Historienne, Martine Plouvier a été conservateur régional de l'Inventaire général de Picardie, conservateur en chef aux Archives nationales et directrice du Centre d'études et de recherches prémontrées.
- mobilier et objets religieux, la cathédrale de Soissons
- (c) Ministère de la culture - Inventaire général
- (c) Département de l'Aisne
- (c) AGIR-Pic
Dossier non géolocalisé
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Aire d'étude et canton
Grand Soissons Agglomération - Soissons-Sud
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Commune
Soissons
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Adresse
Cathédrale Saint-Gervais-Saint-Protais
,
place Cardinal-Binet
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Emplacement dans l'édifice
première chapelle nord du déambulatoire, dite chapelle Saint-Rufin (baie 9)
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Dénominationsverrière
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Titres
- Scènes de l'histoire de saint Sixte et saint Sinice
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Dossier dont ce dossier est partie constituante
Sacré en 1890, Monseigneur Jean-Baptiste Duval forme le dessein d'orner de verrières la cathédrale, et tout particulièrement les chapelles du déambulatoire. Ces travaux sont confiés au peintre-verrier Félix Gaudin, installé, depuis 1890, 6 rue de la Grande-Chaumière à Paris, et qui vient de restaurer trois des grandes verrières de l'abside.
Après avoir doté en 1891-1892 les chapelles Saint-Paul et Saint-Pierre de deux ensembles consacrés aux saints soissonnais Crépin et Crépinien, puis Gervais et Protais, Félix Gaudin esquisse un projet de verrières pour les trois baies de la chapelle Saint-Valère. Enfin, un devis est dressé par l'architecte diocésain Paul Gout, en 1894, pour les verrières de la dernière chapelle absidale ou chapelle Saint-Rufin.
Si l'on en croit le devis estimatif conservé aux Archives nationales, les trois baies de la chapelle Saint-Rufin, murées dans leur partie inférieure, conservent alors des médaillons anciens. Ils se rapporteraient, dans l'une des baies latérales, à la légende de l'évêque saint Arnoult, et dans l'autre, à la légende de l'évêque de Soissons, saint Bandry. Le devis concerne la remise en plomb des verrières et la réfection des parties manquantes.
Il est permis de se demander d'où proviennent ces panneaux médiévaux, car, quand le baron de Guilhermy visite la cathédrale au milieu du 19e siècle, aucun élément de vitrail ne participe alors au décor de cette chapelle. Il faut y voir sans doute un remontage récent des médaillons installés en bouche-trou dans les fenêtres hautes du chœur ou rassemblés dans la chapelle Saint-Pierre entre 1816 et 1818, et qui en ont été chassés en 1882 dans la perspective d'une restauration raisonnée et de la création de nouveaux ensembles. L'iconographie est également surprenante, car aucune chapelle ou chapellenie n'a été fondée en l'honneur de saint Arnoult et saint Bandry dans la cathédrale au Moyen Âge. À moins qu'il ne s'agisse de panneaux provenant de l'abbatiale de Braine, il faut plus probablement y reconnaître les éléments subsistants des verrières qui illustraient la vie de saint Nicaise, de saint Blaise ou de saint Nicolas, tous évêques, et qui sont entrés par la suite dans les collections de musées français et américains.
Quoi qu'il en soit, la commande passée à Félix Gaudin est assurément modifiée, puisque les deux verrières latérales réalisées se rapportent à saint Sixte et saint Sinice, les deux premiers évêques de Soissons et de Reims. Il s'agit donc de créations, sans aucun élément figuratif médiéval intégré. Les travaux de vitrerie de cette chapelle sont réalisés en 1895, avec la participation financière de l'évêque de Soissons.
D'après l'ouvrage consacré à Félix Gaudin par Jean-François Luneau, et grâce aux archives de l'atelier Gaudin, il est possible d'attribuer le dessin des médaillons au cartonnier Émile Delalande. En effet, à une exception près, cet artiste est le cartonnier exclusif du peintre-verrier, après l'installation de ce dernier à Paris en 1890. Il est en outre spécialisé dans un dessin s'inspirant de l'art médiéval.
La verrière de la baie 9 a été assez peu endommagée au cours de la Première Guerre mondiale. La restauration dont elle a néanmoins profité, et dont témoignent des plombs de casse, n'a pas modifié l'ordre original des médaillons.
