Note sur la construction des Cités au Chemin de Fer du Nord, 25 octobre 1920 (A. N. / C. A. M. T. ; 202 AQ 1191)

"La question du logement des agents de la Compagnie s´est posée d´une façon particulièrement pressante, avant l'Armistice, en raison des destructions systématiques opérées par les Allemands.

Afin de parer au plus pressé, on a choisi un type de maison démontable en bois permettant d´installer, aussi confortablement que possible, les agents en attendant qu´ultérieurement, ces maisons soient replacées par des constructions en pierres ou en briques.

Dans la suite et en raison du renchérissement des maisons démontables en bois, on s´est arrêté à un type de maison en briques creuses ou en bloc d´agglomérés de scories permettant également une construction assez rapide.

Enfin quand la crise des transports s´est atténuée et que les matériaux ont pu arriver plus facilement à pied d´oeuvre, on a adopté un 3eme type de maison devant donner une construction faite à titre définitif.

Ces considérations expliquent les 3 types de maisons qui se rencontrent dans les cités de la Compagnie.

Les programmes de construction ont été considérablement étendus depuis près d´un an ; les agents du chemin de fer éprouvent de plus en plus de difficulté pour se loger dans les zones libérées, les travaux annoncés pour la reconstruction n´ayant pas été effectués. Il a donc fallu que la Compagnie vienne à l´aide de son personnel en lui fournissant des habitations.

Les difficultés ; loin de s´atténuer, vont au contraire en augmentant en raison des achats continus d´immeubles par les industriels de la région du Nord qui, eux-mêmes coûte que coûte, cherchent à loger leur personnel.

Ceci explique pourquoi la Compagnie du Nord est obligée chaque jour de prévoir non seulement l´extension des cités actuelles, mais encore la construction de nouvelles agglomérations, même dans les localités qui n´ont pas eu à souffrir des évènements de guerre".

Rapport du contrôleur du travail (Lallier), 25 avril 1921 (AN / CAMT ; 202 AQ 1191)

PROJET GARE DE LONGUEAU

Construction de deux cités pour logements d´agents

Les maisons en dur construites ou à construire se rapportent aux types ci-après suivant les entreprises chargées des travaux :

1° entreprise Rolland

a) Type de 4 logements de 5 pièces

Chaque logement comprend deux ou trois pièces au rez-de-chaussée, le reste au 1er étage.

b) Type de 4 logements à 4 pièces

Distribution : 2 pièces au rez-de-chaussée, 2 au 1er étage.

c) Type de 2 logements à 4 pièces

Même caractéristiques que pour le précédent.

Ces maisons sont construites sur cave, en béton de scories avec matelas d´air dans le mur.

2° entreprise Delorme

a) Type de 2 logements à 4 pièces

Les maisons de ce type ne comportent qu´un rez-de-chaussée monté sur cave. Elles sont construites en pierre universelle (pierre à plâtre) avec matelas d´air dans le mur.

b) Type de 1 logement à 4 pièces

Même caractéristiques que le précédent.

3° entreprise Sentier

a) Type de 4 logements à 4 pièces

Chaque logement comprend 2 pièces au rez-de-chaussée et 2 pièces au 1er étage. Servitudes : grenier et cellier.

b) Type de 2 logements à 5 ou 6 pièces

Chaque logement comprend 2 ou 3 pièces au rez-de-chaussée, le reste au 1er étage. Servitudes : grenier et cellier.

4° Logements à living-room

Ce type est prévu à 1 ou 2 logements. Chaque logement ne comporte qu´un rez-de-chaussée comprenant cuisine, salle de bains, living-room (grande pièce de 3m X 6 m formant salle à manger et salon), 2 chambres. Servitudes : grenier et cellier.

Les maisons de différents types sont toutes surélevées de 35 cm au-dessus du sol. Elles comportent toutes W. C., éclairage électrique et robinet d´eau potable sur évier ainsi que cuisinière fournie par la compagnie. Dans le plafond des chambres, un orifice a été ménagé pour le passage d´une conduite de fumée. En outre, 200 m2 de terrain pour jardin sont à la disposition des occupants.

