À la fin du 10e siècle, à la demande de la Vierge, saint Gautier, abbé de Saint-Martin de Pontoise se retire dans un ermitage près de la Nièvre, afin de fonder un monastère de femmes à Berteaucourt. Après son retour à Pontoise, les dames Godelinde et Héléguide fondent l'abbaye de Notre-Dame du Pré et sont investies, le 5 novembre 1095, par l'évêque d'Amiens Gervais. Godelende est considérée comme la première abbesse. Comme semble l'indiquer la charte de fondation, le site comprend déjà une église plus ancienne. L'établissement bénéficie dès son origine de nombreuses donations, notamment celles des puissants seigneurs de Saint-Valery, qui tiennent la seigneurie de Beaumetz dont dépend le fief voisin d'Harondel.
Au début du 17e siècle, l'abbatiat d'Angélique d'Estrées, soeur de Gabrielle d'Estrées, favorite du roi Henri IV, attire la protection royale sur l'abbaye qui devient abbaye royale. Les armoiries de l'abbaye ont alors été modifiées pour devenir « de gueules à la tour d'or accompagnée de trois fleurs de lys de même ». Le logis abbatial dit hôtellerie est reconstruit dans la seconde moitié du 18e siècle.
L'abbaye est déclarée bien national le 27 novembre 1789, et la déclaration des biens de l'abbaye est effectuée le 12 février 1790 par l'abbesse Théodore Félicité Parfaite de Carondelet (AD Somme, L 1989/2, cf. annexe 1) : l'établissement abrite alors vingt-cinq religieuses (seize dames de chœur et neuf sœurs converses), une pensionnaire et une fille "agrégée", et quatre chambres d'hôtes extérieures avec cabinet. Les dépendances comprennent une cuisine, un fournil, une boulangerie, une brasserie, un pressoir, un lavoir et une basse-cour avec cinq chevaux, sept vaches, des porcs et des volailles. Le service est assuré par treize domestiques permanents. La ferme est baillée à Bernard Legris depuis 1779, et le moulin à Dominique Binet depuis 1786.
Le répertoire des biens nationaux du clergé (AD Somme, L 1989/2) indique que le 28 juillet 1791, le moulin est vendu au meunier Dominique Binet avec 50 de terres, et la ferme avec 264 journaux de terres à Jean-Philippe Maressal d'Amiens, qui la revend le 20 octobre 1791 au fermier Bernard Legris avec 100 verges de terres et 5 quartiers de bois. Selon la vente des biens faite d'après la loi du 28 ventôse an IV (AD Somme, Q 48), les bâtiments conventuels et l'enclos ("maison, circonstance et dépendance environ 8 journaux et 8 journaux de terre") sont vendus le 20 thermidor an IV (6 août 1796) pour 17 540 francs à Romain Duponchelle Henri Joseph Rulence. Les bâtiments sont dévastés dès 1796 et peu à peu détruits, à l'exception du logis abbatial. À la demande du propriétaire, M. Bénézi, les trois dernières travées du logis abbatial, jouxtant la façade de l'abbatiale, sont abaissées en 1842 au niveau du rez-de-chaussée, sous la conduite de l'architecte Charles Demoulins.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France.