Dossier d’œuvre architecture IA00076462 | Réalisé par
Dufournier Benoît
Dufournier Benoît

Chercheur au service régional de l'Inventaire de 1985 à 1992, en charge du recensement du patrimoine industriel.

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Fournier Bertrand (Rédacteur)
Fournier Bertrand

Chercheur de l'Inventaire du patrimoine - Région Hauts-de-France

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  • patrimoine industriel, Somme
  • patrimoine industriel, la Première Reconstruction industrielle
Ancienne usine de bonneterie Théodore Delacour, puis Tiberghien Frères
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Grand Amiénois - Corbie
  • Commune Villers-Bretonneux
  • Adresse 23-27 rue d'Amiens
  • Cadastre 2016 A 97  ; 2016 A 159-160
  • Dénominations
    usine de bonneterie
  • Appellations
    Théodore Delacour, Tiberghien Frères
  • Destinations
    magasin de commerce
  • Parties constituantes non étudiées
    conciergerie, bureau, cour, enclos, atelier de fabrication, chaufferie, salle des machines, cheminée d'usine, château d'eau, transformateur, magasin industriel, logement de contremaître

Avant la première guerre mondiale, Villers-Bretonneux est l'un des principaux centres de bonneterie du Santerre. Parmi les usines les plus importantes du secteur, figure celle fondée par Théodore Delacour, qui avait créé sa fabrique en 1837 avant d'en céder la direction à son fils François. L'usine, qui fonctionnait d'abord avec la force motrice d'un manège à chevaux, avait été équipée d'une machine à vapeur en 1842.

En 1914, le domaine industriel rivalisait de notoriété avec la demeure de l'industriel, construite entre 1888 et 1893 par l'architecte amiénois Emile Ricquier. Son parc, plus tardif, avait été aménagé pour satisfaire la passion de Jean Delacour, fils de François, qui allait devenir l'un des grands ornithologues français. Les vues anciennes du domaine mettent l'accent sur la composition de cet ensemble comprenant plusieurs volières et bassins dans lesquels Jean Delacour pouvait observer les oiseaux et les plantes qu'il cultivait.

La partie industrielle, attenante au parc vers l'est, était placée sous la direction de Charles Delacour. L'entreprise, qui était spécialisée dans la fabrication de gilets de chasse et de chandails, employait alors près d'un millier de personnes.

Mais en 1917, alors que le bourg de Villers-Bretonneux est au cœur du conflit, l'usine est vendue à Tiberghien frères, une des puissantes sociétés textiles de Tourcoing, constituée ici en SNC Tiberghien Frères, au capital de 25.000.000 de francs. Quelques mois après leur acquisition, en avril 1918, une grande partie des bâtiments est détruit lors du repli allemand face aux troupes australiennes. L'usine est reconstruite grâce aux indemnités de dommage de guerre.

En 1928, la société change de statut juridique et passe sous la forme d'une SARL, dirigée conjointement par René Tiberghein-Flipo, Emile Tiberghien-Breuvart, Eugène Tiberghien Pollet et Louis Tiberghien-Caulliez. L'année suivante, l'entreprise possède les fonds suffisants pour agrandir les ateliers et développer son activité. Ces travaux d'agrandissements sont achevés en 1929. L'élément le plus emblématique de cette phase de reconstruction est le bâtiment des bureaux, construit en brique ocre jaune, qui se distingue volontairement des autres bâtiments simplement réparés.

En 1939, l'établissement, dirigé par Emile Duquesnnoy, avait un chiffre d’affaire de plus de 6 millions de francs. Mais durant la seconde guerre mondiale, l'usine est à nouveau bombardée entre le 20 mai et le 16 juin 1940. Une vingtaine d'obus endommagent les principaux bâtiments de l'usine. Les travaux de réparation sont réalisés sous la direction de Roger Damerval, architecte à Amiens. Plusieurs rapports d'expertise attestent que ces travaux sont en grande partie achevés en 1942. Durant l'après-guerre, l'entreprise travaille pour Pierre Cardin et développe sa propre marque "Mailcott", qui lui garantit une croissance importante jusque dans les années 1970. En 1977, l'entreprise Tiberghien est vendue à la Société Française de Coordination Textile, dirigée par M. Sprecher. L'activité est maintenue sur le site jusqu'en 1984.