Au cours d´une visite des différents types de maisons déjà construites dans la cité faisant l´objet du plan n°3 aucun maison n´étant encore en construction dans le terrain acheté en bordure de la route nationale n°35 (plan n°4), nous avons fait les constatations suivantes :

A- Dans les maisons de type Rolland, les enduits sont bien lissés et on a fait une jointure lavable pour les murs. Nous estimons néanmoins qu´une couche supplémentaire à mi-hauteur serait nécessaire dans la cuisine. La salle à manger est dotée d´une cheminée en marbre ; dans les autres pièces, un orifice pratiqué dans le plafond permet le passage d´un tuyau de poêle.

B- Les maisons du type Delorme sont d´une construction moins soignée. Construites en pierre universelle, elles ont l´inconvénient d´être très perméables à l´eau. Il y aura lieu de prévoir un enduit silicaté pour éviter l´humidité intérieure. Les maisons du premier lot laissent beaucoup à désirer, il n´existe que peu ou pas d´enduits sur les parois des chambres, dans la plupart la pierre est à nu. Il est nécessaire de prévoir un enduit sur les murs des chambres et de la peinture lavable sur toutes les autres parois. Dans la dernière série construite, les enduits ont été faits, mais l´application d´une peinture lavable est indispensable.

Il nous paraît désirable qu´il soit tenu compte des remarques ci-dessus dans les constructions restant à effectuer. 102 maisons en dur sont terminées (50 en pierre universelle et 50 en béton de scories).

Les maisons du type Sentier et du type Living-Room ne sont pas encore construites. Ces dernières paraissent devoir être de beaucoup les plus confortables, malheureusement, il n´est prévu que quelques maisons de ce type.

Nous ne dirons qu´un mot des maisons en bois actuellement existantes (108, presque toutes habitées) : trop soumises aux variations de température, elles sont peu confortables. Il est à souhaiter que leur remplacement par des maisons en dur soit réalisé dans un délai aussi court que possible.

Nous pensons qu´il y aurait lieu de prévoir à l´usage des habitants de ces cités un établissement de bains-douches. Cela nous paraît d´autant plus nécessaire que le voisinage du chemin de fer et particulièrement du dépôt des machines entraîne la projection de poussières de charbon dans ces parages».

Rapport sur la construction des deux cités de Longueau. Lettre de l'ingénieur en chef de l´Exploitation au directeur du contrôle du Travail, 1921 (AN / CAMT ; 202 AQ 1191).

"[...] pour les maisons du type Rolland, 3 couches de peinture ont été prévues dans les cuisines. [...] Nous obtiendrons ainsi un enduit lavable.

Les maisons de type Delorme en « pierre universelle » (type approuvé par le ministère des Travaux publics 8-2-1921) ont été commandées en mars 1920 à une époque où les matériaux de construction étaient difficilement transportables et d´un prix très élevé.

Ce type de bâtiment, d´une exécution très rapide et dont le prix de revient était inférieur à celui des autres constructions, a été abandonné depuis que la baisse des matériaux nous permet d´obtenir des maisons plus confortables tout en restant dans la limite des crédits accordés.

L´enduit extérieur au silicate, destiné à empêcher l´humidité des murs, a été prévu, et doit être exécuté prochainement. Il a été différé jusqu´alors car nous attendions que les parois soient bien sèches.

A l´intérieur de ces logements, l´enduit au plâtre n´a pas été prévu, en raison de la nature même de la pierre universelle qui est, en effet, un aggloméré de plâtre et qui, rejointoyé avec soin est d´un bel aspect.

Toutefois les murs et le plafond des cuisines seront peints à l´huile ainsi que nous le faisons dans tous les autres logements, et du papier de tenture sera posé dans l´une des chambres.

Le chiffre de 200 m2 indiqué dans le rapport comme surface de jardin mis à la disposition des agents n´est qu´approximatif. Cette surface est en réalité de 380 à 400 m2. Ces jardins sont obtenus, soit autour des habitations comme dans la première cité, soit à proximité des constructions dans le cas de la cité des Hortillons.