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Période(s)
- Principale : 4e quart 19e siècle
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Dates
- 1895, daté par source
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Lieu d'exécutionCommune : Paris
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Auteur(s)
- Auteur : peintre-verrier attribution par source
- Auteur : cartonnier attribution par travaux historiques
La verrière prend place dans une baie en forme de lancette, qui s'achève en arc brisé à sa partie supérieure. Elle n'est pas composée de panneaux droits superposés, mais de panneaux de formes variées, délimités par l'armature métallique. Les scènes figurées occupent huit panneaux carrés, superposés sur l'axe vertical de la verrière. Cette dernière est formée d'un assemblage de pièces de "verre antique" rehaussées de grisaille, parmi lesquelles se remarquent des pièces de verre rouge hétérogène.
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Catégoriesvitrail
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Structures
- baie libre, rectangulaire vertical, en arc brisé
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Matériaux
- verre transparent, soufflé, taillé, peint, grisaille sur verre
- plomb, réseau
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Précision dimensions
Mesures approximatives : h = 780 ; la = 150.
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Précision représentations
La verrière comporte huit panneaux figurés carrés superposés. Ils se rapportent à la fin de la vie de saint Sixte et saint Sinice, à leur mort et à l'histoire de leurs reliques, d'après des vies de ces saints. L'histoire se déroule de bas en haut.
Description des scènes :
- Se sentant au terme de sa vie, saint Sixte fait venir saint Sinice et lui recommande l'Église de Reims. Sur le panneau, saint Sixte en habit d'évêque, est représenté mourant, allongé sur son lit. Il est soutenu par un clerc, qui se tient debout et de face, à l'arrière du lit. Saint Sixte tend un parchemin portant ses dernières volontés ou ses recommandations, à saint Sinice, représenté debout et de trois-quarts, en habit d'évêque, avec mitre et crosse.
- Saint Sixte est inhumé dans l'oratoire Saint-Pierre, qu'il avait érigé dans les faubourgs de Reims. Saint Sinice, debout et de trois-quarts, tient une grande croix de la main gauche et bénit le cercueil de la main droite. Il est encadré par deux religieux, debout et de trois-quarts, les mains jointes. Au premier plan, deux hommes de profil, un genou en terre, portent le cercueil et le placent dans la tombe.
- Saint Sinice succède à saint Sixte sur le trône épiscopal de Reims. Pour le remplacer à Soissons, il sacre évêque son neveu Divitien, qui devient donc le troisième évêque de Soissons. Au centre du panneau, saint Sinice, debout et de trois-quarts, en habit d'évêque, tient une grande croix de la main gauche. De la main droite, il bénit Divitien, agenouillé tête nue devant lui. deux religieux assistent à la scène. L'un, derrière saint Sinice, tient le livre des Saintes Écritures ; l'autre, derrière Divitien, porte la mitre et la crosse du futur évêque.
- Saint Sinice meurt, après avoir poursuivi et perfectionné pendant quelques années l'œuvre de saint Sixte à Reims. Son corps est déposé à côté de celui de saint Sixte dans l'oratoire Saint-Pierre. Le panneau montre Divitien, en habit d'évêque, debout et de trois-quarts, qui bénit le cercueil de saint Sinice. Au premier plan, deux hommes de profil, portent le cercueil de saint Sinice et s'apprêtent à le déposer à côté de celui de saint Sixte, qui repose sur le sol.
- Vers le milieu du 9e siècle, Ebbon ou Ebon, 31e archevêque de Reims, donne à son ami saint Anschaire, archevêque de Hambourg et de Brême, une portion des reliques de saint Sixte et saint Sinice. Sur le panneau, Ebbon est représenté debout et de trois-quarts, en habit d'évêque. Il est ici auréolé, confusion probable avec saint Ebbon, évêque de Sens. Il remet les ossements, posés sur un tissu, à l'archevêque saint Anschaire, agenouillé devant lui.
- En 920, Hérivée ou Hérivé, 34e archevêque de Reims, retire les corps de saint Sixte et saint Sinice du caveau où ils avaient été déposés. Il les fait transporter dans l'église Saint-Remi où on les place près de l'autel Saint-Pierre. La scène représente deux hommes debout et de profil, portant un brancard sur lequel sont posés les deux cercueils recouverts d'une tenture. Ils sont accompagnés par l'archevêque Hérivée, debout et de trois-quarts, à l'arrière-plan.
- Plus tard, les reliques sont divisées. Une partie comprenant le chef de saint Sixte est transportée à l'abbaye Saint-Nicaise. L'autre partie est apportée à la cathédrale de Reims et renfermée dans une châsse très riche. La septième scène du vitrail montre les fidèles vénérant les reliques des deux saints à l'abbaye Saint-Nicaise. Un reliquaire, laissant voir un os et un crâne, est placé à l'intérieur d'un bâtiment. Il est entouré de six personnes, dépeintes debout ou à genoux, de profil ou de trois-quarts. Ces personnages, parmi lesquels se remarque un moine, ont tous les mains jointes, à l'exception d'une femme qui tend un nourrisson emmailloté vers les reliques. Peut-être s'agit-il d'une allusion à une guérison miraculeuse ?
