Dossier collectif IA80001309 | Réalisé par
Justome Elisabeth
Justome Elisabeth

Chercheur à l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie de 2002 à 2006, en charge du recensement du patrimoine balnéaire de la côte picarde.

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  • patrimoine de la villégiature, La Côte picarde
Les maisons et les immeubles de l'agglomération balnéaire de Cayeux-sur-Mer
Copyright
  • (c) Ministère de la culture - Inventaire général
  • (c) Département de la Somme
  • (c) SMACOPI
  • (c) AGIR-Pic

Dossier non géolocalisé

  • Dénominations
    maison, immeuble
  • Aires d'études
    Trois Vallées
  • Adresse
    • Commune : Cayeux-sur-Mer

1) INTRODUCTION

Le recensement des maisons et des immeubles de la commune de Cayeux-sur-Mer a été effectué entre 2003 et 2005. Les limites géographiques de l'étude ont été définies au regard de la fonction historique de chaque quartier, et le mode de recensement varie selon ces données. Il a été réalisé de façon quasi exhaustive dans les quartiers à forte vocation de villégiature, à savoir le quartier balnéaire et Brighton. Le recensement a été plus extensif dans les quartiers plus anciens, où la villégiature a pu se développer, mais de façon plus diffuse, et où l´habitat local était déjà majoritaire : nous parlons ici du quartier du Bout-d´Amont, du Quartier du Bous-d´Aval, du quartier de la Vieille Eglise et du quartier de la Gare.

Les dates limites du recensement sont définies par la logique de la thématique : la date ante quem est celle des premières constructions liées à la villégiature, à savoir vers 1860, et la date post quem est motivée par la Seconde Guerre mondiale, critère chronologique pour l'aire d'étude de la Côte picarde.

Afin de garder la logique historique des constructions, le recensement ne s'est pas appuyé sur les limites parcellaires actuelles du bâti, mais sur la morphologie apparente des maisons, celles-ci regroupant parfois plusieurs logements accolés sous un même toit.

Certains édifices détruits ont été recensés, en raison de la documentation existante. Les édifices tardifs ou fortement remaniés en façade n'ont pas été pris en compte afin de ne pas fausser les statistiques.

Le choix d'agréger les maisons et les immeubles au sein d'une même famille a été motivé par le fait que certaines maisons présentent plusieurs logements au sein d'un même édifice (accolés ou superposés) : le partage de l'habitat dans un but locatif trouve alors deux réponses, la maison à plusieurs logements ou l'immeubles à logements. Le but est donc de différencier ces deux types, au delà de la volumétrie générale (distribution, morphologie).

Les maisons et les immeubles étant visibles depuis la rue, le recensement a été facilité, de même que pour apprécier le détail des décors. Les visites intérieures des maisons ont été assez rares, en l´absence d´autorisation, et le travail de terrain ayant été effectué à des périodes où les propriétaires étaient absents.

Dans le cadre du recensement, 127 maisons et immeubles sont l'objet d'une notice, répartis en 4 immeubles et 123 maisons. Le nombre d'édifices recensés par quartier ou écart est variable : 20 à Brighton et 107 dans le reste de l´agglomération. Parmi ceux-ci, 15 ont été sélectionnés selon plusieurs critères :

- chaque maître d'oeuvre rencontré est illustré (dans la mesure où l'édifice est bien conservé)

- chaque période est illustrée

- chaque famille d'édifice est illustrée

- édifice de type unicum, avec décor, ou style, ou position sur le site exceptionnel.

2) CHRONOLOGIE ET ATTRIBUTION DU CORPUS

2-a) Chronologie

Un des premiers éléments utile à la datation du corpus reste les dates portées directement sur l'édifice (3 maisons, soit 2% du corpus). Il est à noter qu´aucun immeuble ne présente de date portée :

- Dominiquette : Général-Leclerc (rue du) 029, (1988 AA 46), 1897

- Eugénie, Marie : Brighton, Parmentier (avenue) 119, 129, (1988 AD 40, 41), 1905

- Villa Cécile : Carnot (avenue) 77, (1988 BB 63), 1908

La recherche en archives n'a pas été fructueuse pour dater les maisons et les immeubles : aucun plan daté n'a été trouvé.

