Ce tableau est l’œuvre du Parisien Alexandre Thiollet (1824-1895), connu comme peintre de genre et de paysage. Élève des peintres Martin Drolling et Robert-Fleury à l’École des Beaux-Arts, il expose dès 1846 au Salon et sera membre de la Société des Artistes Français jusqu'en 1895. Ce tableau a été présenté au salon de 1872 au Palais des Champs-Élysées sous le numéro 1445, où il est acquis par l’État. Il figure dans l'album Michelez correspondant aux achats et commandes de l’État. L’œuvre fait l'objet d'un dépôt de l’État en 1874, au titre du Fonds national d'art contemporain, au musée municipal de Vervins, occupant alors plusieurs salles de l'hôtel de ville. Cet embarquement des bestiaux sur le quai de la Quarantaine à Honfleur permet d'apprécier pleinement le talent de peintre de paysage et de sujets animaliers d'Alexandre Thiollet. En effet, après avoir commencé à peindre des paysages historiés, il s'oriente vers l'étude naturaliste du paysage. Il choisit, outre les paysages de la vallée de la Seine, les paysages bocagers de la Normandie à partir de 1859. Il se consacre à la description des paysages du pays d'Auge, de Trouville, de Villerville et du petit port d'Honfleur qui est un de ses lieux de prédilection. Il présente aux Salons près de cinq tableaux ayant pour sujet l'embouchure de la Seine à Honfleur ou les bassins du port de la petite cité normande. L'Embarquement de bestiaux du Salon de 1872 montre une œuvre peinte avec des valeurs chromatiques claires, et une touche assez large dotée d'un sens réel de la lumière. La vue panoramique du quai de la Quarantaine permet d'ajouter à la description du vieux Honfleur, au 1er plan, la vision d'un troupeau de vaches attendant d'être embarqué sur les bateaux qui se profilent à l'arrière-plan et composant avec le vaste ciel éthéré, une poétique évocation du rivage normand animé par quelques personnages. De telles vues côtières et maritimes le rapprochent, outre de nombreux artistes naturalistes attentifs à la description de la vie rurale, de peintres comme Boudin ou Isabey. Le tableau de Vervins, qui a conservé son beau cadre d'origine, visible sur la photographie du Salon, permet ainsi d'évoquer tout un aspect de la peinture française, celui du Naturalisme et de la peinture de plein-air, attaché à des formes plastiques traditionnelles qui, parallèlement à l'émergence de l'Impressionnisme, continue à être une part importante de la création picturale de la 2e moitié du 19e siècle.