Dossier d’œuvre architecture IA60003148 | Réalisé par
Chamignon Lucile (Rédacteur)
Chamignon Lucile

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (depuis 2020).

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  • inventaire topographique, Communauté de communes Oise Picarde
Le village de Broyes
Œuvre étudiée
Auteur
Copyright
  • (c) Région Hauts-de-France - Inventaire général

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Communauté de communes de l'Oise Picarde
  • Commune Broyes
  • Lieu-dit
  • Dénominations
    village

Broyes se situe au bord de la route départementale 930 reliant Montdidier à Breteuil. Cette voie sépare le village du Mont Soufflard, promontoire sur lequel s’élève un château construit au début du XIXe siècle. Jusqu’aux années 1850, Broyes se démarque par la présence de vignes tout autour des habitations. Le recul des vignes coïncide avec une forte et régulière baisse démographique. La population passe alors de plus de 400 habitants au début du XIXe siècle à un peu moins de 200 vers 1900. Après le déclin du vignoble, les activités de la population ont surtout été tournées vers le travail du bois et l’agriculture. L’habitat ancien encore visible aujourd’hui se compose donc principalement de fermes comme dans les villages environnants.

La commune connaît une grosse baisse démographique à la suite des bombardements qu’elle a subis au cours de la Première Guerre mondiale. Sur les 56 maisons que compte le village en 1911, 30 sont détruites d’après le recensement de 1921. Broyes est reconstruit grâce au fonds des dommages de guerre et plusieurs maisons des années 1920 sont toujours conservées. La population se stabilise ensuite autour de 160 habitants. Quelques pavillons modernes sont construits à partir des années 2000 et 72 logements ont été relevées en 2020 par l’INSEE pour une population de 148 habitants.  

Origine

 La première mention connue du village est "Broioe", relevée par É. Lambert (1982) dans la Charte du diocèse d’Amiens rédigée en 1103. Ce toponyme serait issu du gaulois briga  signifiant "hauteur" et "forteresse". Un tel site a pu exister sur le Mont Soufflard, petite colline au nord du village, considéré comme un volcan par la tradition populaire (LEBÈGUE, 1994).

D’après Louis Graves (1843), la terre de Broyes aurait été cédée en 1476 avec celles du Cardonnoy et de Sourdon à Jean d’Estouteville, grand-maître des arbalétriers. Plus tard, elle devient possession de la maison d’Hocquincourt. La présence de ces seigneurs semble matérialisée dans l’église. En effet, une chapelle seigneuriale aurait précédé la sacristie et un culot sculpté dans la première travée du chœur figure un angelot portant un blason.

Le château qui se trouve actuellement au sommet du Mont Soufflard a été élevé par Victorien-Alexis-Hippolyte du Bos (inhumé dans le cimetière) au milieu du XIXe siècle. Cette famille, qui s’implante à Broyes au cours de la période révolutionnaire, habitait dans un premier temps dans la demeure en face de l’église, rue de Montdidier. Le cadastre de 1828 figure bien un important domaine organisé autour d’une cour carrée au centre de laquelle se trouvait un pigeonnier. Située juste en face de l’église, cette propriété a pu être un ancien domaine seigneurial. Au début du XXe siècle, elle est occupée par une colonie de vacances dite "colonie montièroise Don Bosco" (d’après les cartes postales anciennes et les recensements de populations). Le bâtiment est toujours visible au n°7 de la rue de Montdidier.

En ce qui concerne le château du Mont Soufflard (visible sur une carte postale ancienne), après être devenu la propriété de la famille Tries de Saint-Fuscien (citée comme propriétaire dans les recensements de population autour de 1900), il est vendu en 1930. Il accueille aujourd’hui des chambres d’hôtes.

Jusqu’au XIXe siècle, le village est célèbre pour ses vignes, implantées tout autour de la zone habitée comme le figure la carte d’état-major dressée au milieu du XIXe siècle.