Sans usage depuis plusieurs décennies, la demeure de l'industriel attenante à l'ancienne usine est démolie en 2010 par la municipalité qui avait racheté l'ensemble pour y développer un lotissement.

Équipement industriel et machines : En 1843, la filature de laine et fabrique Théodore Delacour est équipée d'une première machine à vapeur de la force de 8 chevaux, construite par les ateliers Potel frères à Amiens et d'une chaudière Doumergue et Veillié, chaudronniers à Amiens. La force motrice est augmentée régulièrement en 1874 et en 1906. En 1940, selon l'inventaire des machines dressé au début de la seconde guerre mondiale, l'usine de bonneterie possède 9 bobinoirs totalisant 300 briches, 41 métiers Cotton, 4 métiers Boer, 49 tricoteuses rectilignes à moteur, une machine à vapeur de 500 chevaux, 73 tricoteuses rectilignes à la main 27 métiers circulaires à platine et 93 machines à coudre. Lors de l'enquête de 1987, plusieurs machines datant des années 1920 étaient encore en place, dont une machine continue à filer du constructeur Schlumberger & Cie datant de 1923, ainsi qu'une machine à tresser, plusieurs métiers à tricoter et des bobinoirs.

Approche sociale et évolution du personnel : En 1938, l'entreprise emploie 350 personnes, dont 314 ouvriers. Le chiffre d'affaires est de 5,73 millions à la même époque et passe la barre des 6 millions l’année suivant 1939. En septembre 1954, l'usine employait 210 ouvriers et ouvrières et 32 employés. En 1983, l'usine emploie 290 personnes.

  • Période(s)
    • Principale : 1er quart 20e siècle, 2e quart 20e siècle
  • Dates
    • 1922, daté par source
    • 1929, daté par tradition orale
    • 1942, daté par source
  • Auteur(s)

L'ancienne usine de bonneterie constitue un vaste ensemble industriel de près de 15.000 m2, implanté le long de la route principale traversant la commune de Villers-Bretonneux d'ouest en est, et reliant Amiens à Saint-Quentin. Ses bureaux, construits en brique ocre jaune sur deux étages, s'étendent sur douze travées. Il se distingue des autres ateliers par la couleur de ses matériaux. Ce bâtiment est couvert d'une double toiture à longs pans et croupe. La plupart des autres bâtiments, construits en brique orangée, sont en rez-de-chaussée et couverts en sheds. La chaufferie et la salle des machines, également en brique, sont couverts de toits en tuile flamande mécanique et verre, à longs pans avec zone d'éclairage zénithal. L'ancien atelier de pliage qui forme retour à l'ouest des bureaux et qui donnait sur le parc du logement patronal, bénéficie d'un traitement architectural soigné. Il présente une façade ordonnancée de dix travées, à un étage carré et combles, couverts d'une toiture en tuile mécanique, à longs pans et pignons couverts. Les deux travées centrales sont traitées en avant-corps, avec pilastres d'encadrement, jeu d'arcatures, faux oculus et fronton triangulaire en pierre. De part et d'autre, les ouvertures de chaque travée sont en plein cintre à l'étage avec fausse balustrade en appui de fenêtre. Elles sont soulignées par un cordon de pierre qui court le long de la façade et épouse le cintre de chacune des baies.

Le logement patronal en brique et pierre, qui était à l'état de vestiges en 1987, a été détruit pour laisser place a un lotissement.

Le logement de directeur est construit en brique. Il présente une élévation à deux étages carrés, de type ternaire, avec travée latérale plus large à l'est. Par ailleurs, l'étroitesse de la façade sur rue accentue sa hauteur que n'atténue pas le recours à une toiture à rives largement débordantes et aisseliers. Le décor, sobre, est apporté par jeu de cordons décoratifs en briques rouges et de briques silico-calcaires grises, qui animent les différents niveaux de l'élévation.