- Jusqu'au 17e siècle, la cathédrale de Soissons ne possède aucune relique de ses deux premiers évêques. En 1629, Simon Le Gras, évêque de Soissons, obtient du chapitre de Reims des parcelles des reliques dont il enrichit l'église cathédrale. La scène supérieure (et dernière scène) du vitrail représente cet évêque, rapportant les reliques à Soissons. Le panneau est occupé par deux religieux, debout et de profil, portant sur leurs épaules un brancard de procession. Un reliquaire renfermant plusieurs ossements de saint Sixte et saint Sinice, est posé sur le brancard. L'évêque Simon Le Gras, muni de sa crosse, marche à côté du reliquaire et fait un geste de bénédiction.
Ces carrés, accostés de quatre segments de cercle qui les transforment en quadrilobes, se détachent sur un fond ornemental de cercles, remplis par des rosaces de feuillages ou des fleurettes. Une frise de feuillage borde la verrière.
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Inscriptions & marques
- inscription donnant l'identité du modèle, peint, sur l'oeuvre, latin
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Précision inscriptions
La majeure partie des inscriptions se détachent en réserve sur un fond noir. Le nom des personnages représentés est inscrit dans un bandeau, contigu à leur représentation. Dans les scènes comportant la représentation d'un cercueil, le nom du défunt est inscrit en noir sur le cercueil. La lecture de l'histoire s'effectue de bas en haut. Premier médaillon : S. SIXTVS, SINICIVS ; deuxième médaillon : S. SIXTVS (sur le cercueil) ; troisième médaillon : S. SINICIVS, DIVITIAN[VS] ; quatrième médaillon : S. SIXTVS, S. SINICIUS (sur les deux cercueils), DIVITIANVS ; cinquième médaillon : S : EB[B]ON, S. ANSCHARIVS ; sixième médaillon : S. SIXTUS, S : SINICIUS (sur la tenture recouvrant les cercueils), HERIVARI[VS] ; septième médaillon : S. SIXTVS, S. SINICIVS ; huitième médaillon : SIMON.
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État de conservation
- oeuvre restaurée
- plombs de casse
- grillage de protection
- salissure
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Précision état de conservation
D'après les photographies conservées à la Médiathèque du Patrimoine, cette verrière semble avoir été la moins endommagée des trois verrières de la chapelle, au cours de la Première Guerre mondiale. Seuls quelques verres ont été partiellement ou entièrement détruits dans les scènes ou dans leur entourage décoratif, et les plombs du réseau original ne paraissent pas avoir été brisés ou déformés. La succession logique des scènes a été respectée, lors de la remise en place. La verrière est protégée par un grillage. Elle est très sale à l'extérieur, ce qui atténue sa translucidité.
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Statut de la propriétépropriété de l'Etat
- (c) Ministère de la culture - Inventaire général
- (c) Département de l'Aisne
- (c) AGIR-Pic
Documents d'archives
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AN. Série F ; Sous-série F 19 (Cultes) : F 19, carton 7891 (Travaux exécutés dans la cathédrale de Soissons au cours de la période concordataire ; 1894-1906).
Devis estimatif des grosses réparations à exécuter sur les verrières du 13e siècle d'une des chapelles de l'abside (1894). -
AP atelier Gaudin : Registre des petits cartons.
N 01847-N 01854. -
BnF (Cabinet des Manuscrits) : naf 6109 (collection Guilhermy, 16). Description des localités de la France (Soissons).
Folio 257 r°.
Bibliographie
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ANCIEN, Jean. Vitraux de la cathédrale de Soissons. Réédition du livre du 24 juillet 1980. Neuilly-Saint-Front : imprimerie Lévêque, 2006.
p. 126-131. -
FRANCE. Corpus Vitrearum Medii Aevi. Les vitraux de Paris, de la Région parisienne, de la Picardie et du Nord-Pas-de-Calais. Recensement des vitraux anciens de la France, vol. 1. Paris : éditions du CNRS, 1978.
p. 170. -
LUNEAU, Jean-François. Félix Gaudin, peintre-verrier et mosaïste (1851-1930). Collection Histoires croisées. Clermont-Ferrand : Presses Universitaires Blaise-Pascal, 2006.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.
Historienne, Martine Plouvier a été conservateur régional de l'Inventaire général de Picardie, conservateur en chef aux Archives nationales et directrice du Centre d'études et de recherches prémontrées.
Chercheur de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, région Hauts-de-France jusqu'en 2022.