Dossier d’œuvre objet IM02005343 | Réalisé par
Riboulleau Christiane
Riboulleau Christiane

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.

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Plouvier Martine
Plouvier Martine

Historienne, Martine Plouvier a été conservateur régional de l'Inventaire général de Picardie, conservateur en chef aux Archives nationales et directrice du Centre d'études et de recherches prémontrées.

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  • mobilier et objets religieux, la cathédrale de Soissons
Verrière légendaire (disparue) : scènes de l'histoire de Moïse (baie 2)
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Ministère de la culture - Inventaire général
  • (c) Département de l'Aisne
  • (c) AGIR-Pic

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Grand Soissons Agglomération - Soissons-Sud
  • Commune Soissons
  • Adresse Cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais , place Cardinal-Binet
  • Emplacement dans l'édifice chapelle axiale du déambulatoire, dite chapelle de la Vierge (baie 2)
  • Dénominations
    verrière
  • Titres
    • Scènes de l'histoire de Moïse
  • Dossier dont ce dossier est partie constituante

Les verrières originales, à partir desquelles ce vitrail a été créé, ont été conçues vers 1250. Elles sont vraisemblablement l'œuvre d'un atelier ayant également travaillé à la Sainte-Chapelle de Paris (commencée en 1241 ou peu après, et achevée en 1248), comme le révèlent les étroits rapports stylistiques et iconographiques qui existent entre les deux verrières médiévales actuellement présentes dans la chapelle axiale de la cathédrale de Soissons et certains vitraux du monument parisien. Les rapports avec la Sainte-Chapelle ont d'ailleurs été observés dès le 16e siècle au moins. En effet, un procès-verbal, dressé devant notaires le 28 avril 1568 par plusieurs bourgeois de la ville, après le sac de la cathédrale par les protestants, signale parmi les dommages ceux dont souffrent les verrières qui étaient " de grande valleur et de la fasson et semblables à celles de la Sainte-Chapelle de Paris".

Les verrières originales ornaient des fenêtres de "la nef" jusqu'au 18e siècle, ce dont témoigne le chanoine Cabaret. Et d'après Carl Barnes, qui se fonde sur la progression de la construction de la cathédrale et sur le style des scènes représentées, elles auraient peut-être clos des fenêtres hautes de l'extrémité occidentale de la nef. Il est néanmoins bien difficile de l'affirmer, d'autant que les fenêtres hautes de la nef semblent avoir été fermées par des grisailles médiévales jusqu'au début du 19e siècle. Ces verrières légendaires ornaient plus vraisemblablement les collatéraux de la nef ou le massif de façade. L'étude de Dany Sandron place l'achèvement de la construction de la nef vers 1240 (façade exceptée), époque qui correspond approximativement à la date de réalisation des vitraux.

Pendant plusieurs siècles, la documentation est muette sur la parure vitrée de l'édifice, ne mentionnant que les dégâts causés par les guerres et surtout par les protestants lors de la prise et de l'occupation de Soissons en 1567-1568.

C'est à l'occasion des grands travaux de restauration de la cathédrale menés par le chapitre à partir de 1767 que des verrières de la nef sont déposées, réduites en largeur, adaptées, puis remontées en 1772 dans la chapelle axiale, pour la distinguer des autres chapelles absidales. Sur les photographies de la verrière de la baie 2, l'adaptation se remarque, entre autres, par la présence dans quelques scènes d'un plomb vertical, qui témoigne d'une coupure dans la scène originale, puis d'un réassemblage qui peut parfois associer des éléments étrangers. Bien que certains groupes de personnages soient difficiles à interpréter, la présence de Moïse, reconnaissable aux deux "cornes" qui expriment la luminosité de son visage après sa rencontre avec Dieu, permet de rattacher la plupart des scènes à une verrière inspirée par le Livre de l'Exode et le Livre des Nombres.

Ce vitrail, comme tous ceux de la cathédrale, souffre d'un défaut d'entretien pendant la Révolution. Mais, contrairement aux autres verrières du monument, il est épargné par l'explosion de la poudrière du 13 octobre 1815. En effet, le rapport de Louis Duroché, en date du 15 décembre 1815, précise qu'il n'y a rien à faire aux trois croisées de la chapelle de la Vierge. Alors que les archives nationales et diocésaines renferment de nombreuses informations sur la restauration complète du vitrage de la cathédrale dans la seconde moitié du 19e siècle, aucun document ne se rapporte clairement aux verrières de la chapelle de la Vierge. Certes, le 15 novembre 1879, un rapport de l'architecte diocésain insiste sur l'état de dislocation des vitraux des chapelles absidales, qui fait craindre leur ruine prochaine, et, en 1880, ces verrières sont consolidées par des cloisons en planches. Néanmoins, il est fort possible que ces travaux aient concerné uniquement les verrières des chapelles Saint-Pierre et Saint-Paul, déposées en 1882 et refaites presque totalement par le peintre-verrier Félix Gaudin une décennie plus tard.