  • Murs
    • brique
    • béton armé
    • brique et pierre
  • Toits
    tuile flamande mécanique, verre en couverture
  • Étages
    sous-sol, 2 étages carrés
  • Couvrements
    • charpente métallique apparente
  • Couvertures
    • terrasse
    • toit à longs pans pignon couvert
    • shed
    • croupe
  • Escaliers
  • Autres organes de circulation
    ascenseur, monte-charge
  • Énergies
    • énergie thermique
    • énergie électrique
  • État de conservation
    établissement industriel désaffecté
  • Statut de la propriété
    propriété privée
  • Intérêt de l'œuvre
    à signaler
  • Éléments remarquables
    machine de production

Malgré les destructions subies au cours des deux guerres mondiales, l'usine a conservé la plupart des dispositions du 19e siècle. Les extensions architecturales réalisées dans les années 1920 sont clairement identifiables par l'emploi de brique de couleur ocre jaune. Si partout ailleurs, la volonté a été simplement de réparer et d'effacer les traces du conflit, pour les parties visibles depuis la rue, le parti pris a été de distinguer les constructions neuves, en soulignant le caractère moderne par l'emploi de briques de couleurs différentes. Cela est particulièrement éloquent pour les bureaux. Ce phénomène se retrouve de manière similaire à l'usine de construction mécanique Maguin à Charmes (Aisne), dont les bureaux construits en 1923 se distinguent également des autres bâtiments de l'usine par l'emploi de brique silico-calcaire grises.

Ce dossier de recensement du patrimoine industriel de la Somme, établi en 1988 par Benoît Dufournier, a été mis à jour et enrichi par Bertrand Fournier en 2016 dans le cadre de l'enquête thématique régionale sur la Première Reconstruction industrielle.

Documents d'archives

  • Centre des Archives Économiques et Financières (CAEF) : B-0009015/1. Dossier de dommages de guerre de la société Tiberghein Frères (1922-1936).

  • AD Somme. Série M ; 5 M 654. Établissements dangereux, insalubres ou incommodes, Villers-Bretonneux (1821-1924).

  • AD Somme. Série R ; 10 R 1275. Dommages de guerre des propriétés Delacour à Villers-Bretonneux (1918-1932).

  • AD Somme. Série W ; 1274 W 122. Dommages de guerre (1939-1945) de l'usine de bonnetererie Tiberghien à Villers-Bretonneux (1928-1954).

Documents figurés

  • Villers-Bretonneux. Rue d'Amiens, fabrique T. Delacour, carte postale, L. Caron, photo-édit. Amiens, [avant 1914] (coll. part.).

  • [Vues intérieures], photographies anciennes, [s.d.] (archives privées).

  • Villers-Bretonneux. Sortie de l'usine Tiberghein, carte postale, éditions Melle Moncomble, vers 1925 (coll. part.).

  • Plan général de l'usine Tiberghien Frères à Villers-Bretonneux, 25 juillet 1929 (AD Somme ; 1274 W 122).

  • Plan masse de l'usine Tiberghien avec indication des impacts d'obus en 1940. Echelle : 1/500e. 6 juillet 1945 (AD Somme ; 1274 W 122).

  • En-tête de lettre commerciale de l'usine Tiberghien de Villers-Bretonneux, 1944 (AD Somme ; 1274 W 122).

  • En-tête commercial de la manufacture de bonneterie Thberghien frères, 1957 (AD Somme ; 1274 W 122).

  • Atelier des métiers Cottons après les bombardements, 1940 (AD Somme ; 1274 W 122).

Date(s) d'enquête : 1986; Date(s) de rédaction : 1987, 2016
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Dufournier Benoît
Dufournier Benoît

Chercheur au service régional de l'Inventaire de 1985 à 1992, en charge du recensement du patrimoine industriel.

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Fournier Bertrand
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