"Charles Henry DE SORDY (1771-1857), ingénieur et architecte picard, naquit à Rue le 13 mai 1771. Son père, Louis Bonnaventure DE SORDY, Ecuyer, était lui-même né à Rue en 1724 et appartenait à une famille originaire d´Italie ; il était fils de Cressentin, Bonnaventure DE SORDY, un ancien capitaine du Régiment des Grenadiers Royaux, mort en 1741 à Rue où il avait épousé en 1721, Marie-Jeanne LEVASSEUR.

Louis, Bonnaventure DE SORDY mourut à Rue en 1785, comme capitaine invalide ; d´un premier mariage, il avait eu, en 1754, un fils Louis qui était ingénieur du Roi à Vron en 1785. C´est de son second mariage, avec Marie, Anne, Catherine CASSIN que naquit Charles DE SORDY, qui écrira son nom sous la forme : SORDI.

Charles SORDI reçut ses premières notions d´Ingénieur de son frère et entra en 1787 à l´Ecole des Ponts-et-Chaussées. Sorti en 1792 du Corps des Ponts-et-Chaussées, il participa aussitôt aux premières campagnes de la Révolution Française, en 1792-1793, dans l´Armée du Nord ; il fut ensuite requis par le Comité de Salut Public pour la construction des établissements des lignes télégraphiques de Strasbourg à Brest jusqu´à l´An VII.

Nommé capitaine Aide de Camp du Général Brune le 20 janvier 1800, il participera à ses campagnes de 1800 à 1801, dans l´Ouest et en Italie, jusqu´au départ de ce général pour Constantinople.

Le 17 septembre 1803, rentré dans le Corps des Ponts-et-Chaussées, SORDI fut attaché à l´Etat major de l´Armée commandée par Soult, au camp de Boulogne, comme Ingénieur chargé des communications militaires ; à ce titre, il eut à y exécuter de nombreux travaux nécessaires aux armées.

Bonaparte, Premier Consul, avait établi son Grand Quartier Général au château de Ponts-de-Briques et s´était fait construire, sur les falaises, au nord de Boulogne, une baraque en bois, d´où il pouvait y suivre les événements de mer.

En juillet 1804, il fut décidé d´y faire des réparations et d´y adjoindre des cuisines, un corps de garde et une écurie. Ce fut SORDI que le général Caffarelli chargea des travaux, au nom du général Ducroc, Grand Maréchal du Palais. Tout devait être achevé pour la journée de la remise solennelle de la Légion d´Honneur par l´Empereur, le 16 août 1804, mais la construction des dépendances ne put être achevée aussi rapidement.

Peu après la levée du Camp de Boulogne, SORDI n´y ayant plus ses fonctions vint à Paris, y demeurant 77 rue Neuve des Petits Champs ; il fut alors proposé pour un emploi dans la Somme, mais il préféra rester à Paris avec sa famille qui comptait 3 enfants, ce qui le fit rayer du Corps des Ponts-et-Chaussées.

Cependant, en septembre 1813, il devint Ingénieur inspecteur des travaux des communes de la Somme et vint résider à Amiens. Il organisa en 1814, la « poignée de braves dirigée contre les Cosaques ravageant Doullens », écrira-t-il le 27 mars 1815 au Général Bertrand pendant les Cent Jours.

Signalé comme « ardent bonapartiste », le Préfet La Tour du Pin qui avait, en son temps, profité de l´Empire, le priva de son emploi qui constituait sa seule ressource.

Rappelant pendant les Cent Jours, à Bertrand « l´époque mémorable des Camps de Boulogne » au cours de laquelle ils s´étaient bien connus, SORDI s´offrit à servir Napoléon de retour, et demanda un poste actif à l´armée, ou dans un Etat-major, ou dans le corps des Ingénieurs géographes.

Bacler d´Albe, Directeur du Dépôt général de la Guerre, considérait SORDI comme un Ingénieur instruit et capable.

En 1820, il vivait toujours à Amiens où il s´était fixé comme architecte, demeurant alors 1 place St-Martin. Il entreprit en 1824, la restauration de l´église Saint-Vulfy à Rue, son pays natal, qu´il acheva en 1831, un an après avoir perdu sa fille Ange-Laure, morte à 27 ans et qu´il fit inhumer au cimetière de la Madeleine ouvert depuis une dizaine d´années.

Il avait envisagé de partir refaire une carrière à l´étranger, en Russie, au Brésil ou dans les Etats de Sardaigne, mais finalement resta à Amiens.

Il mourut lui-même dans cette ville le 27 juillet 1857 et fut inhumé à son tour au cimetière de la Madeleine, dans l´enclos, près de sa fille."

Extrait de BEAUCOUR, Fernand. La Madeleine et les contemporains de la Révolution, pp. 4-5.