Les typologies d'habitat

À la manière des villages de l’ancien canton de Crèvecoeur, Croissy compte une majorité de petites fermes picardes, sièges de modestes exploitations pour des habitants travaillant souvent à la fois à l’extérieur (employés comme journaliers, ménagers ou manouvriers) et à domicile. Ces habitations sont constituées de bâtiments agricoles, avec la grange alignée sur la rue, et d'un logis, en fond de cour. Des exemples sont encore visibles (n°1 rue du Pont Cocu (ill.) ou n°6 rue de Lavacquerie (ill.)). La maison d'artisan (souvent d'un ancien tisserand à Croissy) est le plus souvent une variante de cette forme d'habitat : la grange sur rue peut être complétée ou remplacée par un atelier sur rue, toujours percé par un imposant passage charretier. Comme la ferme picarde, le logis est en fond de cour. Deux exemples ont été identifiés aux n°12 (ill.) et 10 rue de l'Abreuvoir.

Des fermes de plus grande taille se sont implantées à Croissy. Elles comprennent un vaste logis, aligné sur la rue, ou bien perpendiculaire à celle-ci. Les bâtiments d’exploitation (étables, écurie, grange, remise…) s’organisent autour d’une vaste cour fermée. L’entrée se fait par un portail. Ces fermes à cour se trouvent aussi bien aux extrémités sud (n°14 rue de Beauvais, n°2 rue de Lavacquerie) et nord (ferme de Calonne n°11 rue d’Amiens (ill.)) du village, qu'au centre de celui-ci (n°5 rue de l’Abreuvoir). L’activité agricole a ainsi pénétré dans toutes les zones du village.

Outre les fermes, des maisons avec façade sur rue, prolongées ou non par une entrée charretière, qui se rattachent davantage à un usage commercial et/ou artisanal ont été relevées. Nombreux sont les exemples repérés dans la rue de l’Abreuvoir (n°1 (ill.), 2, 4) ou le long de la rue d’Amiens (n°10, 16 et 18 (ill.)). La présence d’une grange-étable à l’arrière des logis cités rue d’Amiens témoignent de la polyvalence des activités des habitants des villages, qui pouvaient compléter leur activité commerciale et/ou artisanale par la gestion d’une petite exploitation agricole.

Les matériaux de construction

Contrairement aux villages des environs, la pierre de taille est relativement fréquente dans la maçonnerie des édifices. La proximité de carrières de calcaire à Croissy peut l'expliquer en partie. Cet emploi concerne évidemment les édifices les plus anciens et remarquables comme les moulins (le moulin dit "Bleu" au n°17 rue du Marais, le moulin au 3bis rue de la Gare), la demeure d'Henriette Pigeon datée de 1729 (n°34 rue d'Amiens (ill.)), l'ancien presbytère (n°12 rue d'Amiens), l'hôtellerie dite du Dauphin (n°7 rue d'Amiens) ou encore la grange aux dîmes. La pierre se retrouve néanmoins dans de nombreux solins de bâtiments plus communs (c'est le cas par exemple rue de Lavacquerie avec la grange au n°1, le pignon du logis au n°25, ou bien rue du Pont Cocu avec le logis détruit au n°3). L’appareil mixte fait de briques bloquées entre une section de pierre de taille est toutefois plus fréquent (n°4 rue de Lavacquerie (ill.), n°1 rue de la Gare). La brique reste néanmoins la plus employée dans les solins.

Néanmoins, le pan de bois et le torchis restent des matériaux courants dans les maçonneries des habitations de Croissy. Leur emploi est caractéristique des villages de l'ancien canton de Crèvecœur et plus largement du plateau picard. Le pignon du n°25 rue de Lavacquerie rend par exemple visible l’agencement symétrique du pan de bois. Ce dernier est le plus souvent recouvert d’un essentage en bois (n°18-16 rue d’Amiens avec lambrequins au niveau de l’égout du toit (ill.)).

La brique s’impose ensuite, lorsque sa production s’industrialise à partir de la seconde moitié du 19e siècle. Une particularité supplémentaire explique son emploi massif à Croissy : lors de la reconstruction de l’église en brique, dans les années 1860, le contrat passé avec la briqueterie Caudillon de Fransures a permis aux habitants de disposer de ce matériau à prix réduit. Plusieurs maisons ont alors été reconstruites avec comme au n°7 rue d'Amiens (ill.) ou encore le moulin des Prés, reconstruit par son propriétaire Louis Dannelle. Comme il est fréquent dans les villages du plateau picard, les propriétaires des fermes les plus imposantes décident également de rebâtir les bâtiments d’exploitation et le logis en brique (fermes au n°11 rue d'Amiens (ill.), au n°14 rue de Beauvais, n°5 rue de l’Abreuvoir). Ce matériau est ensuite privilégié dans la première moitié du 20e siècle (exemple n°9 rue de l'Abreuvoir (ill.)).

Concernant les couvertures, les recensements de population montrent un recul du chaume à partir des années 1830, au profit de la tuile et de l’ardoise. Les toitures en tuile sont aujourd'hui majoritaires, même si celles en ardoise sont encore nombreuses.