L'importance du bâti agricole témoigne de l'activité essentielle des villages. Le principal modèle rural adopté sur le Chemin des Dames est celui de la ferme clôturée en quadrilatère : les bâtiments, disposés autour d'une cour carrée, déterminent un espace clos. Avant la guerre, les bâtiments étaient contigus à ceux de leurs voisins : le village était donc constitué d´une succession de modules clos. Le cultivateur, pour des raisons pratiques et économiques, avait tout intérêt à réduire la superficie au sol. Désormais, la mitoyenneté n´est plus de rigueur. Le logis Les maisons subordonnées aux ensembles agricoles connaissent les mêmes modèles structurants que les habitations indépendantes, c´est pourquoi nous ne redétaillerons pas ici le type architectural du logis. Avant la guerre, le logis occupe le fond de la cour. Son plan au sol est réduit pour des raisons économiques. Ainsi placé à l´extrémité de la ferme, le cultivateur embrasse du regard l´ensemble de son exploitation. Le remembrement d´après-guerre permet le déplacement du logis du centre de la propriété (entre les bâtiments sur rue et les champs) vers le front de la ferme. Les principes hygiénistes engendrent l´élargissement des ouvertures ainsi que la séparation du logis des bâtiments réservés aux animaux. L´affectation des pièces est désormais unique. Les bâtiments annexes La proximité des carrières a permis l'emploi du moellon pour les annexes agricoles. Leur édification, qui se devait d'être économique, justifie également l'utilisation de matériaux de récupération. L´introduction de nouveaux éléments de construction (charpente en fer, béton armé) permet des performances architecturales innovantes (comme l´agrandissement des hangars). Chaque dépendance possède une destination propre, qui constitue souvent son seul caractère distinctif. Trois types d´édifice se différencient : les bâtiments destinés au stockage des récoltes, ceux affectés à l´abri du matériel et des machines (les grands hangars) et les derniers, réservés aux animaux. Description Architecturalement, les bâtiments diffèrent peu du logis ; ils sont légèrement plus larges pour des questions pratiques. Constitués des mêmes matériaux (moellons de calcaire, tuiles...), ils usent de méthodes de construction similaires. Chaque bâtiment agricole possède un toit indépendant (empêchant l´extension du feu en cas d´incendie et donnant plus de souplesse en cas d´agrandissement). Une recherche décorative est visible pour certains : l´ornement soulignant les articulations architecturales se traduit par une alternance de briques rouges et blanches ou par l´utilisation d´un appareillage varié. La grange Plus imposante que les autres bâtiments, la grange est située directement sur la rue, facilitant ainsi le déchargement des remorques. Occupant généralement tout un côté de la cour, son statut principal se justifie par le fait que les récoltes composaient la ressource essentielle des cultivateurs, d'où la présence quasi-systématique d'un fenil sous les combles. Avant 1914, le bâtiment abritait un atelier d´hiver dans lequel les grains étaient battus au fléau. Peu à peu, le battage et la jachère sont abandonnés. Aujourd´hui, la grange a pour fonction essentielle le stockage des récoltes. Seul le côté sur cour est percé de grandes portes coulissantes permettant l'accès des chargements importants. Quelques fenêtres assurent l´aération de l´édifice, tout en maintenant son isolement. Un portique à piles carrées soutient le toit débordant, assurant la protection des machines. Les combles ajourés garantissent le stockage du foin. Les bâtiments des animaux Ils doivent être suffisamment éclairés et aérés. Le sol doit être étanche, d´où l´emploi fréquent du béton en pan incliné. La constance de la température est assurée par l´épaisseur des murs. L´étable est moins haute, plus obscure, plus chaude que l´écurie qui occupe une place de choix accolée au logis. La porcherie et le poullailler sont mis à l´écart pour des raisons évidentes d´hygiène. Des greniers à fourrage sont aménagés au-dessus des étables, séparés du rez-de-chaussée par des planchers en ciment armé ou en fer à voutains de brique (impénétrables aux buées du bétail et aux rongeurs). Auparavant privilège des seigneurs et grands cultivateurs, l'implantation d'un pigeonnier au sein de la propriété se démocratise au cours du 19e siècle. Plusieurs ont été recensés sur le Chemin des Dames. Indépendants ou associés à la grange, ils ont parfois fait l´objet d´une recherche architecturale intéressante (Vassogne, Crandelain). Les matériaux utilisés sont les mêmes que l'ensemble des autres bâtiments agricoles (moellon, enduits, brique). L´installation d´un tas de fumier exige, selon les lois sur l´hygiène, une plate forme étanche avec écoulement vers la fosse à purin qui permet de fertiliser l´engrais. L´Etat accorde donc des subventions pour l´établissement de ces fosses. Conclusion L´évolution des techniques agricoles a contraint les fermes professionnelles à s´isoler, alors qu'elles composaient la majeure partie de l´habitat des communes. Les annexes des fermes de village sont désormais dépourvues d´usage agricole.