En ce qui concerne les maisons provisoires en bois, elles sont à double paroi et le personnel ne s´en plaint pas ; toutefois, nous ne les avons employées que lorsque nous n´avons pu établir des maisons en dur.

La construction d´un bâtiment pour bains-douches sera réalisée à Longueau comme elle l´est dans les autres grandes cités".

Maisons types des cités jardins de Longueau présentées dans l'album Les Cités jardins de la Compagnie des Chemins de fer du Nord (C. A. M. T. ; 48 AQ 3301/2).

-Maisons provisoires en bois (type à 3 pièces)

-Maisons provisoires en bois (type à 4 pièces)

-Type Delorme-Cahen (2 logements de 4 pièces). 47 maisons construites à Longueau (commandes du 27 mars 1920 et du 29 novembre 1920).

-Type Rolland (2 logements de 4 pièces). 14 maisons construites à Longueau (commande du 15 mai 1920).

-Type Rolland (4 logements de 4 pièces). 9 maisons construites à Longueau (commande du 15 mai 1920).

-Type Rolland (4 logements de 5 pièces). Longueau 2

-Type D. N. Rolland frères (3 logements de 4 pièces). Longueau 4

-Type D. N. Rolland frères (4 logements de 4 pièces). Longueau 5

-Type D. N. Rolland frères (1 logement de 5 pièces). Longueau 6

-Type D. N. Rolland frères (1 logement de 6 pièces). Longueau 2.

"En venant de Paris les voyageurs aperçoivent du train, à droite, sur une colline bordant la ligne de nombreuses petites maisons d´habitation de types variés, ce sont celles de la « Cité du Plateau » ou Grande Cité de Longueau.

Cette cité est la première construite par la Compagnie du Nord ; au début pour avoir la possibilité de disposer immédiatement de logements, les maisons étaient construites en bois. Ces maisons en bois continuent à être bien entretenues et utilisées ; mais sont remplacées au fur et à mesure par des maisons « en dur ».

Les maisons provisoires en bois comprennent 72 maisons à 3 pièces et 122 à 4 pièces.

Nous ne nous occuperons que des « maisons en dur » plus susceptibles d´intéresser les architectes. Ces 97 maisons forment 208 logements se répartissant ainsi :

179 logements à 4 pièces ;

21 logements à 5 pièces ;

5 logements à 6 pièces ;

1 logement du Chef de district ;

2 logements à 4 pièces du type maison de garde.

La Grande Cité de Longueau a naturellement avec les jardins de chaque famille, des voies larges et bien entretenues, des places judicieusement réparties d´une certaine étendue ; elle occupe, en effet, à elle seule 28 hectares 85 ares de superficie.

Les Cités du Château Tourtier et de la Canardière étant à proximité, c´est à la Grande Cité que sont installés les bâtiments à usage commun. Il existe ainsi un bâtiment pour les bains-douches, un autre pour le centre d´hygiène maternelle et infantile, une école à deux classes pour les filles et les garçons, un bâtiment affecté au cours ménager et enfin une salle de fêtes et de réunions. Un terrain de sport a été, en outre, aménagé à « la Grande Cité ».

Les dépenses d´établissement des ces trois cités de Longueau, en y comprenant les maisons provisoires en bois, ont atteint approximativement la somme de 15 millions.

Nous donnerons quelques types de maisons en dur qui sont bien différentes de celles que nous avons publiées pour les Cités précédentes. Nous en présentons deux dans cet article, qui montrent, en outre, entre elles une composition dissemblable, au caractère très particulier.

