Attestée au Moyen Âge, la ferme dépendait alors de la baronnie de Picquigny, qui relevait de l'évêque d'Amiens. Elle forme sous l'Ancien Régime une partie de la mense épiscopale, au même titre que le manoir. Comme l'indique l'atlas terrier du dernier quart du 18e siècle, la ferme et ses dépendances (section n° 271) occupaient une surface de 23 journaux et 94 verges (soit presque 20 hectares attenants). Un enclos attenant, appelé enclos de Bélettre (section n° 272), d'une superficie de trois journaux (soit un peu plus d'un hectare), produisait un revenu qui formait la dîme partagée à égalité entre l'évêque et le curé de la paroisse. La ferme était le centre d'une vaste exploitation agricole d'une surface estimée à 367 journaux et 670 verges (soit environ 211 hectares), essentiellement répartie au nord de la ferme, au lieu-dit la vallée de Bélettre.
La ferme porte la marque évidente de l'Ancien Régime, dans sa structure ainsi que dans la nature et la mise en œuvre des matériaux du logis et des bâtiments d'exploitation, même si ces derniers ont été remaniés aux siècles suivants. La cour fermée et entourée de bâtiments sur ses quatre côtés, ainsi que le colombier hexagonal en milieu de cour, apparaissent sur l'atlas terrier et sur le plan cadastral de 1832. La propriété appartient à cette époque à une demoiselle Gueilly de Rumigny, issue des marquis de Rumigny, et semble avoir conservé la même assise territoriale (état de sections des propriétés bâties et non bâties). Elle est alors formée de la cour et de ses bâtiments, entourés de jardins, de futaies, d'un verger et d'un rideau (C 175 à 183). Éléments importants dans le contexte historique et économique de la commune, les deux vastes champs qui entourent la ferme de part et d'autre de la route sont mentionnés comme chènevières (C 174 et 184). Les bâtiments ont été restaurés dans la seconde moitié du 19e siècle, un portail et une porcherie ont alors été construits dans l'angle sud-est de la cour.
L'exploitation a appartenu à la fin du 19e siècle à Benjamin Charles Dejean, propriétaire à Paris, puis en 1922 à Léon Lollieux, cultivateur à Pernois, qui la vend en 1925 à Marie Joseph Henri de Francqueville d'Abancourt, propriétaire à la Chaussée-Tirancourt, dont les descendants sont toujours propriétaires. L'écurie de fond de cour a été construite (ou reconstruite) durant l'entre-deux-guerres, tandis que l'explosion d'un missile V1 à proximité de la ferme durant l'été 1944, qui a également détruit une maison de garde-barrière, a provoqué la destruction du portail sud-est et probablement du colombier. Une grange en parpaings a été construite en fond de cour dans les années 1980 ou 1990.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France.