Lors des conflits, les édifices religieux ont souvent été bombardés, les clochers servant d´observatoire. Seuls deux sanctuaires sur l´ensemble du Chemin des Dames ont échappé partiellement aux destructions (les églises de Pancy-Courtecon et de Crandelain). Afin d´assurer le chantier de réhabilitation de leur église, les villages des régions dévastées se sont regroupés en coopératives diocésaines (statuts fixés par la loi du 15 août 1920), dont le but était d´alimenter et de coordonner les travaux des édifices non classés ; certains villages du Chemin des Dames y ont adhéré. Ne se contentant pas d´un seul rôle financier (comme c'est le cas pour les coopératives civiles), ces sociétés exercent un contrôle technique (veiller à la qualité des projets retenus) et stylistique (sélectionner les maîtres d´ouvrage), guidées par les architectes des Beaux-Arts. L´influence des coopératives entraîna l´adoption de nombreux pastiches des modèles d´avant-guerre et le ralentissement des innovations architecturales. Malgré les aides (souscriptions, emprunts, dons émanant d´initiatives privées ou d´organismes de solidarité), l´église, dernier bâtiment communal à profiter de la reconstruction, a largement souffert du déficit financier survenu à la fin de la période de réhabilitation des régions dévastées (indemnités trop faibles) : les projets étaient alors régulièrement revus à la baisse par le comité technique de la Coopérative de Reconstruction (qui tenait également compte de la chute démographique). La reconstruction des églises du Chemin des Dames s´étale de 1922 (Bouconville-Vauclair) à 1938 (Vendresse-Beaulne). Les principes directeurs, solidité et économie, amènent les architectes à simplifier au maximum les formes, à minimiser les dimensions. Les anciennes fondations ainsi que les matériaux issus de la destruction sont réutilisés afin de consolider la nouvelle construction. Les églises classées sont reconstruites à l´identique, comme la loi de 1913 sur les Monuments Historiques l´impose (Pancy-Courtecon et Crandelain). Pendant toute la durée des travaux, étalés sur plusieurs années, le recours à une chapelle provisoire est nécessaire afin d'assurer le culte. Cette solution palliative entraîne de multiples inconvénients, notamment financiers, induisant une double dépense (chapelle provisoire et travaux de l´église, comme à Berry-au-Bac).
- patrimoine de la Reconstruction, Chemin des Dames
- (c) Ministère de la culture - Inventaire général
- (c) Département de l'Aisne
- (c) AGIR-Pic
Dossier non géolocalisé
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Dénominationséglise, chapelle, croix monumentale, calvaire
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Aires d'étudesCommunauté d'agglomération du Pays de Laon, Communauté de communes de la Champagne Picarde, Communauté de communes du Chemin des Dames, Communauté de communes du Val de l'Aisne
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Période(s)
- Principale : 2e quart 20e siècle
Malgré la tendance à l´économie, lors de la fusion de plusieurs villages, chaque ancienne commune se voit reconstruire sa propre église (Aizy-Jouy, Colligis-Crandelain). Les hameaux secondaires bénéficient également d´une chapelle rappelant la présence primitive d´habitations (la chapelle de Chivy à Vendresse-Beaulne, celle de Courtecon à Pancy-Courtecon). Parmi les églises détruites sur le Chemin des Dames durant la Première Guerre mondiale, une grande partie datait du 13e siècle. Les architectes de la reconstruction tiennent à respecter l´aspect originel de ces édifices. Sans pour autant reconstruire à l´identique, les modules anciens ont donc été réutilisés, simplifiés et adaptés à une architecture ramassée, aux volumes modestes et sommaires, pourvus d´un décor extérieur relativement sobre. L'église d'Aizy est le seul exemple illustrant une certaine liberté de conception prise par l'architecte. Pour des raisons financières, l´ossature est établie en ciment armé, totalement étanche (poteaux et sablières, soubassement, piliers, fondations et base du clocher, dallage), le remplissage des murs se faisant à l´aide de matériaux agglomérés ou de blocage de moellon, vestige de l´ancien édifice. En plus d´un coût limité, les nouveaux matériaux offrent de réelles possibilités architecturales dont l´église d´Aizy est un exemple parfait (recours à la coupole). Les églises étudiées ici reprennent généralement le plan de l´ancien édifice : la croix latine reste donc la règle. Malgré tout, le visiteur observe la baisse ou la disparition totale des transepts, justifiant l´emploi du plan allongé. Le choix d'un modèle consacré est lié à la volonté de vouloir faire référence au passé. Les constructeurs identifient clairement les différentes parties de l´édifice en localisant les recherches formelles sur les points forts (le clocher, le porche, le portail surmonté de gâble). Signe le plus visible de l´église, le clocher est toujours mis en évidence par son implantation (souvent au-dessus du porche), sa forme et son décor. Une position décentrée rehausse encore son rôle ostentatoire (comme à Pargny-Filain, Ostel, Vassogne). Il n´est que très rarement placé sur la croisée du transept (Jumigny). Le porche qu´il surmonte peut être ajouré sur trois côtés (église de Jouy) ou uniquement en façade (comme à Paissy). Il est souvent flanqué de contreforts puissants, soulignant sa verticalité. L´entrée de l´église est occupée par le narthex supportant la tribune. La chapelle des fonts baptismaux est quasi-systématiquement située dans le bas-côté nord près du porche. La nef est généralement longue de trois travées ; elle n´est que très rarement accompagnée de bas-côtés. Le choeur est orné d´une voûte en cul de four, parfois en brique. L´intérieur de l´édifice reçoit un enduit simili pierre, avec joints d´appareil. Le décor (redents, cubes, chevrons, pyramides, motifs floraux) est désormais stylisé et géométrique. Concentré sur les lignes ou les articulations (chapiteaux, frises, portails ou corniches), il souligne les différentes parties architecturales. Il constitue avec le mobilier ayant reçu les mêmes éléments décoratifs un tout cohérent. Conclusion L'audace des architectes se concentre à l'intérieur de l'édifice par le biais du décor, du mobilier et de la forme des voûtes, contrastant ainsi avec l'aspect souvent conventionnel de l'architecture. Les modèles traditionnels se sont ainsi adaptés aux exigences stylistiques et économiques de la période d'après-guerre. Le patrimoine religieux du Chemin des Dames, comme partout ailleurs, est menacé par le manque d'entretien. En effet, certaines églises et chapelles sont laissées à l'abandon.
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Toitsardoise
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Murs
- pierre artificielle
- béton
- matériau synthétique en gros oeuvre
- moellon
- pierre de taille
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Décompte des œuvres
- repérées 33
- étudiées 33
- (c) Ministère de la culture - Inventaire général
- (c) Département de l'Aisne
- (c) AGIR-Pic
Documents d'archives
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DOUILLET, Edmond. L´oeuvre des coopératives diocésaines : la reconstruction des églises dévastées, l´architecture religieuse nationale. Amiens : Imprimerie Georges Degouy, [s.d.].
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DOUILLET, Edmond. Pour les plus humbles églises de village des régions dévastées. Amiens : Imprimerie Yvert et Tellier, 1916.
Bibliographie
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p. 11 -
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p. 277 -
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p. 72 -
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