Le village est toutefois détruit aux deux tiers au cours de la Première Guerre mondiale en raison de sa proximité avec la ligne de front. En 1911, le village compte cinquante-six maisons. Elles ne sont plus que vingt-six en 1921 (AD Oise ; recensements de population). La ferme du Mont Soufflard est rasée et le chœur de l’église est démoli. La commune bénéficie de plusieurs fonds au titre des dommages de guerre pour reconstruire les bâtiments rasés. Le recensement de population de 1926 mentionne la présence d’un baraquement provisoire afin de loger les sinistrés avant la reconstruction de leur maison.

 

Évolution de la morphologie et du parcellaire

 La référence au mont et à la forteresse dans le plus ancien toponyme Broia laisse supposer que le premier noyau d’habitat s’est développé autour du Mont Soufflard. Un événement a pu faire descendre la population un peu plus au sud à son emplacement actuel, près de la route reliant Breteuil à Montdidier. Une église, mentionnée dans le pouillé de la province de Reims vers 1301, témoigne de l’existence d’une paroisse à cette époque et donc d’une agglomération. Le village a pu s’enrichir grâce à la culture de la vigne bien visible sur la carte d’état-major au milieu du XIXe siècle. Les parcelles s’étendaient largement le long de la rue de Plainville. Sur la cadastre de 1828, il est même possible d’identifier le lieu-dit "Vignes derrière les Jardins" à l’arrière des habitations le long de la rue du Cardonnois.

Dès cette époque, comme l’indique Louis Graves (1843), l’agglomération se structure en étoile avec quatre rues partant de l’église. Cette morphologie est toujours la même aujourd’hui. Les quatre axes sont constitués des rues de Sérévillers, Montdidier, Cardonnois et Plainville. Outre l’église, une mairie et une école se sont implantées au cœur du village. Un terrain de jeu de paume a en outre été aménagé dans la rue de Sérévillers à la fin du XIXe siècle (il n’est pas visible sur le cadastre de 1828).

Comme il est possible de le voir sur le cadastre de 1828, le parcellaire est constitué de lanières juxtaposées, plus ou moins fines mais moins régulières que dans les villages-rues. Des fermes dites picardes sont installées dessus avec leur grange sur rue et leur logis en fond de cour, derrière lequel s’étend un potager et/ou une pâture. Les parcelles sont dites "trinquettes" lorsqu’elles sont très étroites comme celles des rues de Montdidier ou de Sérévillers visibles sur le cadastre de 1828.  

En comparaison avec la situation au début du XIXe siècle, Broyes a aujourd’hui perdu un nombre important de maisons (119 maisons en 1831 ; 72 en 2020). Le parcellaire est plus lâche, l’habitat s’est disséminé (en particulier rue de Sérévillers et Montdidier). Les superficies des terrains ont été élargies avec le rassemblement de plusieurs anciennes parcelles en lanières. Toutefois, la forme du village reste identique à celle du début du XIXe siècle.

 

Lieux partagés et structurants

 

                Les croix de chemin

 

Les croix de chemin sont des marqueurs de l’espace dans les territoires du plateau picard. Elles sont le plus souvent implantées au croisement d’axes de circulation importants, à la sortie des agglomérations ou sur le lieu d’un événement marquant. L’Association pour la connaissance et la conservation des croix et calvaires du Beauvaisis a relevé quatre croix de chemin à Broyes. Situées aux extrémités des quatre rues du village, elles en signalent les entrées.

La première se trouve à l’entrée nord-ouest de Broyes, au bout de la rue de Sérévillers. Elle a été refaite en 1999. La seconde est implantée à l’extrémité de la rue du Cardonnois, à l’est du village, au niveau de la patte d’oie formée par deux voies. Elle aurait été érigée en 1861. Celle de la rue de Montdidier est une croix à fuseaux en fonte et semble avoir été installée à la limite des XIXe et XIXe siècles. Enfin, la dernière qui se trouve au niveau de la fourche formée au bout de la rue de Plainville a été restaurée en 2004. Le socle a été reconstruit en brique.

