Ce monument signalait à l'origine l'emplacement primitif de la tombe de la famille Gibert. Comme en témoignent l'état-civil et divers documents d'archives, cette famille a occupé une place importante dans la commune de Soucy à la fin du 18e siècle et dans la première moitié du siècle suivant. Louis Gibert, dont le nom est gravé sur le monument (décédé le 19 avril 1794 à 70 ans), est mentionné dans l'état-civil comme "laboureur de la grande maison" ayant été - entre autres - locataire de la grande ferme appartenant à l'abbaye Saint-Médard de Soissons, puis son acquéreur lors de l'adjudication du 12 janvier 1791. Parmi les autres noms déchiffrables sur le monument, figure celui de sa petite-fille Louise Gibert, fille de Louis-Bernard Gibert. Ce dernier qui, à la naissance de sa fille en 1788, est fermier de la ferme de l'Essart à Macogny (Aisne), s'est installé ensuite à Soucy dont il est le maire au moment de la mort de la jeune fille en 1804. La famille Gibert, qui dirige le Conseil municipal pendant toute la première moitié du 19e siècle, semble donc avoir appartenu aux notabilités villageoises de cette période. Les deux derniers noms gravés sont ceux de Louis-Bernard Gibert - cité ci-dessus - et de son épouse Marie-Geneviève Massiette, décédés tous deux à Villers-Cotterêts, respectivement le 13 mars 1843 et le 17 avril 1840.

Bien que les premiers décès mentionnés datent des années 1790, ce monument en forme de pyramide peut avoir été édifié dans le premier quart du 19e siècle, offrant suffisamment de surface pour qu'on y rappelle le souvenir d'ancêtres. Quoi qu'il en soit, cette forme de tombeau fait autant référence à la République romaine, dont la Révolution a exalté les vertus, qu'à la découverte de l’Égypte au cours des campagnes napoléoniennes.

La situation du monument devant la façade de l'église paraît surprenante, car il jouxte presque la voie publique, tandis que l'ancien cimetière - aujourd'hui désaffecté - s'allonge uniquement à l'arrière de l'église. Toutefois, le plan cadastral de 1835 montre un environnement de l'église différent de ce qu'il est aujourd'hui. À cette date, le cimetière se prolongeait contre le flanc sud du lieu de culte et faisait retour devant sa façade. En effet, l'actuelle rue de l’Église qui traverse la commune n'était pas encore percée. Une délibération aigre du Conseil municipal de Soucy rapporte qu'en juillet 1856, sachant que le tracé de cette nouvelle voie devait empiéter sur la partie du cimetière précédant la façade de l'église, Louis-Bernard Gibert fils - alors maire - avait fait déplacer la tombe familiale, dont l'existence était condamnée par la nouvelle voie. Il avait fait creuser de son propre chef un nouveau caveau dans un espace épargné par la route, près du portail, terrain considéré comme "l'un des mieux du cimetière". Ce remarquable monument, transplanté pour l'occasion, signale donc actuellement le second emplacement de la tombe de la famille Gibert.