccarat et tout à gauche : Don de Melle Julie Huet.

    Baie 4 : la conversion de saint Hubert

    Signé dans le milieu du panneau de droite : Benoit Frères, Nancy, 1955.

    En bas du panneau central on trouve le nom du donateur du vitrail et l'explication de son geste : "Offert par Mr et Mme Bouchez-Merlin, en souvenir du mariage de leur fille Suzanne avec Mr Michel Ficheux, 16 avril 1955".

    Baie 8 : les cathédrales du diocèse d'Arras

    Signé dans le bas droit du vitrail central : L. Langlet, 1964.

    Le symbole héraldique de la ville d'Arras est "De gueules au lion d'or, armé et lampassé d'azur, chargé en cœur d'un écusson d'azur semé de fleurs de lis d'or au lambel de gueules de trois pendants chargés chacun de trois petits châteaux d'or rangés en pal" (Armorial de France). Le blason de Boulogne porte aux angles trois boulets, et au centre un cygne blanc sur un fond rouge. La croix de Lorraine (ou croix patriarcale) est, quant à elle, l'emblème des évêques de Saint-Omer et orne le blason de la ville.

    Baie 10 : la prêtrise

    Le vitrail n'est ni signé, ni daté. Il ne porte pas de nom de donateur.

    En bas de chaque vitrail un bandeau explique l'iconographie. Il est écrit en lettres blanches majuscules en réserve sur un fond noir.

    Les textes expliquant l'iconographie sont "Appel des apôtres" à gauche, "Élévation du calice" au centre et "Ordination" à droite.

    Dans la chapelle où se trouve le vitrail, est accrochée une plaque où sont gravés les noms des curés qui se sont succédé à Bapaume.

  • État de conservation
    • grillage de protection
  • Précision état de conservation

    Grillage à l'arrière pour l'ensemble des verrières.

  • Statut de la propriété
    propriété de la commune

Bibliographie

  • BROCHARD, Valérie. Le vitrail à Nancy des années 20 à nos jours. Mémoire de maîtrise d'histoire de l'art, sous la direction de François Pupil, Université de Nancy II, 2000. Non publié.

    p. 33 à 35
  • DÉGARDIN, Gaston. Rues et monuments de Bapaume. Arras : Presses de l'imprimerie centrale de l'Artois, 1945.

    p. 90-92 ; 111-113.
  • JAJOUX, Christel. Étude du fonds Höner - Janin - Benoit (1850-1950) déposé à l'Inventaire Général de Lorraine. Mémoire de maîtrise d'histoire de l'art sous la direction de François Pupil et Francis Roussel, Université de Nancy II, 1987. Non publié.

    p. 72 à 82
Date(s) d'enquête : 2019; Date(s) de rédaction : 2019
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Girard Karine
Girard Karine

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France.

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Riboulleau Christiane
Riboulleau Christiane

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.

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