Si les archives de la fabrique et du chapitre font parfois mention de mitres, il est difficile, en l'absence de descriptions précises, de mettre en rapport l'une de ces indications avec la mitre qui est conservée à la cathédrale. Ce qui est le plus souvent signalé, c'est l'acquisition d'un ornement pontifical en drap d'or, et la mitre n'est évoquée que bien rarement dans l'énumération rapide des pièces qui le composent.

Néanmoins, un document provenant des archives capitulaires, datable du début du 20e siècle semble-t-il, signale que le chapitre détient alors une "mitre précieuse" (c'est à dire réalisée en drap d'or et recouverte de broderies) provenant de Monseigneur de Simony, qui l'aurait utilisée au sacre de Charles X, dit-on. Cette mitre est dans un écrin.

Monseigneur de Simony, nommé évêque de Soissons en octobre 1824 et consacré le 24 avril 1825, avait en effet - comme premier suffragant de l'archevêque de Reims - servi de diacre à ce dernier lors du sacre de Charles X le 29 mai 1825. Peut-être portait-il alors des pièces du nouvel ornement pontifical en drap d'or "d'une richesse vraiment épiscopale" qui avait été réalisé en 1824-1825 par le fabricant parisien d'ornements religieux, Jean-Baptiste de Joly-Fraissinet ? Pourtant, aucune mitre n'est mentionnée parmi les envois successifs de ce fabricant.

On sait également que le roi Charles X avait offert à Monseigneur de Simony, en cette occasion, une mitre ornée de pierres précieuses. Par la suite, les pierres avaient été démontées pour enrichir un ostensoir de la cathédrale. Mais il ne semble pas qu'il s'agisse de cette mitre, à moins qu'elle n'ait profité par la suite d'une adaptation ou d'une restauration indétectable.

Peut-être serait-il encore possible d'y voir un élément de l'ornement épiscopal en drap d'or dont l'État a fait don à la cathédrale à l'occasion du sacre de Monseigneur Dours le 13 mars 1864. Cet ornement, créé par la maison Biais aîné et Cie, 74 rue Bonaparte à Paris, comprend en effet une "mitre précieuse". Toutefois, une copie du mémoire du fabricant signale que la chasuble est ornée de motifs réalisés en fils d'or et soies colorées, et énumère ensuite des pièces d'ornement "assorties". Rien ne permet actuellement de savoir si la soie de couleur est intervenue dans le décor de toutes les pièces de cet ornement épiscopal ou de certaines seulement.

Si l'on considère exclusivement sa forme et son style, cette mitre paraît dater du deuxième quart ou du milieu du 19e siècle, avec un décor influencé par l'art classique, qui prévaut dans la première moitié du 19e siècle, mais n'est pas complètement éclipsé par le style néogothique dans la seconde partie du même siècle. Ceci pourrait en effet correspondre à l'épiscopat de Monseigneur de Simony (1824-1848), prélat qui a légué ses mitres à son successeur, comme le rapporte son biographe. L'objet est conservé dans une boîte en bois qui n'est pas étudiée.