Une maison a été datée par tradition orale :

- maison : Carnot (avenue) 87, (1988 BB 78), 1939

Les 123 autres maisons et immeubles (soit 97%) ont été datés par travaux historiques, en quart de siècle, grâce au repérage sur le terrain, aux sources bibliographiques et aux dépouillements des matrices cadastrales. Ces dernières ont permis de connaître la date de construction de l´édifice avec une incertitude de trois années, période de latence maximale entre la construction et la première date d'imposition (dans la notice cette information apparaît dans la rubrique des 'données complémentaires' et non dans la champs 'date' qui doit renvoyer à une date certaine). La connaissance de l'histoire urbaine, notamment de la date de création des lotissements, assure une date post quem de base.

Répartition des datations en quart de siècle (compris les édifices avec dates portées) :

- 4e quart 19e siècle : 18 (14%)

Brighton : 4

Station de Cayeux : 14

- 1er quart 20e siècle : 75 (59%), répartis en 1 immeubles et 74 maisons.

Brighton : 11

Station de Cayeux : 64

- limite 19e siècle 20e siècle : 16 (13%)

Brighton : 4

Station de Cayeux : 12

- 2e quart 20e siècle : 10 (8%), uniquement des maisons.

Uniquement dans la station de Cayeux.

- 1ere moitié 20e siècle : 1 (0,78 %),

A Brighton

- 3e quart 20e siècle : 7 (5,5 %), répartis en 3 immeubles et 1 maison.

Uniquement dans la station de Cayeux.

Près de 86 % (109 édifices) du recensement concerne des édifices construits entre 1875-1925, avec une majorité de constructions entre 1900 et 1925.

2-b) Attributions

Comme pour la datation, une des premières façons d'attribuer un corpus est de vérifier les signatures portées sur les édifices. L'habitat de villégiature, surtout quand il est visible depuis la rue, est un support très recherché par les maîtres d'oeuvre, l'ensemble des maisons construites faisant office de catalogue in situ.

Au sein du corpus, 32 maisons et immeubles ont pu être attribués (25%). Parmi ceux-ci, 27 édifices portent la signature du maître d'oeuvre, dont 1 avec la signature d'un céramiste. Ce sont au total 11 auteurs différents qui ont signé leur oeuvre, généralement sur des carreaux de céramique [fig. 12]. La signature de l´architecte Zéphir Oget, singulière, est portée sur un carré de terre cuite de forme carrée [fig. 13].

Attribution par signature : classement par nom de maître d'oeuvre ou d'artiste, par écart ou quartier, puis par ordre alphabétique des rues :

Bocquet Frères, entrepreneur

CAYEUX

- Villa Charles : Adolphe-Roux (rue) 15, (1988 AZ 90)

- La Jeannette : Paul-Doumer (avenue) 64, (1988 BB 89)

Delafont Achille, architecte

BRIGHTON

- Les Pins : Bapaume (rue de), (1988 AD 26) en collaboration avec Dupont Ernest, entrepreneur

Didot Henri, architecte

CAYEUX

- La Blanchette : Général-Leclerc (rue du) 16, (1988 BE 327)

Dupont Ernest, entrepreneur

BRIGHTON

- Les Pins : Bapaume (rue de), (1988 AD 26) en collaboration avec Delafont Achille, architecte

- Eugénie, Marie : Parmentier (avenue) 119, 129, (1988 AD 40, 41)

- Martine : Victor-Hugo (avenue) 40, (1988 AD 99)

CAYEUX

- Villa Alfred, Maréchal-Foch (rue du) 179, 181, (1988 AZ 130, 131)

- Maison, Maréchal-Foch (avenue du) 187, (1988 AZ 125)

- Maison : Paul-Doumer (avenue) 16, 18, (1988 BA 41)

- Maison : Paul-Doumer (avenue) 32, 34, (1988 BA 52, 53)

Käppler Léon et fils, architectes

CAYEUX

- Les Vagues : Général-Sizaire (boulevard du) 1202, (1988 BE 375, 376)

Leborgne Joseph, entrepreneur

CAYEUX

- Maison : Carnot (avenue) 73, (1988 BB 44)

- Maison : Carnot (avenue) 81, 83, (1988 BB 68, 69)

- Maison : Carnot (avenue) 87, (1988 BB 78)

- Maison : Général-Sizaire (boulevard du) 634, (1988 BE 390, 394)

Léon Alphonse, entrepreneur

CAYEUX

- Les Roses : Maréchal-Foch (rue du) 100, (1988 AT 74)

Lhomme-Lefèvre, céramiste

CAYEUX

- La Fernette, Le Touring : Carnot (avenue) 05, 07, (1988 BA 7, 8)