 

                Puits et mares

 

La gestion de l’eau a toujours été un enjeu fort dans ce territoire connu pour ses sols calcaires et poreux. Les nappes sont souvent situées très loin sous le niveau du sol et les puits doivent être creusés très profondément. C’est certainement l’une des raisons pour lesquelles l’habitat est groupé en village : les habitants se sont rassemblés autour de quelques points d’eau coûteux à créer. Puits et mares communaux font partie du patrimoine vernaculaire des villages du plateau picard.

La Notice descriptive et statistique rédigée en 1902 pour le département de l’Oise recense à Broyes sept puits, quarante citernes (privées) et cinq mares. Il est possible d’en identifier sur le cadastre de 1828. Le puits de la rue de Sérévillers (aujourd’hui comblé mais toujours en place, voir ill.) existait déjà, tout comme celui implanté devant la mairie actuelle (ancienne école). Les deux autres qui ont été relevés sont donc un peu plus récents : l’un se trouve dans la rue de Plainville, l’autre dans la rue de Montdidier et sont donc répartis de manière régulière dans tout le village.

Le cadastre de 1828 représente également cinq mares qui ont toutes disparues. Deux se trouvaient au centre du village : la première à l’emplacement du parking ; la seconde derrière le chevet de l’église (une pelouse avec un banc occupe son emplacement aujourd’hui). Une mare se trouvait à la sortie de la rue de Montdidier, une autre dans la rue de Sérévillers (en face du sentier menant au terrain de paume) et la dernière se situait dans la rue du Cardonnois.

 

                Équipements communaux

 

Les dossiers de la série O conservés aux Archives départementales de l’Oise regroupent des documents du XIXe siècle qui éclairent sur l’histoire de la mairie, des écoles et du presbytère de Broyes. Des sources relatives aux dommages de guerre de la Première Guerre mondiale permettent de la compléter.

 

                               Ancienne et nouvelle école

 

Après la Révolution, c’est une vieille maison qui sert d’école. Compte tenu de sa vétusté et dans un contexte de nouvelles lois en faveur de l’instruction primaire, un devis est dressé en 1832 par l’architecte d’arrondissement monsieur Bellanger afin d’en construire une nouvelle. Elle se trouve à l’emplacement de l’ancienne, qui est alors démolie. Le nouveau bâtiment est en pans de bois et couvert de tuiles pannes du Mesnil-Saint-Firmin. Les travaux sont réalisés par l’entrepreneur monsieur Tourniquet domicilié à Sains-Morainvillers. Ils sont réceptionnés en 1835. Le mobilier de l’école (tables, bancs, tableaux, ardoises…) est conçu par le menuisier monsieur Frémont (Sains-Morainvillers). D’après un plan archivé (AD Oise ; série O), l’école était le bâtiment qui, aujourd’hui, accueille une bibliothèque, dans l’enceinte du cimetière.

Toutefois, ce projet ne prévoit pas de logement pour l’instituteur. En 1850, le conseil municipal décide donc d’acquérir une maison au sieur Corniquet dans la rue de l’Église (actuelle rue de Montdidier) pour servir d’habitation au maître d’école. Cette propriété possédait une "boutique à usage de tonnelier servant aussi de salle de danse ; une étable à vache et une autre petite boutique" ("boutique" désigne l’atelier en picard).

Cependant, des plaintes de l’inspection de l’Instruction Publique s’élèvent en 1874 : l’école est dans un mauvais état, tout comme le logement de l’instituteur, trop éloigné. En 1877 un projet de construction d’une école mixte avec logement pour l’instituteur est donc élaboré. Les plans sont dressés par monsieur Samson, architecte de l’arrondissement. Le logement de fonction comprend une cuisine et une salle à manger au rez-de-chaussée ainsi que deux chambres à l’étage. La classe est établie derrière ce bâtiment. L’ensemble, bâti en moellons de craie de Broyes pour les fondations et brique du Mesnil-Saint-Firmin ou de Bacouel pour les murs, est en retrait de rue. Les travaux, menés par l’entrepreneur en bâtiment Eugène Vaquez (à Bacouel) sont achevés en 1881. La mairie s’installe alors dans l’ancienne école, située en face dans l’enceinte du cimetière.