Maison de type flamand à deux logements de cinq pièces. Cette maison avec toiture à deux versants est d´un type très accusé par ses deux pignons à gradins recouverts de dalles en ciment qui en marquent nettement le caractère flamand. Les lucarnes, les hautes souches hors-combles couronnées de manière très curieuses accentuent encore le genre pittoresque de type aux croisées garnies de petites vitres. Le porche d´entrée de chaque logement avec baie à plein cintre s´ouvre à chaque extrémité, la maison s´élevant entre deux voies qui se rejoignent en carrefour et limitent un joli jardin situé en angle, en extrémité du terrain. Les appuis, les linteaux sont en ciment lissé, les façades recouvertes d´un enduit ; aux façades des pignons l´appareil en briques de l´arc de la baie d´entrée est utilisé pour donner plus de cachet, cet appareil en brique tranche sur l´enduit figurant une clef de voussoir. Les volets très coquets et en deux tons donnent avec les rives des lucarnes la note vive, éclatante qui apporte la gaîté à ce joli pavillon avec des frises peintes à l´huile.

Comme dans tous les types adoptés par la Compagnie les waters sont placés à l´extérieur et sous le porche, ils sont toujours au rez-de-chaussée des maisons et non dans les jardins comme dans de nombreuses habitations à la campagne.

Maisons à deux logements de quatre pièces [Type Rolland]. L´autre type publié dans ce numéro est aussi d´un effet très agréable. L´entrée de chaque logement est à la même extrémité du pavillon et face à la voie publique. Les deux plans jumelés des logements ont permis ainsi de placer les waters l´un contre l´autre et de disposer une sorte de grand auvent protégeant bien aussi le palier du perron et des waters. Cette disposition très simple est appréciée par les occupants, partout des plantes grimpantes égaient ces auvents, nous avons du choisir pour notre planche la seule maison qui en était dépourvue. Les soubassements et les murs du rez-de-chaussée sont en parpaings (agglomérés) enduits respectivement en gris et en blanc. Un bandeau, très légèrement en saillie, qui laisse supposer le plancher en ciment armé servant aussi de chaînage simule des bossages rustiques qui contrastent avec les façades. A l´étage celles-ci sont à pans de bois factices avec remplissage formant des panneaux en enduit tyrolien aux encadrements étroits et lissés. Pour chaque maison les pans de bois sont peints dans un ton très franc se distinguant de ceux des maisons voisines ; Les volets sont de tons harmonisés avec ces pans de bois et l´ensemble de toutes ces habitations est d´un effet très gai, pimpant, nullement criard, car tout a été étudié pour la coloration d´une manière aussi habile et quelque peu semblable à celle employée pour les volets, manière dont nous avons entretenu nos lecteurs dans le numéro 7 du 14 novembre dernier de la C. M.

Les côtés extérieurs de l´auvent protégeant le palier d´entrée sont complétés par des frises à rainures et à languettes qui assurent une meilleure protection contre les rayons du soleil et surtout contre la pluie.

GOISSAUD, Antony. « L´oeuvre de la Compagnie du Nord. Une cité-jardin à Longueau ». La construction Moderne, n° 11, 12 décembre 1926, p. 120-124

Maison d´habitation de quatre logements de cinq pièces [Type Rolland]

"Cette maison est du même type de composition que celle à deux logements de quatre pièces [...] mais comporte quatre logements de cinq pièces chacun (la cuisine comptant toujours dans notre description des habitations réalisées par la Compagnie du Nord pour une pièce). Comme pour la première, les soubassements et les murs du rez-de-chaussée sont en parpaings (agglomérés) enduits respectivement en gris et en blanc. Au dessus du rez-de-chaussée un bandeau en légère saillie marque le plancher en ciment armé formant aussi chaînage, ce bandeau à bossages rustiques contraste quelque peu et comme il convient avec les parements, formant aussi linteaux des fenêtres ; les appuis de celles-ci sont naturellement aussi en ciment. A l´étage les façades sont en pans de bois factices avec remplissages couverts en enduit tyrolien formant autant de panneaux aux encadrements étroits et lissés. Pour chacune de ces maisons les pans de bois sont peints en couleur franche se distinguant de celles employées pour les maisons voisines, les volets sont peints en tons harmonisés avec ceux des pans de bois [...].

Les autres Cités de cette Compagnie, plus importantes mais aussi de créations plus récentes, ne sont pas moins intéressantes que les trois cités de Longueau dont nous avons pu donner quelques détails. Ces autres cités étant plus importantes possèdent par cela même des bâtiments à usage commun de plus vastes proportions et véritablement dignes de grandes cités, leur architecture accuse aussi un caractère plus régional que celle des cités de Longueau".