Louvel-Vatel, entrepreneur de maçonnerie

CAYEUX

- Maison : Carnot (avenue) 36, 38, (1988 BB 241, 242)

- Le Retour, La Coquille : Hirondelles (rue des) 05, 07, (1988 BE 350, 351)

- A l'Automne : Maréchal-Foch (rue du) 147, (1988 AY 117)

Mouchot, L., architecte

CAYEUX

- L'Acacia : Général-Leclerc (rue du) 42, (1988 BE 36)

Oget Zéphir, architecte

BRIGHTON

- Les Charmettes : Lesseps (rue) 27, (1988 AD 96)

CAYEUX

- Maison : Carnot (avenue) 13, (1988 BA 11)

- Villa Léonie : Carnot (avenue) 48, (1988 BB 217)

- Les Mouettes, Les Tilleuls, Maryvonne : Carnot (avenue) 57, 59, (1988 BB 34, 35)

- Alice-Marthe : Paul-Doumer (avenue) 48, (1988 BB 52)

- Sans Atout : Paul-Doumer (avenue) 51, (1988 BB 59)

Par ailleurs, 6 édifices ont été attribués par sources (plans ou documents d'archives, plans publiés dans des recueils ou revues d'architecture, matrices cadastrales), dont 1 confirmé par une signature : ce sont au total 5 maîtres d'oeuvre dont on a ainsi pu attribuer les réalisations.

Classement par nom d'auteur puis par écart ou quartier et par ordre alphabétique de rue :

Cochard Arthur, architecte

CAYEUX

- L'Horizon : Général-Sizaire (boulevard du) 68, (1988 AZ 21)

Didot Henri, architecte

CAYEUX

- Les Cigales : Maréchal-Joffre (rue du) 04, (1988 BC 3)

Douillet Edmond, architecte

CAYEUX

- La Cayolaise : Général-Leclerc (rue du) 011, (1988 BE 12)

Faucou Robert, architecte

- Le Pavé : Abbeville (rue d'), (1988 AA)

Oget Zéphir, architecte

BRIGHTON

- La Surprise : Lesseps (rue) 07, (1988 AD 79, 80)

- Les Charmettes : Lesseps (rue) 27, (1988 AD 96)

3) LES CARACTERES ARCHITECTURAUX

Situation

Les maisons de villégiature et immeubles de l'agglomération balnéaire de Cayeux-sur-Mer sont implantés sur des terrains plats, la commune ne disposant d´aucune proéminence. Pour bon nombre de constructions, la vue sur mer n´est donc pas assurée.

Sur toute l'agglomération, 33 édifices sont construits au milieu de la parcelle (soit 26%), 60 en retrait de la rue (et en limite de parcelle, mitoyen ou non, soit 47%), 33 sont à l'aplomb de la rue (26%) et 1 est en fond de parcelle (0,78%). La majorité des constructions est donc établie en retrait de la rue, de façon à s´isoler de celle-ci et à s´écarter de ses nuisances. A Brighton, aucune réalisation en se trouve à l´aplomb de la rue : elles se situent toutes dans la station de Cayeux, le long des voies principales (rue du Maréchal-Foch, avenue Doumer, avenue Carnot).

Les 60 édifices établis en retrait de rue ont au moins une façade latérale mitoyenne avec une autre construction pour 50% des cas, voire sur deux façades (27%). Dans 32% des cas, la construction occupe toute la largeur de la parcelle, sans aucune mitoyenneté.

Composition d'ensemble

La parcelle est majoritairement composée d'un jardin (52% du corpus), ce qui est compréhensible quand on sait que les constructions sont isolées ou en retrait dans la parcelle. Mais ces jardins sont souvent de petite dimension, avec de maigres pelouses. L´aspect minéral prédomine, avec de larges espaces dallés. Les jardins potagers sont absents. L´aspect aride de la station où rien ne pousse, véhiculé dans les guides touristiques anciens, reste une réalité. Dans le cas des édifices en mitoyenneté, construits sur de petites parcelles étroites, il est fréquent de voir des cours en fond de parcelle (37 %). Les immeubles, construits à l'aplomb de la rue ou en léger retrait disposent eux aussi de cours.