Un rapport de l"architecte en chef des Monuments historiques, Émile Brunet, daté du 12 octobre 1912, signale que les verrières de la

chapelle de la Vierge sont en mauvais état. De nombreux panneaux ont perdu leurs attaches, sont creusés et cintrés. En outre, il existe quelques trous. Brunet préconise de remettre ces verrières en plomb, de réviser les armatures et de réparer les grillages de protection. Cette proposition, approuvée, est probablement réalisée en 1913.

Les vitraux de la chapelle de la Vierge, restés en place au début de la Première Guerre mondiale, sont déposés en 1915. Au retour de la paix, le chœur de la cathédrale, moins atteint que le reste de l'édifice, est rapidement restauré et rendu au culte. Mais, contrairement aux verrières 0 et 1 qui sont réparées et reposées en 1924-1925, la verrière 2 ne peut être retrouvée. La fenêtre sud-est de la chapelle axiale reste donc obturée de longues années, jusqu'à ce que soit réalisée en 1979 une verrière légendaire, œuvre du peintre-verrier Jacques Le Chevallier. Ce vitrail, conçu à l'aide des photographies conservées de la verrière médiévale, reproduit dans un style moderne la composition et les sujets de son prédécesseur disparu et en préserve ainsi le souvenir.

  • Période(s)
    • Principale : milieu 13e siècle
  • Lieu d'exécution
    Commune : Soissons

La verrière prenait place dans une baie en forme de lancette, qui s'achève en arc brisé à sa partie supérieure. Elle était composée de dix registres superposés de panneaux. Elle était formée d'un assemblage de pièces de "verre antique" rehaussées de grisaille.

  • Catégories
    vitrail
  • Structures
    • baie libre, rectangulaire vertical, en arc brisé
  • Matériaux
    • verre transparent, soufflé, taillé, peint, grisaille sur verre
    • plomb, réseau
  • Précision dimensions

    Dimensions approximatives : h = 620 ; la = 150.

  • Précision représentations

    Bien que la verrière ait disparu, son iconographie est connue grâce aux photographies qui ont été réalisées au moment de sa dernière restauration. Les sujets, qui se rapportent principalement à l'histoire de Moïse, sont empruntés au livre de l'Exode et au livre des Nombres. En revanche, le motif des chérubins sur les roues provient probablement d'une autre verrière de la nef, où devait être représentée la vision d'Ezéchiel (d'après le passage de l'Ancien Testament réservé à ce prophète).

    En partant du bas, dans un quadrilobe inscrit dans un cercle :

    - Un homme debout fabrique le veau d'or. La scène, dont le sujet ne fait aucun doute, est constituée d'un assemblage surprenant, puisque le verrier du 18e siècle a remplacé le forgeron ou l'orfèvre (peut-être disparu) par un soldat qui tient une sorte de fourche.

    - Moïse frappe le rocher d'Horeb ou le rocher de Meriba et les Hébreux se désaltèrent à l'eau qui en sort.

    - À la partie supérieure du quadrilobe, Moïse semble entretenir une vive discussion avec des Hébreux debout ou assis autour de lui. De nombreux passages de l'Histoire de Moïse peuvent avoir inspiré une telle illustration. Il pourrait s'agir de la colère de Moïse en découvrant la fabrication du veau d'or.

    Deuxième quadrilobe :

    - Une tente devant laquelle est dressée une table couverte de pains. Deux chérubins montés sur des roues protègent ce sanctuaire. Il s'agit là probablement d'une référence à la tente qui abritait l'Arche d'alliance et à la table des pains de proposition, même si les pains, d'après les textes, devraient être disposés en deux piles, et si les chérubins, agenouillés, devraient orner le couvercle de l'Arche.

    - Moïse remet à Aaron, vêtu en grand-prêtre, le bâton fleuri qui le désigne comme choisi par Dieu pour exercer le sacerdoce, ainsi que ses descendants. Deux hommes, sans doute deux chefs de tribus, assistent à la scène.

    Compartiment en forme d'amande polylobée :

    - Moïse, qui tient les Tables de la Loi, et un homme sont assis de trois-quarts à l'entrée d'une tente et parlent (à des personnes non représentées sur la verrière). Comme il s'agit de deux tentes séparées, les deux personnages proviennent vraisemblablement de deux scènes différentes et n'entretiennent pas de rapport entre eux.

    Troisième quadrilobe :

    - En bas à droite, Aaron nu semble debout dans un cours d'eau. Moïse le lave en versant de l'eau sur lui. Il s'agit de l'investiture d'Aaron. À leur gauche, une femme debout tient un nourrisson dans les bras. Ce dernier personnage n'entretient aucun rapport avec la purification d'Aaron. Il peut s'agir d'une scène de la petite enfance de Moïse (sa mère qui le place dans une corbeille avant de le confier au Nil, ou bien la fille de Pharaon qui sauve et adopte l'enfant, etc.) ou bien d'une femme juive de l'Exode, portant son enfant.

    - En bas à gauche, Aaron en costume de grand prêtre est debout devant des hommes debout et assis. La scène représente peut-être Aaron montrant le rameau fleuri aux Hébreux.