GOISSAUD, Antony. « L´ouvre de la Compagnie du Nord. Une cité jardin à Longueau ». La construction Moderne, n° 18, 30 janvier 1927, p. 205-210.

C. A. M. T. Série 202 AQ ; 202 AQ 1189. Cités jardins. Procès-verbaux du comite de gestion des cités (1920-1929) [photos]

Extraits de la présentation du projet de cités jardins de la compagnie des Chemins de fer du Nord par M. Dautry.

M. Dautry rappelle que la construction des cités jardins s’inscrit dans le contexte de la reconstruction du réseau ; elle doit permettre de résoudre la crise du logement et "montrer que le taudis est la grande cause des tares physiques et des haines sociales". Pour ses employés, la compagnie a besoin de maisons de plus de 2 pièces que ne peut fournir le ministère des Régions libérées. Elle obtient l’autorisation de présenter son propre projet de construction de maisons provisoires à condition "de ne s’éloigner ni comme type de maison, ni comme dépense de ce que préparait le ministère des Régions libérées".

En 1919, elle est autorisée à construire 2000 maisons de bois démontables, réalisées entre mai et novembre. Le parc comprend 6000 maisons de bois et 6000 maisons en dur, construites entre 1919 et 1923.

Chaque logement dispose d’un terrain de 450 à 500 m2, dont la clôture est formée de simples fils de fer tendus sur des piquets.

R. Dautry insiste sur la variété des habitations "c’est par la variété et la couleur que nous avons atténué nos imperfections. Pas de maisons uniformes et alignées, pas de maisons peintes de couleurs ternes et tristes. Le résultat est que, même lorsque nous avons fait des cités de 3 ou 400 maisons en bois, toutes du même type, nous avons obtenu des agglomérations d’aspect plus agréable. Puis à partir de 1920, nous avons pu nous procurer les matériaux et les ouvriers de tous corps d’état que nécessite ma construction de maisons en dur, nous avons abandonné le bois et nous y avons gagné plus de variété dans les types, les silhouettes et les détails".

Le prix de revient de ces maisons est de 26000 F environ et de 32000 F dans les grandes cités où les installations communes sont nombreuses. Les cités sont équipées du tout à l’égout et d’un éclairage électrique ; la distribution du gaz est alors à l’étude.

Plan et type de maisons

"Notre type de maison est, en général, à 4 pièces, la salle commune et 3 chambres, 1 pour les parents, 1 pour les garçons, 1 pour les filles. Chaque maison possède une cave ou cellier et un porche. Ce porche est un Maître-Jacques qui joue de nombreux rôles. Il est utilisé pour le nettoyage des vêtements et des chaussures, l’été, les femmes y cousent l’après-midi, les bébés y dorment dans leur voiture, l’homme y lit son journal en rentrant du travail, la famille entière y passe la soirée.

Une maison sur 20 comprend 5 pièces pour les familles nombreuses et une maison sur 20 en comprend 6 pour les familles très nombreuses, soit au total 1/10e des maisons à plus de 4 pièces".

Matériaux

"Nous avons construit nos maisons en transportant le moins possible de matériaux et nous avons utilisé les agglomérés de scories dont nous sommes producteurs. Nos agglomérés ont une double paroi avec un vide au milieu. Ces matériaux ont été recouverts d’un enduit de ciment, puis d’un crépi blanc".

Plantations-jardins

"Il ne nous a pas paru suffisant de faire des cités saines, nous avons voulu faire qu’elles fussent des oasis au milieu des ruines, éloignant le cheminot, sa femme, ses enfants, des plaisirs vulgaires et favorisant un des deux plus nobles plaisirs des sens : celui de la vue. Nous avons eu recours à la nature pour exalter la joie des yeux. L’enfant du cheminot qui vit près de champs désolés trouve autour de sa maison un jardin riant pour l’accueillir. Nous y avons planté des arbres fruitiers, deux rosiers, et nous facilitons la vente à bas prix des graines de fleurs.