Les communs des constructions se composent le plus souvent de garages (28%), construits accolés à l´édifice ou isolés en fond de parcelle. Le dépouillement des matrices cadastrales où sont retranscrites toutes les additions de constructions, nous indique que la villa Les Bleuets (ancienne rue du Phare, non identifiée) a été dotée d´une remise à autos en 1904, de même qu´une maison voisine, La Bourrasque (non identifiée), deux années plus tard, en 1906. Mais la plupart des garages à automobiles ont été construits au cours de l´entre-deux-guerres, à partir des années 1920. Certains rares édifices présentent encore des remises anciennes avec logements associés à l´étage [fig. 14]. Au cours de l'entre-deux-guerres, certaines maisons sont construites avec un garage dans-oeuvre, établi à l'étage de soubassement, mais le plus souvent, ce type de garage est percé tardivement (7%) [fig. 15].

Certaines maisons datant de l'entre-deux-guerres conservent des clôtures en ciment formant des motifs décoratifs caractéristiques de cette période [fig. 16].

Matériaux et mise en oeuvre

Le matériau de prédilection pour la construction des maisons et des immeubles est la brique (94%). Dans 20 cas, la brique a été supposée, sous un enduit ou un badigeon, au vu de la période de construction. Dans 10 cas, le matériau n'a cependant pas pu être déterminé.

La brique est entièrement apparente dans 46 cas (36%), dont 15 cas présentent un enduit partiel, généralement à la base du mur, afin de lutter contre l'humidité. Ce gros-oeuvre est dans 10 cas un élément de décor grâce à l'emploi d'un appareil mixte de briques de couleur rouge et ocre, formant des motifs géométriques et un effet chromatique sur le nu du mur (soit 22% des briques apparentes).

Dans au moins 73 cas, le gros-oeuvre est recouvert d'un enduit, d'un crépi ou d'un badigeon. Dans certains cas, les cartes postales montrent qu´à l´origine, un gros-oeuvre actuellement recouvert pouvait être laissé apparent (ce qui est particulièrement frappant avenue Carnot). Mais il est difficile de quantifier ces changements et de les dater. En front de mer, la modification a souvent été apportée après 1945, vraisemblablement à la suite des dégâts causés sur le gros-oeuvre qu'il a été nécessaire de solidifier. Dans 24 cas, cet enduit imite un appareil de pierre de taille grâce au dessin en creux simulant des joints [fig. 17]. Dans d´autres cas, l´enduit imite des moellons de pierre, posés en opus incertum, à la base du mur [fig. 18] ou sur toute la façade [fig. 19]. Les badigeons (57% des gros-oeuvre recouverts) sont assez fréquents. De couleur blanche, ils s´accordent avec les maisons anciennes des pêcheurs.

Le motif du faux pan de bois en ciment en partie supérieure de l'élévation est présent dans 7 cas (5,5%), aux 1er et 2e quarts du 20e siècle et s´accorde surtout avec la mode régionaliste de l´entre-deux-guerres [fig. 20]. Nous avons pu constater une 'normandisation' de certaines façades, anciennement en brique apparente, puis recouvertes d'un enduit avec motif de faux pan de bois [fig. 21].

Afin de lutter contre l'humidité, certaines maisons en briques apparentes sont partiellement recouvertes d'un essentage de matériau synthétique ou d'ardoise sur la façade tournée vers les vents dominants. Nous comptons un total de 19 cas (15%), ce qui est assez peu au regard de stations voisines. La station de Brighton est peu touchée par cette dénaturation, puisqu´une seule maison repérée présente ce type de protection.

Les essentages de planches sont très rares : sur les trois cas rencontrés, un seul est associé au « style chalet » de l´édifice [fig. 22].

Neuf édifices (7%) présentent des galets de silex en parement : 3 à Brighton, et 6 à Cayeux. Généralement, ces galets sont brisés afin de révéler le noir du silex, ils peuvent aussi être utilisés en rognons difformes. Leur utilisation est variée : à la base des murs [fig. 23], ou en parement sur l´ensemble de la façade [fig. 24]. La première maison, encore en place, à présenter ce mode de construction serait la 'Cayolaise', élevé vers 1882 par Edmond Douillet, architecte à Amiens. Ce dernier utilise le silex en alternance avec des assises de briques, selon une méthode de construction traditionnelle [fig. 25]. Il ne faut pas oublier que le sous-sol et la plage de Cayeux-sur-Mer sont essentiellement composés de galets et bon nombre de constructions anciennes présentaient des murs bahuts de galets afin de protéger les élévations en torchis : les architectes du casino actuel, inauguré en 1963, se sont à leur tour inspirés de la tradition.