    - La partie supérieure est composée de plusieurs éléments assemblés de manière artificielle. A gauche, un homme l'épée levée s'apprête à décapiter un autre homme. Jean Ancien y voit une évocation de la lutte d'Israël et des Amalécites. A côté d'eux, se trouve un homme debout, sans rapport avec ce combat. A droite, prennent place deux soldats portant chacun des armes.

    Enfin, dans le compartiment supérieur en forme d'amande quadrilobée, situé juste sous l'ogive :

    - À gauche, deux Hébreux soufflent dans des trompes pour annoncer le départ (départ d'Égypte ou l'un des nombreux départs du camp hébreux dans le désert).

    - À droite, Dieu remet les Tables de la Loi à Moïse.

    Le fond est composé d'un damier ornemental orné de la fleur de lys de France et du château de Castille.

  • État de conservation
    • oeuvre déposée
    • manque
  • Précision état de conservation

    La verrière, qui avait été déposée en 1915, n'a pas été retrouvée après la Première Guerre mondiale et a disparu en totalité.

  • Statut de la propriété
    propriété de l'Etat
  • Intérêt de l'œuvre
    À signaler
  • Protections
    classé au titre immeuble, 1862
  • Référence MH

La cathédrale ayant été classée par liste de 1862, les objets qui, comme les verrières médiévales, étaient incorporés à l'édifice à cette date, profitent de la même protection.

Documents d'archives

  • AD Aisne. Sous-série 4 J : 4 J 2 (copie des "Mémoires pour servir à l'histoire de Soissons et du Soissonnais" d'Antoine-Pierre Cabaret, seconde partie).

    p. 328-329.
  • AMH (Médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine). Série 81 : 81/02, carton 194. Soissons, cathédrale Saint-Gervais et Saint-Protais, restaurations diverses (1908-1922).

    rapport de l'architecte Brunet, daté du 12 octobre 1912.
  • AMH (Médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine). Série 81 : 81/02, carton 196. Soissons, cathédrale Saint-Gervais et Saint-Protais, restaurations diverses, restauration de la nef et du déambulatoire (1924-1925).

    travaux de 1924 (rapport de l'architecte Brunet, daté du 11 juin 1924), travaux de 1925 (rapport de l'architecte Brunet, daté du 30 juin 1925).
  • A. Evêché Soissons. Série L (temporel) ; Sous-série 6 L : 6 L Soissons 1815-1818 (travaux de la cathédrale, à la suite de l'explosion).

    2e chemise : détail des reconstructions et réparations urgentes à faire [...], par Louis Duroché, 15 décembre 1815.
  • BnF (Cabinet des Manuscrits) : naf 6109 (collection Guilhermy, 16). Description des localités de la France (Soissons).

    folio 257 v°.

Bibliographie

  • ANCIEN, Jean. Les vicissitudes des vitraux du style "Sainte Chapelle" de la cathédrale de Soissons. Revue archéologique de Picardie, 1982, n° 2, p. 15-21.

  • ANCIEN, Jean. Vitraux de la cathédrale de Soissons. Réédition du livre du 24 juillet 1980. Neuilly-Saint-Front : imprimerie Lévêque, 2006.

    p. 136-153.
  • BARNES, Carl F. Jr. The Location of the "Sainte-Chapelle" Stained Glass in the Cathedral of Soissons. The Art Bulletin, décembre 1971, p. 459-460.

  • GRODECKI, Louis, BRISAC, Catherine. Le vitrail gothique au XIIIe siècle. Fribourg : Office du Livre, 1984.

    p. 260.
  • GRODECKI, Louis. Les vitraux soissonnais du Louvre, du musée Marmottan et des collections américaines. La Revue des Arts, 1960, t. 10, n° 4-5, p. 163-178.

    p. 173.
  • SUIN, Auguste. Procès-verbal devant notaires, du 28 avril 1568, constatant le sac de la cathédrale par les huguenots. Bulletin de la Société archéologique, historique et scientifique de Soissons, t. 12, 1858, 5e séance, lundi 3 mai 1858, p. 66-70.

Documents figurés

  • Soissons. - Cathédrale. Maître-Autel, impr. photoméc., par Étienne Moreau-Nélaton, photographe, vers 1914. In : MOREAU-NÉLATON, Étienne. Les Églises de chez nous. Arrondissement de Soissons. Paris : H. Laurens, 1914, fig. 775.

    t. 3, fig. 775.
  • [Panneaux composant la verrière médiévale de la baie 2]. Impr. photoméc. noir et blanc, 1913. In : ANCIEN, Jean, Vitraux de la cathédrale de Soissons. Réédition du livre du 24 juillet 1980. Neuilly-Saint-Front : imprimerie Lévêque, 2006.

    planche incluse entre les p. 153 et 154.
Date(s) d'enquête : 2004; Date(s) de rédaction : 2012
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Riboulleau Christiane
Riboulleau Christiane

Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.

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Plouvier Martine
Plouvier Martine

Historienne, Martine Plouvier a été conservateur régional de l'Inventaire général de Picardie, conservateur en chef aux Archives nationales et directrice du Centre d'études et de recherches prémontrées.

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