Nous avons également planté beaucoup d’arbres publics dans nos cités : tilleuls, acacias, marronniers dans les avenues ; sur les places, des parterres et des corbeilles de fleurs aux couleurs vives.Nous voulons que les enfants connaissent la joie de cueillir eux-mêmes, sur l’arbre, la pomme de leur goûter et que les jeunes filles puissent fleurir leur corsage".

Foyers des agents de trains et des mécaniciens

Ces foyers remplacent les dortoirs et cuisines-réfectoires aménagés dans les gares et les dépôts. "L’ouvrier qui arrive de son travail, fatigué et sale, trouve en pénétrant dans le "Foyer", des lavabos, des douches et des bains, avec eau chaude et eau froide. Après avoir déposé ses vêtements de travail dans un séchoir et revêtu des vêtements propres, il se rend à la cuisine, puis à la salle à manger et enfin à la bibliothèque-fumoir.

Il passe enfin à l'hôtel, et là, au lieu de grandes chambres contenant 6 lits, chaque équipe de 2 hommes (mécanicien et chauffeur) trouve une série de petites pièces à deux lits".

Terrains de jeux

"Cultiver l’esprit ne suffit pas et la Compagnie s’est préoccupée de contribuer au développement de la santé physique et de la santé morale de la jeunesse en mettant à sa disposition des terrains de jeux propres à la culture physique. Admirateurs de l’enseignement du commandant Hébert, nous visons bien plus à faire de beaux athlètes des enfants de nos cheminots qu’à en faire des champions sportifs.

[...]

Dans certains cités, les jeunes filles et les jeunes enfants disposent, à proximité de leurs demeures, de terrains de jeux plus spécialement établis pour eux, encadrés de pelouses et de parterres fleuris pourvus de tennis et de sable en abondance pour les tout petits".

En conclusion, M. Dautry insiste sur les vertus salvatrices des cités jardins de la compagnie : "la sclérose ne durcira pas ces artères tant que les 12 000 agents et les 60 000 personnes qui vivent dans nos cités, qui y jouissent du calme et de la joie d’une vie largement rurale, ne connaîtront pas l’estaminet. Or ce dernier ne peut s’établir qu’en marge de nos cités. Il n’offre ni le confort ni la gaîté que l’agent trouve chez lui ; nous l’avons vaincu. La défaite de l’estaminet est plus que l’espérance d’une vie heureuse, c’est l’avènement".

M. DAUTRY. "Les cités-jardins du Chemin de fer du Nord". Communication faite à la société de médecine publique et de génie sanitaire. Séance du 22 mars 1923. Revue d’hygiène, Paris : Masson & Cie éditeurs. (C. A. M. T. 202 AQ 1189)

BRUNEL, E. "Le problème du logement et les solutions de la Compagnie des Chemins de fer du Nord". Revue internationale de l’industrie, du commerce et de l’agriculture, 20 juin, 1923, p. 10-13 [photos]

L’article d’E. Brunel indique que la compagnie des Chemins de fer du Nord a réalisé un immense programme de reconstructions provisoires, puis définitives, comprenant près de 5000 logements en bois et plus de 6000 logements en matériaux durs, répartis dans 26 agglomérations et abritant une population d’environ 60 000 personnes. Ce programme a été présenté à l’Exposition de l’Habitation familiale de Lille. L’œuvre accomplie présente une remarquable unité de conception d’ensemble, tout en conservant une infinie variété quant aux détails. "Ce qui la caractérise essentiellement, c’est le souci de la vie familiale dans un milieu sain, clair, riant et confortable". Les cités construites ont été dotées de toutes les installations indispensables à ces collectivités : écoles, services sanitaires, salles de consultations, pharmacie, bureaux de poste, boutiques pour certains commerces (coiffeur, librairie, bureau de tabac).