Structure

54 % des édifices sont surélevés, par un sous-sol (39%) ou par un étage de soubassement (15%), alors que 46% ne sont pas surélevés.

Sur un terrain plat, les étages de soubassement ne servent pas à racheter un dénivelé, mais le plus souvent, ils constituent une assise à la construction, la surélevant, tout en permettant l´aménagement de pièces à vivre. Ces soubassements sont si élevés que de nombreux garages ont pu y être aménagés, tardivement (voir supra). Quant aux sous-sols, ils sont généralement semi-enterrés et surélèvent aussi fortement la construction. Les fonctions de ces soubassements ou ces sous-sols sont multiples : sur un terrain plat, ils surélèvent le rez-de-chaussée de façon à ce que la vue depuis ce niveau ne soit pas entravée par les mouvements de la rue [fig. 26]. De même, les terrains étant peu élevés au dessus du niveau de la mer, ils isolent les pièces à vivre des éventuelles incursions d´eau. Des témoignages oraux nous ont confirmé des inondations de sous-sols. Enfin, les soubassements sont parfois utilisés comme espace à vivre, avec accès différencié du rez-de-chaussée auquel on accède par un escalier [fig. 27]. Les diverses rencontres lors du travail sur le terrain ont confirmé cet usage local de location des étages pour les vacanciers alors que le propriétaire, Cayolais, se retire au niveau du soubassement.

Certains sous-sols ont aussi connu cet usage : des portes d´accès sont alors percées en façade, à la manière de cours anglaises, afin d´avoir des accès dissociés [fig. 28].

77 maisons présentent au moins 1 étage-carré (61%) et 7 possèdent 2 étages-carrés (5,5%) dont font partie les immeubles. Une seule maison présente 3 étages-carrés. Au total, 67% des maisons et immeubles possèdent des étages.

83% des maisons à 1 étage-carré présentent un étage supplémentaire, principalement un étage de comble (61 cas) ou un étage en surcroît (3 cas). Les rares édifices de 2 étages carrés sont plus surélevés dans 4 cas par un étage de comble, soit 57% des maisons à 2 étages carrés.

Par ailleurs, 41 édifices (32%) ne possèdent aucun étage-carré : le rez-de-chaussée, souvent surélevé par un soubassement ou un sous-sol semi-enterré (30 cas, soit 75%), est surmonté d´un étage de comble ou d´un étage en surcroît (40 cas, soit 98%).

Dans 49% des cas, ces niveaux sont marqués par un bandeau horizontal, en ciment ou en brique, associé dans 41% des cas à une corniche.

Élévations

Le comptage des travées s'est effectué de deux façons, qui correspondent à deux types de maisons : soit la maison reçoit un seul logement (mono-familiale), soit elle est composée de plusieurs logements accolés (2 ou 3, voire plus).

Ainsi, pour les maisons à un seul logement (98 occurrences), 39 édifices ont trois travées en façade (40% du type) et 33 en ont deux (34% du type). Les constructions de 1, et 4 travées sont largement minoritaires (3 à 5%) : les immeubles ont tous 4 ou plus de 4 travées en façade.

Les édifices avec trois travées en façade présentent majoritairement une porte sur la travée médiane. Quant aux édifices de deux travées, l´accès est le plus souvent, en façade, même dans le cas où la maison est en retrait de rue : seuls 27% du type présentent un accès latéral.

Le travail de terrain a permis de dissocier les habitations mono-familiales des maisons regroupant plusieurs logements accolés sous un même toit ou les maisons en bande, en série, ou jumelées. Pour ce type de construction, le choix a été de comptabiliser le nombre de travées de chaque logement et de l'associer au nombre de logements accolés. Ainsi, l'on peut constater que sur un corpus de 29 édifices, la majorité (18 cas) présente 2x2 travées avec entrée excentrée : la formule est alors d'accoler deux unités mono-familiales sus-décrites. La juxtaposition de trois logements est plus disparate avec 4 cas, alors que les deux logements accolés regroupent 25 cas.

Certaines élévations sont animées par des décrochements du plan, formant une travée en avancée latérale (25 cas, soit 20% du corpus total).

Les élévations des maisons régulièrement percées de baies, sont aussi caractérisées par des décrochements de façade dus non pas à des avancées du mur, mais à l'adjonction d'excroissances caractéristiques des sites de villégiature : 55% des édifices en présentent.

