Les terres de Bonance, appartenant aux moines de Valloires jusqu'à la Révolution, sont acquises par Jean-Pierre Hecquet d'Orval, ancien manufacturier abbevillois. Son fils Pierre-Emile Hecquet d'Orval crée une exploitation à cet emplacement, vers 1840, date à laquelle il commence les défrichements.
En 1846, le défoncement du terrain pour l´établissement d´une pelouse devant le château engendra la découverte de fondations de 21 maisons, voisines les unes des autres. Les fouilles s´arrêtèrent contre le bois. Mais le village antique s´étendait probablement bien au-delà. Toujours dans le bois, en 1840, l´érudit découvrit les fondations d´un temple gallo-romain (fûts de colonnes et chapiteaux), sur lequel devait s´établir à l´époque mérovingienne un monastère dit de sainte Austreberthe, couvent de bénédictines détruit au 9e siècle par les Normands. Le site fut donc occupé sans discontinuité de l´époque gauloise à l´époque médiévale.
Le recensement de population de 1851 indique qu'il habite alors la ferme de la Creuse. Celui de 1872, signale pour la première fois le château de Bonance, habité par Pierre-Emile Pecquet d'Orval, propriétaire, cultivateur et chevalier de la légion d'honneur, et la ferme du château, comprenant deux logis, celui du concierge et celui du garde des bois. En 1881 et 1906, le château est habité par son fils Fernand Hecquet d'Orval, son épouse la baronne Joséphine Kuppmann Walkella, leurs enfants, nés à Port-le-Grand, et six domestiques étrangers (maître d'hôtel, cuisinier, valet de chambre, deux femmes de chambres et deux palefreniers). Trois logements sont destinés au chef de culture, au jardinier et au berger. En 1911, le château est habité par la veuve de Fernand Hecquet d'Orval, toujours présent sur la liste électorale de 1910, son fils Honoré, né à Paris, et une amie ; la domesticité est plus réduite(femme de chambre, infirmier, cuisinier et valet de chambre) mais six logements abritent le régisseur, un garçon de ferme, un berger, un jardinier, un garde particulier et un chauffeur d'auto.
L'annuaire des châteaux et des départements indique que le château est une résidence secondaire de Fernand Hecquet d'Orval (1851-1911) officier de cavalerie, qui réside également à Paris (16 avenue de l'Alma) et dans son château de Solnitz (Bohème), de 1897 à 1905. Après la première guerre mondiale (1920 à 1927), sa femme apparaît encore dans l'annuaire au château de Bonance et à Paris (26 rue Fabert). De 1926 à 1935, l'annuaire donne le château de Bonnance comme résidence secondaire d'Honoré Hecquet d'Orval et sa femme Annette Le Pelletier, également domiciliés à Paris (22 avenue Bugeaud).
Les cartes postales du début du 20e siècle en donnent une première représentation. Le logis comprend un corps central en brique, de cinq travées. Le rez-de-chaussée avait été percé de larges baies sur la face méridionale. Le premier étage était souligné d'une terrasse peu large avec garde-corps ajouré en pierre. La travée centrale était mise en valeur par une légère avancée en pierre de taille, s'achevant au sommet par un fronton percé d'une double baie cintrée. Cette partie architecturale existe encore.
Le corps central était flanqué au sud-ouest d'une tour octogonale en brique, recouverte à l'étage d'un placage de pierre. Une terrasse devait à l'origine en occuper le sommet puisqu'un garde-corps (similaire à celui du corps central) en ornait le pourtour. Le premier étage était ouvert de nombreuses baies cintrées. L'est du bâtiment d'origine était flanqué dès la fin du 19e siècle d'un imposant corps entièrement en brique avec avancée à pans coupés au sud. Le toit à longs pans brisés et croupes abritait un étage de comble ajouré de lucarnes plates. Cet élément est encore aujourd'hui en place mais est largement modifié.
En 1928, après le mariage d'Honoré Hecquet d'Orval et d'Annette le Pelletier, le logis fait l'objet d'importantes transformations, dans un style vernaculaire régionaliste et historicisant, sur des plans attribués à l'architecte Henri-Pierre Jacquelin, originaire de Louvée comme la jeune épouse. On ignore s'il est intervenu sur le parc.
Occupée par les Allemands, durant la seconde guerre mondiale (Hitler y célébre le noël 1940 avec le général Galland et ses hommes), la demeure a été très endommagée, tout l'intérieur avait été ravagé, sauf les fresques peintes de la main de Madame d'Orval. Il semble, d'après Madame Stalen, que le salon alors possédait du parquet ancien ainsi qu'un bel escalier
Le domaine est ensuite acheté par un marchand de biens lillois, G. Braern. D'importantes coupes d'arbres ont lieu en 1974 sur près de 200 hectares (la hêtraie avait été plantée environ un siècle auparavant par Hecquet d'Orval). Le projet de lotissement, proposé par l'architecte Utudjian en 1977, n'est pas réalisé. Par contre, quatre bâtiments sont construits pour les quatre chiens du propriétaire. Les dépendances n'ont pas subi de modifications.
Chercheur du service de l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie, puis des Hauts-de-France, depuis 2002.