A cela il convient d’ajouter d’autres installations d’ordre récréatif, comme le stade sportif et la salle de cinéma, cette dernière servant à la fois de salle de réunion, de conférence et de spectacle. Ces ensembles n’ont "rien de semblable aux corons et aux casernes, dont les lignes géométriques et uniformes engendrent un sentiment de nostalgie et de tristesse". Trois cents types de maisons ont été étudiés et répartis de telle manière qu’il ne s’en trouve jamais plus de huit semblables dans chaque cité. Diffèrent par leur orientation et par la couleur des peintures qui les décorent. "Cela fait que l’œil est toujours attiré par un aspect imprévu, et ce mouvement du regard suscite l’animation de l’esprit, l’intérêt, la gaîté.

Les cités ont des voies larges et régulières avec des places dessinées de façon charmante. Les pièces des maisons ont un cubage plus que suffisant avec abondance d’aération et de lumière.

Chaque maison est entourée d’un jardin pour chaque famille qui s‘y livre à la culture potagère et y trouve des plantes grimpantes et des arbres fruitiers plantés par la compagnie. "Il s’agissait de bâtir une maison d’aspect agréable et surtout d’un prix bon marché, offrant

Les matériaux employés ont été de toutes sortes : bois, briques, moellons artificiels, etc.".

Rapport sur les cités (1930-1935). C. A. M. T. Série 48 AQ ; 48 AQ 3301/1.

Directive relative aux constructions de cités ouvrières adressée par par A. Prothin, directeur de l'Urbanisme, aux inspecteurs généraux de l'Urbanisme, 10 avril 1945 (AD 80 ; 15J 96).

"L'attachement persistant de nombreuses sociétés industrielles et même de certains services publics à la forme d'habitation des "cités ouvrières", engage A. Prothin à préciser la position du MRU.

"Tous les observateurs s'accordent à constater que de telles "cités" sont la négation même de la vie sociale et qu'elles ne peuvent engendrer que des conséquences néfastes. Alors que la valeur civilisatrice d'une agglomération réside dans sa complexité, c'est-à-dire dans la possibilité de contacts et d'enrichissements mutuels qu'elle ménage aux éléments humains les plus différents, les "cités ouvrières" sont au contraire des facteurs de cloisonnement et d'appauvrissement.

Groupements de classe, où sont généralement parqués les salariés d'une même usine, elles les isolent du reste de la cité en les enfermant dans leur milieu de travail. Cette séparation et cette dépendance se traduisent sur le terrain par l'aspect des habitations et le voisinage obsédant des bâtiments industriels. Un logement ouvrier équivaut à un uniforme et la "cité ouvrière" à une caserne.

Cette solution à la fois primitive et artificielle doit donc être dépassée. Elle est incompatible avec la civilisation que prétend exprimer l'urbanisme. Sauf dans quelques localités minières, elle peut être évitée partout. J'insiste donc auprès de vous de la façon la plus formelle pour que les projets d'aménagement mis à l'étude dans vos circonscriptions prescrivent sans réserve tout zonage "social".

D'une manière générale, vous devez vous opposer à tout développement de groupes d'habitations ou de lotissements affectés à une catégorie professionnelle déterminée".

La directive préconise de favoriser les HLM locales "intégrant des salariés industriels dans un complexe social et l'extension harmonieuse d'agglomérations déjà organisées", solution la plus économique qui ne nécessite pas de voirie ni d'adduction d'eau et d'électricité, etc.

Quand la proportion des employés est trop importante il faut les disséminer dans plusieurs localités environnantes permettant l'accroissement des communes rurales ce qui implique de développer les transports en commun.

[...] en adoptant cette ligne de conduite, vous ne ferez pas seulement oeuvre d'urbanisme au sens véritable du terme, mais vous concourrez encore, de la manière la plus efficace, à l'unification sociale de la France".

Note pour M. Guillaume sur la reconstruction des cités

1 Plan d'ensemble des cités

Ils sont considérés, et dans certains cas profondément modifiés dans le but :

1 - d'éliminer la voirie surabondante

2 - d'obtenir une meilleure exposition des logements par rapport au soleil et aux vents dominants

3 - de lier d'avantage, quand c'est possible, nos cités aux agglomérations urbaines

4 - de créer des perspectives et effets architecturaux plus satisfaisants.