Les balcons agrémentent 29 édifices (23% du corpus total), ce qui est assez peu quand on sait le succès que connaît ce type de saillie dans d´autres stations. Il est pourtant intéressant de constater que le balcon agrémente des maisons qui n´ont pas spécialement de vue sur mer. Dans la grande majorité des cas, ce balcon est ponctuel, placé devant une porte-fenêtre de l´étage-carré (23 cas). Les bow-windows sont encore moins représentés, avec 17 occurrences (13% du corpus total), également représentés à la fin du 19e siècle ou au 20e siècle.

Sur ces 17 occurrences, 9 sont des bow-windows surmontés d'un balcon, formant une composition verticale visant à mettre en valeur une travée. Les oriels (def. : ouvrage à claire-voie formant avant corps sur la hauteur de plusieurs étages) sont inexistants. 6 tourelles ont été recensées sur les angles de maisons, dont 4 à Brighton, et toutes construites au cours du 1er quart du 20e siècle.

Le jeu des pleins et des vides est assez peu exploité : nous recensons seulement 2 loggias (def. : pièce à l'étage, ouverte sur l'extérieur : ses baies n'ont pas de menuiserie), 9 porches (dans-oeuvre et hors-oeuvre), mais 13 auvents protégeant les entrées.

Nous pouvons aussi constater que 45% des constructions ne présentent aucune saillie, le long de la rue Adolphe Roux, avenue Carnot, rue du Général-Leclerc et du Maréchal-Foch, pour ne citer qu´elles.

Matériaux et formes de la couverture

Les maisons sont majoritairement couvertes en ardoise (92 soit 72%). Des cartes postales anciennes montrent que certaines maisons (La Désirée, Sans Atout), présentaient des motifs d'ardoises de couleurs différentes, disparus avec la réfection de la toiture. Nous dénombrons aussi 9 édifices couverts de tuile mécanique (7% du corpus total), le plus souvent au cours de l´entre-deux-guerres. Par ailleurs, 16 maisons sont couvertes d'un matériau synthétique et 3 de zinc.

De même que pour le matériau, la forme de la couverture est assez peu diversifiée : 78 maisons sont couvertes à longs-pans, 37 à longs-pans brisés (soit 90,5% de longs-pans, brisés ou non). 22 toitures sont animés par une noue formant décrochement (n'ont pas été comptabilisées les noues des fenêtres de lucarnes) : dans 14 cas la noue forme un pignon en façade, couvrant généralement une travée en avancée. Ce pignon peut être un mur-pignon, il peut présenter une ferme débordante, ou une demi-croupe. 9 toits en pavillon couvrent des corps de bâtiment annexes ou le corps de logis de plan massé. Il en est de même pour les toits-terrasses qui couvrent 13 corps de bâtiment, dont 5 uniquement le corps de logis.

Les aisseliers supportant symboliquement les avant-toits sont peu répandus, avec 11 cas (soit 8%).

Styles et décors

Bien souvent, aucun style n'est clairement affiché, mais se sont des détails qui orientent les édifices vers tel ou tel courant. Le style normand est le plus clairement défini, avec l´utilisation des faux pans de bois en ciment. L'influence du chalet, avec un pignon en façade et ferme débordante, est assez souvent repris, modèle-type très répandu dans les recueils d'architecture. Mais plus généralement, un caractère classique se dégage des constructions, avec des chaînes d´angles traitées à la manière de pilastres, des lucarnes à fronton triangulaire [fig. 29].

Le décor est majoritairement composé de céramique (52 occurrences, soit 41% du corpus), essentiellement présent grâce aux carreaux portant les appellations, qui participent au décor par les couleurs. Autant dire, donc, que les décors sont discrets.

18 maisons (14% du corpus) présentent un décor de maçonnerie, jeux de briques de couleurs différentes (rouges et ocre) formant des motifs géométriques en façade.

25 maisons (20%) présentent un décor de fonderie ou de ferronnerie, principalement sur les garde-corps des baies et des balcons. Les motifs représentés sont inspirés de la nature, avec des fleurs et des volutes symbolisant le feuillage.

Seuls 3 cas de lambrequins ont été repérés.

4) NOTE DE SYNTHESE

Typologie de l'habitat de villégiature

La villa

Selon la définition communément admise, la villa est une construction destinée à la villégiature, construite en milieu de parcelle. Elle est donc totalement indépendante des constructions voisines. 73 maisons de ce type ont été recensées (47%).