L’école est endommagée pendant la Première Guerre mondiale et en 1922, un devis est établi par l’architecte Albert Lemaître afin de mener des réparations.

 

                                L’ancienne mairie

 

Elle se trouvait dans la première école, le long du cimetière. Endommagée pendant la Première Guerre mondiale, elle a été reconstruite en 1922 par l’entrepreneur Clodomir Martin à Breteuil. Elle accueille aujourd’hui une bibliothèque. À côté se trouve une boîte à livres installée dans une ancienne cabine téléphonique.

 

                               Le presbytère

 

Son emplacement n’a pas pu être déterminé mais il se trouvait près de l’église. Il a en partie été détruit par les bombardements lors de la Première Guerre mondiale. Trop endommagé pour être réparé, il est reconstruit sur les plans de l’architecte Albert Lemaître, approuvé par le préfet en 1928 (voir ill.).

  • Typologies
    vallée sèche
  • Statut de la propriété
    propriété publique
    propriété privée

Documents d'archives

  • AD Oise. Série J ; sous-série 49 J : 49 Jp 12. Broyes. Inventaire des croix et calvaires. Archives de l'association pour la connaissance et la conservation des calvaires et croix du Beauvaisis, 2007.

  • AD Oise. Série M ; sous-série 6 M : 6 Mp 131. Broyes. Recensements de population (1820 à 1936).

  • AD Oise. Série O ; sous-série 2 O : 2 O 29196. Broyes. Dommages de guerre de plusieurs bâtiments (1921-1934).

  • AD Oise. Série O ; sous-série 2 O : 2 O 29184. Broyes. Mairie et école (1833-1910).

  • AD Oise. Série O ; sous-série 2 O : 2 O 29187. Broyes. Presbytère (1823-1939).

Bibliographie

  • DELATTRE, Daniel. Le canton de Saint-Just-en-Chaussée : 84 communes, 84 lieux incontournables. Grandvilliers : éditions Delattre, 2020.

    p. 231.
  • LAMBERT, Émile. Dictionnaire topographique du département de l'Oise. Amiens (Musée de Picardie) : Société de linguistique picarde, 1982 (tome 23).

    p. 97.
  • LEBÈGUE, Maurice. Les noms des communes du département de l'Oise. Amiens : Musée de Picardie, 1994.

    p. 57.
  • Notice descriptive et statistique sur le département de l'Oise. Paris : Imprimerie du service géographique, 1902.

    p. 231.

Périodiques

  • GRAVES, Louis. Précis statistique sur le canton de Breteuil, arrondissement de Clermont (Oise). Annuaire de l'Oise. Beauvais : Achille Desjardins, 1843.

    p. 64-65.

Documents figurés

  • Broyes. Cadastre napoléonien, section A, feuille 3, 1828 (AD Oise ; EDT 325/1 G 1).

  • Broyes. Cadastre napoléonien, section B, feuille 1, 1828 (AD Oise ; EDT 325/1 G 1).

  • Broyes. Cadastre napoléonien, section B, feuille 3, 1828 (AD Oise ; EDT 325/1 G 1).

  • Broyes. Cadastre napoléonien, section C, feuille 2, 1828 (AD Oise ; EDT 325/1 G 1).

  • Broyes (Oise). Carrefour, carte postale, éd. Carieux-Vimeux à Breteuil, [premier quart du XXe siècle] (coll. part.).

  • Broyes (Oise). Colonie montièroise Dom Bosco, carte postale, [s. ed], [premier quart du XXe siècle] (coll. part.).

  • Broyes (Oise). Le château, carte postale, éd. C. H. à L. (Oise), [vers 1906] (coll. part.).

Annexes

  • Les activités anciennes des habitants et habitantes de Broyes
Date(s) d'enquête : 2020; Date(s) de rédaction : 2020
(c) Région Hauts-de-France - Inventaire général
Chamignon Lucile
Chamignon Lucile

Chercheuse de l'Inventaire général du Patrimoine culturel, Région Hauts-de-France (depuis 2020).

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