Il n'y a rien à dire sur ce programme très judicieux dans son principe.

Je relève toutefois un cas particulier qui m'a été présenté (je n'ai pas encore tous les projets) : celui de Tergnier.

Rapport sur la reconstruction de la cité de Longueau [vers 1946]

Le rapport non signé et non daté indique que la gare de triage de Longueau est l'une des trois plus importantes du réseau. Longueau, ville cheminote de 3000 habitants comprend 654 logements répartis dans trois cités : la grande cité (463 logements - 2200 habitants en 1939), celle du Château comprend (65 logements - 250 habitants), celle du Matériel roulant [cité du Cimetière].

La Grande cité, commencée en 1920, est un simple quadrillage de rues déterminant des îlots rectangulaires, "ville de colonisation", elle est structurée par une grande voie diagonale coupant le quadrillage et deux places en rond-point, "motif urbanistique, cher à l'époque". La place centrale en ovale, plantée d'arbres est une sorte de hernie.

La monotonie résulte de la surabondance des voies, il conviendrait d'opérer un desserrement pour une meilleure utilisation des jardins (passer de 5000 m2 pour 10 logements, 10000 m2 pour 17 logements).

En 1930, l'adjonction de baraques en bois "réputées provisoires", a produit "un vrai village nègre" mais "c'est une injure aux villages nègres qui ont plus de logique et plus d'allure".

Le centre sportif et les services publics sont bien organisés.

Les bombardements de 1944 ont causé de nombreux dommages :

• 234 maisons détruits
• 200 maisons atteintes mais réparables
• 220 maisons intactes

Cependant, la voirie subsistant "il n'était donc pas possible d'intervenir profondément dans le plan général et de corriger la monotonie du tracé".

Il a donc été décidé

• de reconstruire le même nombre de logements.
• de supprimer toutes les voies rendues inutiles par la nouvelle implantation des maisons
• d'accentuer quelques directions générales (liaison ville-gare)
• de coudre le plus possible la cité à la ville
• de mieux orienter les maisons nouvelles
• de supprimer les places hernie ou en rond-point pour d'autres mieux situées et mieux conformées
• de faire de ces places de véritables centres avec services publics autour
• de réaliser ensemble sportif plus complet, mieux disposé et mieux équipé
• d'éviter le double-emploi avec les institutions municipales, faire en sorte que la cité ne soit pas une ville dans la ville mais un de ses quartiers, "problème difficile qu'il n'a pas été possible de résoudre complètement en raison des éléments subsistant et des difficultés budgétaires"
• de remplacer les baraquements de bois par des dispositions définitives
• enfin de prévoir une extension permettant de doubler la cité primitive

La cité primitive était un mélange de maisons à deux et à quatre unités d'habitations, il est proposer de les remplacer par des maisons à deux unités d'habitation, dans certaines rues : côté nord en R+1 orientée au sud, côté sud maison unifamiliale en RDC, pour l'ensoleillement des maisons de la rive nord.

Des bandes d'habitation proposées, seule une bande de 7 a été réalisée.

Les logements en bande sont mal perçues par l'administration et les cheminots qui les assimilent à des "corons", "ils ont finalement reconnu que ce qu'ils avaient sous les yeux n'avait aucun rapport avec ce que le mot "coron" évoquait dans leur esprit".

7 bandes de 4 logements dispersés ont été construites, on a obtenu de cette façon une certaine variété, sur la place (angle NE) sont prévus dispensaire et bibliothèque, plus une salle des fêtes prévue.

La densité de population doit ainsi passer de 80 à 68 habitant/hectare

"Dans l'ensemble, abandon du style pseudo-régional. Plus de maisons réputées flamandes. Pas d'avantage de maisons en agglomérés enduits avec de faux pans de bois "genre alsacien"", de saines maisons de briques ordinaires, et même très ordinaires, mais mises en oeuvre avec goût. Des joints de mortier clair entourant et dégageant la brique rugueuse, donnent des surfaces vivantes". couverture en pannes flamandes, sauf pour les annexes, couvertes en tuiles plates en raison des arétiers.