Le sous-type de la villa à plusieurs logements accolés est un édifice élevé en milieu de parcelle, mais présentant 2 logements accolés sous un même toit. Très rare, il ne présente que 4 cas (dont 3 à Brighton), adaptation d´un modèle urbain en milieu paysager [fig. 30].

La maison de ville à un ou plusieurs étages-carrés

Selon la définition communément admise, la maison de ville est une construction entre mitoyens et à l'aplomb de la rue. C´est dans la station de Cayeux que se regroupe la majorité des exemples (43), à la seule différence que le caractère urbain est parfois atténué par une position en retrait de la rue (19 occurrences).

Les maisons en série ou jumelées (6 occurrences), avec des maisons accolées, seraient à associer à ce type.

La maison de ville à plusieurs logements est une maison à étages carrés qui comprend plusieurs logements sous un même toit, qu'ils soient accolés ou superposés, avec le même nombre de travées ou non (26 occurrences, soit 20% du corpus des maisons).

Le sous-type des maison de ville à plusieurs logements accolés (22 occurrences) est le plus fréquent. Implantée à l'aplomb de la rue ou en retrait, la maison est soit mitoyenne, soit en limite de parcelle, et présente deux accès en façade, un pour chaque logement. Il s'identifie au type de la 'villa à plusieurs logements', implantée en milieu de parcelle [fig. 31]. Nous avons pu repérer une version tardive du 3e quart du 20e siècle, en front de mer [fig. 32]

Le sous-type des maison de ville à plusieurs logements accolés et superposés est aussi une variante dont nous n'avons recensé que deux cas : il associe quatre logements, accolés et superposés, variante de l'immeuble, où chaque logement possède sa propre entrée [fig. 33].

Le sous-type des maison de ville à un ou plusieurs étages carrés et magasin au rez-de-chaussée (2 occurrences) est une habitation destinée ou non à la location, avec un magasin de commerce au rez-de-chaussée. L´avenue Paul-Doumer en conserve plusieurs exemples, non recensés en raison de leur dénaturation.

La petite maison de ville

Quelques cas de petites constructions ont été repérées, construites en mitoyenneté, le plus souvent en retrait de la rue, leur morphologie est inspirée par la tradition rurale. Ces maisons ne présentent en effet pas d´étage-carré mais peuvent être légèrement surélevées par un sous-sol [fig. 34]. Dans la rue Adolphe-Roux, plusieurs portes sont visibles pour une même construction : l´une d´elles distribue le logis et la seconde assure l´accès au fond de cour et à des communs (localement nommés 'ravalés') par un couloir traversant et couvert [fig. 35].

Les immeubles

Deux grands types d'immeubles sont à distinguer : les immeubles avec magasin de commerce au rez-de-chaussée (2 occurrences), et les immeubles sans magasin de commerce (2 occurrences).

Les immeubles de rapport avec magasin au rez-de-chaussée peuvent ne présenter qu'un seul commerce, mais aussi deux espaces distincts que sépare la porte d'accès aux logements [fig. 36]. Les immeubles sans commerce datant du 3e quart du 20e siècle sont caractérisés par deux étages-carrés et une entrée commune, en façade postérieure.

Conclusion

Malgré les destructions subies au cours de la Seconde Guerre mondiale, les stations de Cayeux et de Brighton ont gardé des maisons nous permettant d'entrevoir ce qu'a été la période antérieure. Les maisons de villégiature du front de mer durement touchées par les sinistres étaient aussi les plus vastes, seules des cartes postales anciennes nous permettent de le constater. De fait, l'habitat de villégiature subsistant est moins fastueux, mais se révèle très intéressant du point de vue des modes d'habiter.

Nous pouvons en effet constater que la population locale s'est très tôt investie dans l'hébergement des baigneurs [annexe 3]. Cette population locale, composée de pêcheurs et de serruriers, a certainement trouvé dans cette activité saisonnière un appoint financier. Dans un premier temps, ils louent leurs propres maisons, puis, le dépouillement des matrices cadastrales des propriétés bâties nous le confirme, ils font construire des maisons dans le quartier balnéaire et près du quartier du Bout d'Amont : les maisons Villa Boyard, Villa Jeanne-Marie et Joseph-Henri, Renée-Gabrielle, pour ne citer qu'elles, sont construites pour des marins au cours du 1er quart du 20e siècle. Ces habitations se composent de plusieurs logements, où cohabitent propriétaire et locataire. La maison dite Renée-Gabrielle est très représentative : le logement le plus grand porte l'appellation, tandis que le logement le plus exiguë n'en porte pas, mais héberge le propriétaire [fig. 37]. Ces maîtres d'oeuvre influencent par ailleurs les styles des maisons : rares sont les éléments en saillies comme les balcons ou les bow-windows, les élévations sont traitées selon la tradition locale, avec des détails décoratifs très classiques, comme les chaînes d'angles formant pilastre, des corniches à denticules et un bandeau de séparation entre le rez-de-chaussée et l'étage-carré. Cette simplicité de façade est aussi employée par des 'saisonniers' d'origine francilienne, encore très tardivement, dans les années 1910 [fig. 38].

