"Voici, près du militaire, l´un des nobles et puissants soutiens de la gloire de nos armes, le prêtre vénéré qui, dans une plus modeste sphère, rendit d´innombrables services.
Dans le caveau placé sous cette chapelle, construite en pierres de Senlis, flanquée de deux pilastres sur la face desquels sont sculptés, de chaque côté, une palme et au-dessous un flambeau renversé, fermée par une porte en fer avec ornements en fonte, éclairée par des vitraux en verre de couleurs à l´intérieur, et qu´une croix romaine, supportée par deux consoles en pierre sculptées, surmonte, repose M. VOCLIN, Jean-Baptiste, ancien curé-doyen de St-Jacques, décédé archidiacre et vicaire-général du diocèse d´Amiens, le 18 août 1838, à l´âge de 65 ans.
La charité de ce vertueux prêtre était inépuisable et sans limites. Sa mort fut un jour de deuil général pour la ville et notamment pour la paroisse St-Jacques dont il avait été curé de 1820 à 1835.
Le convoi funèbre eut lieu le 19, à quatre heures du soir ; Mgr. l´évêque s´associa aux regrets de toute la ville en présidant lui-même à cette cérémonie. Les coins du poêle étaient portés par quatre chanoines, puis par quatre curés, et M. l´abbé Devillers conduisait le deuil. Presque toute la population, la tête nue, et plusieurs, les larmes aux yeux, assistait aux obsèques de cet ecclésiastique.
M. VOCLIN méritait vraiment ces démonstrations extraordinaires de la douleur publique.
Le corps de M. VOCLIN a été embaumé par MM. Chevalier et Goze, chimistes de notre ville.
Indépendamment des connaissances en liturgie sacrée que possédait M. VOCLIN, il en avait encore de très étendues en littérature : il parlait et il écrivait les langues latine et grecque avec autant d´aisance que de pureté. Il fut appelé au sacerdoce dans les temps les plus orageux de la Révolution. Obligé de partir comme réquisitionnaire, il émigra et se fit prêtre en pays étranger. Rentré en France, il fut successivement curé de Saleux-Salouël près d´Amiens, vicaire de St-Jacques, ensuite curé de cette paroisse.
M. Yvert, rédacteur en chef de la Gazette de Picardie, a fait graver sur sa tombe le quatrain suivant :
« Il repose en son Dieu, le prêtre regretté
Que consuma trop tôt l´ardente charité,
Et qui, vivant, jamais ne reposa sur terre
Tant que sa bienfaisance y vit une misère. »
La ville, en souvenir et reconnaissance des bienfaits sans nombre de M. VOCLIN, a concédé à perpétuité le terrain sur lequel est élevé son monument pour l´érection duquel une souscription a été ouverte et promptement remplie. C´est M. Polard père, qui l´a construit sur le plan de M. Cheussey, architecte de la ville."
Promenades au cimetière de la Madeleine, Stéphane C[omte], 1847, pp. 83-85.
Chercheur du service de l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie, puis des Hauts-de-France, depuis 2002.