"Ce n'est pas sans quelque peu d'émotion que nous nous arrêtons devant le second monument à la suite du précédent : nous voulons parler de celui de M. VASSEUR, fils de Bruno VASSEUR, dont nous nous sommes occupés lors de notre visite dans la plaine F.
Ne semble-t-il pas que cette famille soit prédestinée à de funestes accidents, quand on pense au père, mort d'une chute faite du haut en bas du clocher de la cathédrale, et au fils, victime d'un évènement tragique, conçu et exécuté par une pensée criminelle. Il ne nous appartient point, et nous ne voulons, à aucun prix, réveiller des haines éteintes, souffler sur les passions pour les rallumer, nous nous bornons à relater un fait qui appartient à l'histoire de la cité.
Le 10 septembre 1835, M. BRUNO, propriétaire, se rendait à la campagne pour visiter une propriété ; il était en cabriolet, et son fils l'accompagnait à cheval. Arrivés à une certaine distance, dans la campagne, ils furent rejoints par M. [...], également monté à cheval, et qui, parvenu un peu au-delà du cabriolet dans lequel était M. BRUNO, se retourna, et tira subitement sur celui-ci un coup de pistolet dont il fut mortellement blessé. Le fils, qui n'avait pu prévoir ni prévenir une pareille tentative, transporta son père à Boves où les plus grands soins lui furent prodigués. Nous croyons devoir nous abstenir de relater les causes attribuées à l'exécution de ce crime. M. BRUNO mourut des suites de sa blessure le 28 septembre de la même année, c'est-à-dire dix-huit jours après l'événement dont il fut victime. Il était âgé de 47 ans.
Son monument, de forme méplate, est surmonté d'une fort belle pyramide. Sur la face est appliquée une belle table de marbre noir, sur laquelle est l'épitaphe du sieur BRUNO et celle de son épouse, Émilie-Christine LESUEUR, décédé le 13 novembre 1838, à l'âge de 25 ans. Il est flanqué de chaque côté par un pilastre dont la face est recouverte d'une table de marbre destinée à recevoir d'autres inscriptions ; ces pilastres sont couronnés chacun par un chapiteau formé par deux consoles en volutes, tant sur les faces que sur les côtés latéraux, et supportant une urne en marbre noir. A l'élévation postérieure de la pyramide, est sculptée une urne lacrymatoire entrelacée de feuilles et de fleurs de pavots et de cyprès, et à l'élévation supérieure, une couronne d'olivier entourant un clepsydre ailé. Entre ces deux ornements, est gravée en relief l'indication de la famille à laquelle est affectée cette sépulture. Elle est entourée d'une grille en fer.
L'exécution de ce monument, en tout remarquable, est de M. Mangot fils, sur les plans de MM. Duthoit, desquels sont les ornements."
Stéphane C[omte], 1847, p. 209-211.
Chercheur du service de l'Inventaire général du patrimoine culturel de Picardie, puis des Hauts-de-France, depuis 2002.