Les dénaturations sont dans beaucoup de cas dues aux sinistres de la Seconde Guerre mondiale : beaucoup d'élévations ont été recouvertes d'un enduit et peintes de couleur blanche, surtout près du front de mer. Ces enduits ont parfois un effet négatif sur la compréhension de la composition d'ensemble : un certain nombre de maisons à logements accolés ont subi des traitements différents [fig. 39]. D'autres ont perdu toute identité, avec la pose d'un nouveau parement [fig. 40].

  • Période(s)
    • Principale : 19e siècle
    • Principale : 20e siècle
  • Toits
  • Décompte des œuvres
    • bâti INSEE 2 948
    • repérés 127
    • étudiés 14

Documents d'archives

  • La plage de Cayeux-sur-Mer et Brighton-les-Pins. Amiens : Imprimerie A. Valade, s.d. [1929].

    p. 55
  • Guide pratique des familles aux bains de mer. Plages du Nord, de Normandie, de Bretagne et de Vendée. Paris : La Fare, 1895.

    p. 57

Bibliographie

  • GODIVIER, H. La maison pour tous. Petites villas de 3.000 à 10.000 francs édifiées récemment par divers architectes. Dourdain : Emile Thézard, [ca 1900].

    pl. 5, 7, 8

Documents figurés

  • Villa à Cayeux, élévation, d'après M. Z. Oget architecte. In : GODIVIER, H. Maisons pour tous. Dourdain : Emile Thézard, [ca 1900].

  • Villa à Cayeux, coupe, d'après M. Z. Oget architecte. In : GODIVIER, H. Maisons pour tous. Dourdain : Emile Thézard, [ca 1900].

    pl. 5A
  • Villa à Cayeux, plans du rez-de-chaussée et des combles, d'après M. Z. Oget architecte. In : GODIVIER, H. Maisons pour tous. Dourdain : Emile Thézard, [ca 1900].

    pl. 5B
  • Travaux publics et particuliers, béton armé, François Brunet entrepreneur, rue du Phare, Cayeux-sur-Mer, en-tête de courrier, 1930 (AC Cayeux-sur-Mer : non coté).

  • Entreprise de maçonnerie en tous genres, travail à façon, Leborgne-Delattre, 40 rue d'Enfer, Cayeux-sur-Mer, en-tête de courrier, 1930 (AC Cayeux-sur-Mer : non coté).

  • Entreprise générale de construction, béton armé et travaux publics, Maurice Bocquet, Cayeux-sur-Mer, en-tête de courrier, 1932 (AC Cayeux-sur-Mer : non coté).

  • 28 - Cayeux-sur-Mer. Boulevard de la Mer, carte postale, par B.F. photographe éditeur, 1er quart 20e siècle (coll. part.).

  • Cayeux. Route du Phare, le château, carte postale, par La Ruche picarde éditeur, 1er quart 20e siècle (coll. part.).

  • 39 - Cayeux-sur-Mer. Un chalet boulevard de la Mer, carte postale, par B.J.C. photographe éditeur, 1er quart 20e siècle (coll. part.).

  • Cayeux-sur-Mer. Villa Marie-Elise, carte postale, par J.A. photographe éditeur, 1er quart 20e siècle (coll. part.).

  • E. Vannier, couverture-plomberie, 102 bis Grande Rue, 2 rue Prelet, Cayeux-sur-Mer, carte postale, [s.n.], 1er quart 20e siècle (coll. part.).

Annexes

  • Annexe n°1
  • Annexe n°2
  • Annexe n°3
Date(s) d'enquête : 2002; Date(s) de rédaction : 2003
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
(c) Département de la Somme
(c) SMACOPI
Justome Elisabeth
Justome Elisabeth

Chercheur à l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie de 2002 à 2006, en charge du recensement du patrimoine balnéaire de la côte picarde.

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